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Cameroun: les rues de Maroua uniquement réservées aux hommes

Depuis le double attentat du 22 juillet mené par Boko Haram qui a fait plusieurs morts.

11.09.2015 - Mıse À Jour : 11.09.2015
Cameroun: les rues de Maroua uniquement réservées aux hommes

AA/ Maroua (Cameroun)/ Pado Chemie

Pas de femmes dans les rues de Maroua (Extrême-Nord camerounais). Elles n’y circulent plus ou presque. Elles se cachent pour vivre. Boko Haram a semé la terreur, partout.

Depuis le double attentat-kamikaze du 22 juillet qui a fait plusieurs morts, la peur a gagné la capitale régionale de l’Extrême-Nord du Cameroun.

Les hommes prennent depuis en charge les tâches des femmes, refusant d’exposer leurs épouses au danger. Le marché et les boutiques font désormais partie de leurs attributions.

«Je préfère y aller moi-même. Je suis un homme et je peux facilement m’enfuir en cas d’attaque de Boko Haram », dit Hamidou, conducteur de mototaxi, rencontré par Anadolu à l’entrée du marché central de Maroua.

«C’est ici que l’attaque des terroristes (du 22 juillet) s’est produite, poursuit-il, en pointant du doigt le sol. Ce jour-là, mon épouse était allée chez ses parents. Sinon, elle aurait pu être parmi les morts ».

Depuis le 22 juillet, Hamidou se rend au marché deux à trois fois par semaine pour faire les achats. Aidé de son épouse, ce père de cinq enfants (deux garçons et trois filles) dresse la liste des « choses à acheter » avant d’aller au marché, en vue de rentrer vite chez-lui.

Hamidou n’est pas le seul à se taper les tâches de son épouse. Tout comme lui, Idriss Fidjil, la trentaine, croisé un samedi fait des emplettes dans une boutique au quartier Pictoiré à Maroua. Ses achats attisent la curiosité des deux femmes qui attendent leur tour : une bouteille de lait de beauté, deux paquets de serviettes hygiéniques, cinq œufs, quatre cubes et deux baguettes de pain.

«Lorsque Boko Haram a frappé Maroua, j’étais en voyage de travail à Kousseri. J’ai appelé mon petit frère pour savoir comment allaient ma femme et ma fille. Je suis rentré le lendemain 23juillet au lieu du 25 comme c’était prévu », raconte Fidjil.

A l’absence de Fidjil, c’est son petit frère qui a « l’obligation » de s’occuper de sa famille et de faire  le marché. « Ma femme ne doit plus jamais aller faire les achats au marché ou à la boutique. Elle reste à la maison », tranche le jeune camionneur.

D’après le sous-préfet de Maroua 1er Pascal Zoua, cette méfiance vis-à-vis des lieux qui ont été pris pour cible par Boko Haram et d’autres endroits de la ville, est comprise. « Nous essayons de les rassurer. Nous avons des patrouilles mixtes policiers-gendarmes-militaires qui sillonnent la ville de jour comme de nuit devant les mosquées, les églises, les marchés, les lieux de grande mobilisation, les gares routières et autres ».

Sauf que ces mesures ne rassurent pas la population et, surtout les hommes. A Mora, Salif qui fait du commerce entre cette petite ville et Maroua préfère rester « prudent ».

 «Mes enfants et ma femme doivent être protégés. Je fais les achats pour la maison en gros à la place de mon épouse. Boko Haram ne tuera pas un membre de ma famille », jure-t-il, mélangeant français et haoussa.

Conscient de cette psychose, Pascal Zoua a décidé de revoir ses méthodes. Des radios communautaires de la ville de Maroua sont mobilisées. Elles diffusent des spots publicitaires « qui sensibilisent et rassurent la population ».

«Depuis le début de la rentrée scolaire le 7 septembre, des forces de l’ordre sillonnent les établissements scolaires à toute heure. Nous voulons à tout prix diminuer la peur », avoue le sous-préfet de Maroua 1er.

«Tout peut arriver à tout moment, s’inquiète Hamidou, le front plissé. Après les attaques de Fotokol ou Kolofata, le gouvernement a pris de nombreuses mesures. Mais, Maroua a été à son tour attaquée. Boko Haram est partout et surtout parmi nous. Il faudra toujours rester en alerte ».

 
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