France : Après le burkini, la finance islamique dans le viseur de Christian Estrosi
Près d’un an après la polémique sur le « burkini », Christian Estrosin le maire de Nice s’attaque à la visibilité sur la voie publique d’une société spécialisée dans les produits d’assurance et d’épargne estampillés « finance islamique ».

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AA/France/ Cécile Durmaz
Près d’un an après la polémique sur le « burkini », Christian Estrosin le maire de Nice (Sud français) s’attaque à la visibilité sur la voie publique d’une société spécialisée dans les produits d’assurance et d’épargne estampillés « finance islamique ».
A chaque saison sa controverse, serait peut-être la ligne de conduite suivie depuis quelques années par Christian Estrosi. Néanmoins cette fois la polémique n’émerge pas des plages et de ses vacancières trop habillées pour avoir le droit de profiter du littoral azuréen.
Le maire a décidé d’innover dans l’échelle de l’intolérance et de l’amalgame cette année en faisant de la finance islamique et en particulier sa visibilité dans les rues de la ville de Nice, son nouveau cheval de bataille.
Dans un courrier daté du 12 mai adressé à la société Noorassur, Christian Estrosi a fait part de son refus d’installer son enseigne commerciale « Noorassur.com – Finance islamique » sur sa devanture. Ce dernier justifie cette décision par le fait que cette enseigne « fait peser un risque fort de troubles à l’ordre public en raison des événements qui se sont déroulés le 14 juillet 2016 », date de l’attentat revendiqué par DAESH où un camion bélier avait causé la mort de 86 personnes venues assister aux festivités de la fête nationale française.
L’élu ne s’arrête pas là et pousse son raisonnement jusqu’à justifier sa décision par l’éventualité d’une mise en danger du personnel et de ses clients « Ces risques sérieux pour l’ordre public […] mettraient en danger tant le personnel que les clients de l’établissement confrontés à des rassemblements antagonistes qui ne manqueront pas de se produire dès connaissance de telles enseignes à Nice ».
Scandalisée par cette décision, Sonia Mariji, fondatrice de Noorassur a saisi le tribunal administratif de Nice d’un référé suspension et un recours sur le fond. « L’amalgame entre Noorassur, groupe financier réglementé, et le terrorisme est scandaleux », s’est insurgée l’entrepreneuse, s’estimant victime de discrimination et de stigmatisation. Cette dernière dénonce une « atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l’industrie ».
La mairie se défend de toutes accusations affirmant « en aucun cas nous ne nous opposons à l’activité », a réagi auprès Monique Bailet, directrice générale adjointe chargée de la sécurité. « L’activité peut être exercée, il suffit de trouver une enseigne qui soit plus consensuelle », ajoute Mme Bailet, appelant à ne pas être « provocateur dans une ville où il y a une sensibilité très forte à ce que nous avons vécu ».
Pour l’avocat de Sonia Mariji, Patrice Spinosi qui était intervenu au nom de la Ligue des droits de l’Homme dans les recours contre les arrêtés antiburkini, le raisonnement menant à une telle décision est dangereux et « véhicule l’idée selon laquelle la finance islamique serait liée au terrorisme islamiste, alors que l’éthique de cette activité se situe aux antipodes de ce qui fonde l’idéologie mortifère du terrorisme ». La décision du tribunal de Nice est attendue dans les semaines à venir.
Noorassur présente son activité comme une alternative à la Finance Conventionnelle. La finance islamique est un secteur qui connaît une forte progression depuis plusieurs années. Elle se différencie dans la mesure où elle est respectueuse des préceptes de la religion musulmane en matière de transactions et de commerce, mais n’est pas pour autant réservée exclusivement à une clientèle de confession musulmane.
Nouveau visage de la sphère commerciale estampillée « halal », Noorassur compte à ce jour six agences en France et prépare l’ouverture de quatre agences supplémentaires. La société espère atteindre le chiffre de 50 agences ouvertes d’ici 2018.