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"De grands changements sont intervenus depuis 15 ans", a expliqué l'Ambassadeur de France en Turquie

L’Ambassadeur Laurent Bili a reçu l'Agence Anadolu à l'Ambassade de France à Ankara et a commenté les changements importants intervenus en Turquie depuis 15 ans

28.02.2014 - Mıse À Jour : 28.02.2014
"De grands changements sont intervenus depuis 15 ans", a expliqué l'Ambassadeur de France en Turquie

- Il a évoqué "un grand moment de relation bilatérale" avec la visite d'Etat du Président de la République le mois dernier.

AA - Ankara - Lorène Barillot

Laurent Bili, Ambassadeur de France en Turquie depuis juin 2011, a exposé son point de vue sur les changements qu'a pu connaître la Turquie depuis l'arrivée au pouvoir du Parti de la Justice et du Développement (AKP). Il a évoqué la mise en œuvre des réformes démocratiques et les projets communs en matière énergétique ou de défense.

Si Laurent Bili ne constate pas dans le pays de bouleversements entre sa prise de fonction en 2011 et maintenant, lui qui avait déjà passé trois ans comme Premier Secrétaire puis Deuxième Conseiller de l'Ambassadeur à Ankara entre 1995 et 1998, en voit certainement entre la Turquie des années 1990 et celle des années 2010 : "je pense que de grands changements ont eu lieu avec l'arrivée de l'AKP au pouvoir au début des années 2000. La politique de modernisation et les négociations avec l'Union Européenne ont fait sauter un certain nombre de tabous. Ces politiques ont été accompagnées d'un développement économique avec l'arrivée très importante d'investissements étrangers. Selon moi donc c'est plutôt la décennie 2000 qui a été une décennie de bouleversements."

L'Ambassadeur a par exemple expliqué qu'à son retour en 2011, il avait pu constater une plus grande facilité de transports, grâce au développement de la qualité des infrastructures routières : "J'ai quelques souvenirs, dans les années 1990, de routes à deux voies assez étroites où je me retrouvais tout d'un coup avec quatre paires de phares en face de moi qui venaient en sens contraire, parce que chacun doublait sur les bas côtés opposés et je me demandais par où moi j'allais passer si même les bas-côtés étaient déjà pris. Maintenant ce sont des choses qui ont complètement disparu, cela nous fait sourire d'en parler aujourd'hui."

"Nous sommes dans une société dynamique donc il y a une tectonique des plaques", a expliqué Laurent Bili pour qualifier la densité de la période actuelle en Turquie. "À Gezi on a vu une jeunesse assez dynamique et finalement assez moderne dans ses aspirations. Pour nous, en tant que Français, en tant qu'Européens, et en tant qu'observateurs étrangers, voir la jeunesse s'agiter, d'une certaine façon, ce n'est pas quelque chose qui nous surprend. En tant qu'étudiant cela a pu nous arriver d'être dans la rue parce que telle ou telle chose nous déplaisait. Donc ça je crois que c'est plutôt un signe de maturité démocratique. Après, qu'il y ait des événements extérieurs, avec des perturbations, des casseurs qui profitent des événements, je dirais que cela fait partie aussi de l'ordre naturel des choses. Il faut savoir gérer démocratiquement les foules pour garder les choses sous contrôle", a déclaré l'Ambassadeur sur les événements du début de l'été.

Il a poursuivi sur la spécificité des mois à venir et la densité dans l'actualité d'accusations de corruption et de scandales : "Nous sommes dans une période électorale donc il y a effectivement beaucoup de choses dans l’actualité. La démocratie va parler en mars et en août, et probablement l'année prochaine. Nous, nous suivons cela avec surtout une préoccupation : celle que les libertés fondamentales soient toujours respectées car cela fait partie du pacte des négociations de la Turquie et de l'Union Européenne."

- "GDF-Suez présent sur près d'un siècle à Sinop" -

Alors que plusieurs analyses évoquent un changement de cap dans la diplomatie de la Turquie, qui se détournerait de l'Europe pour l'Afrique ou le Moyen-Orient, Laurent Bili estime qu'il ne faut pas réfléchir en terme de 'soit l'un soit l'autre' : "je ne crois pas que la Turquie se détourne de l'Europe. Ce serait absurde de toutes façons car la géographie de la Turquie, l'histoire de la Turquie, c'est l'Europe. La Turquie, en devenant un pays plus dynamique, plus moderne, s'ouvre à de nouveaux horizons et cela aussi c'est une évolution naturelle. En quelques années, la Turquie a ouvert une trentaine d'ambassades en Afrique alors qu'il y a quelques années il n'y en avait qu'une dizaine au maximum. C'est une nouvelle réalité et le fait que l'Agence Anatolie accompagne cette réalité en portant la voix de la Turquie dans l'Afrique francophone est aussi quelque chose de profondément naturel. [...] Nous sommes dans un monde de plus en plus global et c'est normal que les acteurs aient envie d'être présents partout."

L'Ambassadeur a qualifié la relation franco-turque d'"apaisée". Il a évoqué "un grand moment de relation bilatérale" avec la visite d'Etat du Président de la République au mois dernier : "on est dans une période où les deux pays ont décidé de mettre de côté leurs sujets de tension et de regarder vers l'avenir. Donc il y a beaucoup de choses que l'on peut faire ensemble. Nous sommes deux pays qui sont situés dans la géographie européenne chacun à une extrémité. Nos zones d'intérêt se recoupent. Il y a beaucoup de choses que l'on peut faire ensemble, y compris en Afrique. Plus il y a de pays européens qui s'intéressent à l'Afrique, mieux c'est pour le continent africain aussi."

Laurent Bili, qui considère qu'il y a aussi d'autres zones où la France et la Turquie peuvent travailler ensemble, comme l'Asie centrale ou le Moyen-Orient, accorde son importance à l'économie, par laquelle passe aussi, selon lui, une relation diplomatique : "il y a beaucoup de grands projets sur lesquels la France et la Turquie peuvent travailler ensemble. Sont symboliques en ce moment par exemple les projets de développement d'énergie nucléaire, car ce sont des sujets stratégiques, sur lesquels les pays s'engagent pour 60, 90 ans. Sur le projet de Sinop les Français se sont alliés aux Japonais pour offrir une solution : GDF-Suez serait l'entreprise qui va gérer le fonctionnement de cette centrale longue durée, c'est-à-dire que GDF-Suez sera présent sur quasiment cette durée d'un siècle à Sinop. Ce sont des décisions lourdes, qui ne se prennent pas à la légère et donc qui reflètent bien ce bon état de la relation."

- Une possible coopération militaire en Centrafrique -

L'Ambassadeur a aussi évoqué des projets dans d'autres domaines : "il y a une grande tradition en France dans les transports ferroviaires et la Turquie fait des investissements majeurs dans ce domaine de la grande vitesse, là aussi nous pouvons faire pas mal de choses ensemble. Je crois que la volonté est là, maintenant il faut regarder si nous pouvons être compétitifs, si nous pouvons proposer des solutions de localisation, de transferts technologiques qui répondent aux attentes de la Turquie."

Sur le plan militaire, l'Ambassadeur n'exclut pas une coopération entre les deux pays, notamment en Centrafrique : "le Ministre Davutoğlu a marqué un intérêt de principe pour la participation à l'opération Eufor-RCA. On travaille, on donne le maximum d'informations aux autorités turques pour qu'elles puissent prendre leur décision. Je crois que cela fait partie, effectivement, des choses qui peuvent nous rapprocher, d'être ensemble sur le terrain. La France aura un rôle important, puisque c'est elle qui va commander la force, qui sera nation cadre. Et donc c'est aussi un sujet de coopération pratique entre les armées turques et les armées françaises. En tant qu'ambassadeur en Turquie c'est quelque chose que je vois avec beaucoup d'intérêt. Je pense que c'est sur des projets concrets que l'on renforcera notre relation."

Quant à une visite officielle du Premier Ministre turc en France, "il n'y a pas de date qui a été fixée mais c'est dans l'ordre naturel des choses", selon Laurent Bili, qui a expliqué la création d'un cadre dit stratégique de consultation "qui prévoit des rencontres annuelles au niveau des ministres des Affaires étrangères qui chapeautent un ensemble de ministres techniques, pour travailler, justement, sur un plan d'action de coopération ; les ministres, pour leur part, rendent compte au Président et au Premier ministre de l'avancement des travaux."

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