Politique

Tunisie/Enseignement: Les grèves du public profitent au privé

- Le nombre d’élèves tunisiens inscrits dans le secteur privé a augmenté, au cours des dernières années, à cause, notamment, des grèves à répétition observées dans le secteur de l’enseignement public.

Hatem Kattou  | 30.03.2017 - Mıse À Jour : 31.03.2017
Tunisie/Enseignement: Les grèves du public profitent au privé

Tunis

AA/Tunis/ Afef Toumi

Le secteur public de l’enseignement de base, en Tunisie, (primaire et secondaire) a enregistré une série de grèves observées par les syndicats de l’enseignement, relevant de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), principale force syndicale du pays.

Les enseignants du secteur public revendiquent, entre autres, une révision du système éducatif et une amélioration de leurs conditions matérielles.

Le nombre d’élèves tunisiens inscrits dans le secteur privé a augmenté, au cours des dernières années, à cause, notamment, des grèves à répétition observées dans le secteur de l’enseignement public. comme l’a affirmé, à Anadolu , Bilel Chabbi, conseiller du ministre de l’Education, Néji Jalloul.

Du côté des parents, l’intérêt des élèves reste prioritaire. A part le fait qu’ils soient gênés par l’arrêt des cours, à plusieurs reprises, certains estiment que la qualité de l’enseignement dans le secteur public, a visiblement régressé e t son niveau « s’st rétréci comme peau de chagrin» .

Yosr, mère de deux enfants âgés de 9 et 14 ans, fait partie de ces parents qui exigent la qualité et qui s’intéresse peu aux coûts élevés de l’enseignement privé. « Malgré les revenus modestes de mon mari, sachant que je ne travaille pas, mes deux enfants poursuivront tout leur cursus scolaire, dans le privé. Le rapport qualité-prix est raisonnable, je suis au moins sûre que mes enfants maitriseront les langues et bénéficieront d’un suivi quotidien au sein de l’établissement même », explique-t-elle à Anadolu.

Une autre question a été soulevée par Bochra, qui rejoint l’avis de la première concernant la qualité, s’agissant de la sécurité des enfants. « Dans une école privée, je suis au moins rassurée que mes enfants sont en sécurité du moment où je les dépose jusqu’à ce que je les récupère l’après-midi », indique Bochra, ajoutant que les grèves à répétition du secteur public ne la motivent pas à inscrire ses enfants dans un établissement scolaire public.

Ghassen, un fonctionnaire, père de deux filles, a dû prendre l’avis de son entourage, amis et famille, avant d’arrêter son choix. Finalement, il affirme avoir opter pour l’enseignement privé.
« Ma fille aînée est en 5ème année primaire et la plus jeune est en classe préparatoire, les deux dans la même école. On voit bien ce qui se passe avec les grèves et les absences très fréquentes des enseignants, notamment les femmes, dans le secteur public, à part l’encombrement dans les classes », s’exprime le père, sans aucun regret, malgré sa situation financière inconfortable. Il compte, d’ailleurs, laisser ses filles dans le secteur privé, jusqu’au Baccalauréat.

Les raisons qui poussent les parents à inscrire leurs enfants dans des établissements scolaires privés foisonnent. Il est pourtant remarquable qu’ils se rejoignent en trois points, la qualité de l’enseignement, qu’ils considèrent meilleure au privé, les grèves des enseignants dans le secteur public et la sécurité de leurs rejetons.

Anadolu a tenté de contacter l’autorité de tutelle au ministère de l’Education, qui aurait éclairci, d’un point de vue officiel, les raisons de cette nouvelle vague et orientation choisie par les parents. Aucune réponse n’a pu être recueillie. Il est également utile de faire parler les enseignants du secteur public pour décortiquer la question.

Kalthoum Dahria, une institutrice dans une école à Tunis, affirme, dans une déclaration à Anadolu, que dans l’établissement où elle enseigne, plusieurs élèves étaient de retour des écoles privées, à la dernière rentrée scolaire. Elle considère que les parents manquent d’informations sur le système éducatif au privé, qui ne reflète pas le niveau réel des élèves.
« Un collègue a quitté son poste dans une école privée car on lui a imposé de gonfler les notes alors qu’il évaluait correctement ses élèves et donnait à chacun ce qu’il méritait », poursuit-elle.
Cependant, elle se dit compréhensive quant à l’attitude des parents qui pensent à la sécurité de leurs enfants en les inscrivant au privé.

« Certains font le calcul de ce que coûte une garderie avec les cours particuliers, auxquels on n’échappe pas, et trouvent que le compte revient au même s’ils les inscrivent dans une école privée, moyennement chère, là où les frais à payer englobent tous les services », explique l’enseignante, se référant aux expériences de gens qu’elle connait.

D’autre part, Mme. Kalthoum considère que si la qualité de l’enseignement était meilleure au privé, les enseignants qui y travaillent auraient été recrutés par l’Etat. Elle exprime, également, son étonnement du fait que les écoles privées ne se réfèrent pas au programme tunisien d’enseignement, et se base sur des programmes et des manuels importés de l’étranger.

Bien qu’elle défende, bec et ongles, le secteur public de l’enseignement, Mme Dahria n’a pas nié l’existence de défaillances dans ce secteur et d’autres manquements dont souffrent certains enseignants « sans conscience professionnelle, qui ne respectent pas la noblesse du métier », mais, sans vouloir généraliser.

Autant de positions contradictoires et de tiraillements qui ne cessent de se creuser. Entre le métier de maître d’école qui perd de son aura, le changement substantiel du mode de vie de larges catégories de Tunisiens, notamment, dans la capitale e t les villes côtières, le secteur de l’enseignement se trouve enlisé dans un cercle « vicieux », déboussolé par les promesses sans lendemain de réformes qui s’avèrent être des « réformettes » lancées sur fond de conflits à portée partisane, politicienne et idéologique.

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