Politique

Tunisie: Des élections municipales « crédibles », mais imparfaites selon les observateurs de l’UE

Esma Ben Said  | 09.05.2018 - Mıse À Jour : 09.05.2018
Tunisie: Des élections municipales « crédibles », mais imparfaites selon les observateurs de l’UE

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AA/Tunis/Rached Cherif

Dimanche 6 mai, la Tunisie a tenu ses premières élections municipales depuis la Révolution de 2011 pour désigner les conseils des 350 municipalités du pays. Comme à chaque scrutin ostrévolutionnaire, l’Union européenne a dépêché une mission d’observation électorale (MOE-UE).

« Malgré une mobilisation modeste et certaines faiblesses » dans l’organisation du vote, la MOE a salué « une étape cruciale pour la démocratie tunisienne » dans son rapport préliminaire rendu public mardi.

Composée de 124 observateurs, la MOE s’est déployée dimanche 6 mai sur l’ensemble des régions du pays. Au total, elle a visité 537 bureaux de vote de 221 municipalités, sur les 300 que compte la
Tunisie.

Un dispositif « important, avec peu de précédents pour des élections municipales », a souligné Fabio Massimo Castaldo, vice-président du Parlement européen et chef observateur de la
mission européenne.

Ce jour-là près de 5,4 millions de Tunisiens étaient appelés aux urnes lors des premières élections municipales libres de leur Histoire. Ils devaient départager les quelque 53 000 candidats inscrits sur
les 2074 listes, dont un grand nombre de listes indépendantes se disant apolitiques.

Le rapport préliminaire estime que « Les électeurs tunisiens ont pu exprimer leur choix librement au cours d’un scrutin crédible » en indiquant que le vote « s’est généralement déroulé dans le calme ».

De même, les procédures de vote et de dépouillement ont été correctement appliquées dans une ambiance relativement consensuelle. Le communiqué de la mission d’observation souligne toutefois
les difficultés de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) qui a accusé « un retard significatif » dans la préparation de cette échéance.

La faute à la « crise qui a affecté son fonctionnement », en référence de la démission avec fracas de son précédent président, Charfik Sarsar, qui avait mené à bien l’organisation des trois élections tenues depuis 2011.

Où sont les jeunes ?

La MOE ne délivre donc pas un satisfecit général. Principale source de préoccupation : la participation faible (34 %) au regard de l’enjeu. Environ deux électeurs sur trois ne se sont pas déplacés dimanche.

L’abstention des jeunes en particulier a été importante. Alors que la moitié (52 %) des candidats avait moins de 35 ans, très peu de nouveaux jeunes électeurs se sont inscrits pour pouvoir voter.

Même inquiétude pour le Conseil de l’Europe (COE), qui avait également déployé une mission d’observation de taille plus modeste. « Il faut s’interroger sur les raisons de cette abstention, en particulier chez les jeunes. S’agit-il d’un désintérêt pour la vie politique ou est-ce le résultat de la faible médiatisation ? » s’interroge William Massolin, directeur du bureau de Tunis du COE.

Bien que visant moins à évaluer le processus électoral qu’à alimenter la réflexion des collectivités locales européennes, les conclusions de la mission du Conseil de l’Europe « rejoignent totalement » celle de
la MOE de l’Union européenne, le diplomate européen.

Outre la crainte d’un désintérêt pour les partis politiques, qui expliquerait aussi le score important des listes indépendantes, le rapport de la MOE-UE pointe une campagne électorale « à peine visible dans l’espace public ». La faute à un contrôle « excessivement rigide » de la campagne par l’ISIE, en particulier « le plafond relativement vas des dépenses de campagnes » autorisées, indique M. Castaldo.

De même, la couverture médiatique, jugée « équilibrée, mais faible » a été limitée, « reflétant la complexité de la règle de répartition du temps d’antenne » instaurée par la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA).

Les correspondants de la presse étrangère se sont aussi plaints des restrictions imposées à leur travail. La loi électorale interdit en effet aux candidats de faire campagne dans les médias internationaux. Une liste des candidats soupçonnés d’infraction a même été transmise à la HAICA avec à la clé de possibles peines d’amende.

Enfin, les rapports d’observation des missions de l’UE et du COE pointent de la même manière un certain nombre de difficultés et d’irrégularités. Mais, il n’y a « aucune violation massive » de nature à remettre en question la crédibilité des résultats, a réaffirmé M. Castaldo.

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