
AA/ Sidi Oueld Abdelmalek/ Nouakchott
Après de longues hésitations, l’opposition politique en Mauritanie semble accepter l’engagement d’un dialogue sérieux avec le gouvernement mais sous conditions.
Des médias ont rapporté que le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz aurait proposé la tenue coûte que coûte d’un dialogue avec l’opposition, en vue d’apaiser la tension, après des années de tiraillements entre pouvoir et opposition.
Mohamed Ould Echine, journaliste dans une agence de presse indépendante en Mauritanie «al-Akhbar» estime que les résultats du dialogue ne vont pas apporter des changements majeurs qui pourraient renforcer les acquis démocratiques dans le pays d’autant que les concessions qui seraient éventuellement faites par le pouvoir vont se limiter à une petite partie des exigences de l’opposition. Selon lui, le dialogue n’a d’autre objectif que d’apaiser la tension politique et sociale qui règne dans le pays.
«Le gouvernement ne ferait pas de concessions importantes» a-t-il assuré dans une déclaration à l’agence Anadolu rejetant dans ce sens, l’éventualité de la participation de l’opposition à un gouvernement d’union nationale pour gérer les affaires courantes du pays ainsi que la neutralité de l’institution militaire.
Pour ce faire, Mohamed Ould Echine prévoit que le gouvernement procède à la dissolution du parlement et des conseils locaux en vue de garantir la participation de l’opposition et opère des modifications sur le Conseil constitutionnel et l’instance nationale indépendante pour les élections.
Le Conseil Constitutionnel se compose de six membres dont la moitié est désigné par le président mauritanien, 2 membres par le président de la première chambre parlementaire et un autre par la deuxième chambre. Le Conseil Constitutionnel veille à la régularité de l'élection du Président de la République, à l’examen des recours et procède à l’annonce des résultats du scrutin.
En ce qui concerne les délais du dialogue, le journaliste a estimé que les conditions actuelles sont totalement défavorables pour engager une telle initiative d’autant que le gouvernement avait refusé le dialogue avec les ouvriers de la plus grande compagnie minière dans le pays.
«L’opposition n’entamerait pas un dialogue avec un gouvernement qui fait l’objet de vives critiques» a rappelé Oueld Echine.
Le gouvernement mauritanien avait adressé récemment un document aux partis de l’opposition leur demandant de présenter leur point de vue sur le dialogue politique qui permettrait éventuellement de surmonter la crise à laquelle le pays fait actuellement face.
Le document comprend 15 points dont particulièrement, le rétablissement de la confiance entre le gouvernement et l’opposition, l’organisation des élections parlementaires et municipales consensuelles, la non-ingérence de l’armée dans les activités politiques, la lutte contre la corruption et la transparence dans la gestion de l’argent public.
Des forces de l’opposition avaient émis des réserves sur certains points particulièrement la modification de l’âge légal pour se porter candidat aux élections d’autant que cette mesure risque, selon elles, de porter atteinte à la constitution mauritanienne.
En 2014, des partis politiques de l’opposition avaient boycotté les élections présidentielles dans le pays pour protester contre le refus des autorités de remplir certaines conditions relatives au contrôle de l’opération électorale.
Pour l’analyste Mohamed Fall Mohamed Said, le gouvernement s’apprête à entamer de grands changements politiques et sociaux à la lumière du dialogue politique qui serait engagé.
Dans une déclaration à Anadolu, il a ajouté que le niveau de sérieux affiché par le gouvernement s’illustre, bel et bien, à travers l’examen de toutes les questions en suspens sans aucune condition.
L’analyste a également écarté l’hypothèse selon laquelle le dialogue va toucher la constitution du pays en vue de permettre à l’actuel président de se porter candidat pour un troisième mandat.
«Le président avait affirmé à maintes reprises son respect aux dispositions de la constitution mauritanienne qui l’empêche de se porter candidat pour un 3e mandat » a-t-il soutenu.
Cependant, plusieurs observateurs craignent que le gouvernement mauritanien n’engage un amendement de la Constitution dans le cadre du dialogue prévu.