
AA/ Antananarivo/ Alain Iloniaina
L’ancien chef d’Etat malgache, Marc Ravalomanana, de retour à Antananarivo, lundi, après un exil forcé de cinq ans en Afrique du Sud suite à la pression populaire, suscite toujours l’admiration et attise encore la rancœur, selon que l’on soit partisan ou détracteur de celui qui a gouverné durant sept ans sur Madagascar.
Pour les journalistes venus assister à sa conférence de presse, lundi, après un retour discret dans la capitale, l’ex-président Mark Ravalomanana (2002-2009), « n’a pas changé ».
Ce père de quatre enfants qui fut porté au pouvoir en 2002 par un élan populaire avant de voir son règne décroitre, a toujours le contact facile et n’a perdu en rien son sens de la communication et de la scénarisation des évènements.
Né le 12 décembre 1949 dans les Hautes Terres centrales, l’ancien chef de l’Etat fait très attention à son image et à sa communication. L’ancien chef de l’Etat laisse courir une légende d’un « success story », réalisé par un laitier avec sa bicyclette devenu à la tête d’un empire économique dans le domaine de l’agroalimentaire : le groupe Tiko.
Durant quelques années, Ravalomanana, a marié ses activités économiques avec la politique. Petit à petit, l’homme d’affaires s’est mué en un personnage-clé de l’échiquier politique et du secteur économique du pays, selon des observateurs.
C’est d’ailleurs par le biais de ses réseaux de distribution qu’il s’est lancé à la conquête de la mairie d’Antananarivo en 1999, puis qu’il a convoité la magistrature suprême en 2002.
Un troisième pilier s’ajoute à l’une des clés de son ascension politique fulgurante: la religion. Celui qui a été réélu en 2012 au poste de vice-président de l’Eglise protestante réformée de Madagascar, (FJKM) ne cache pas sa foi et son engagement religieux dans un pays considéré comme pieux.
Qualifié de perfectionniste et de pragmatique par ceux qui l’ont côtoyé, l’ex-président a souvent fait appel à des spécialistes pour le former sur un sujet précis. La présence de conseillers étrangers à ses côtés en est d’ailleurs l’illustration la plus notoire.
Au cours de ses deux mandats présidentiels, Ravalomanana a prouvé sa suprématie, en éliminant un à un ses adversaires politiques au point d’ériger une direction étatique monolithique et omnipotente.
Sa réélection à la tête de l’Etat dès le premier tour de la présidentielle de 2006, par un score de 54,79% a d’ailleurs confirmé un règne sans partage.
Au cours de ses mandats, Ravalomanana, fasciné par la pratique anglo-saxonne, a essayé d’engager des réformes dans plusieurs domaines dans le but de mettre le pays sur les rails du « développement rapide et durable », selon son crédo.
L’ancien président a donc élaboré le Madagascar action plan (MAP), un plan quinquennal renfermant les engagements et les défis à relever pour réduire la pauvreté mais semble avoir eu du mal à tenir ses promesses, selon certains économistes.
Mais si l’ancien chef d’Etat est brillant en affaires, il perd néanmoins peu à peu son souffle dans le domaine politique.
L’absence de frontières nettes entre la politique, les affaires personnelles et la religion ont certes, constitué l’une des caractéristiques du régime Ravalomanana, mais aussi sa chute.
Les opérateurs économiques, brimés par ce président « businessman », ont dû faire face à une concurrence avec les entreprises présidentielles bénéficiant des avantages des puissances publiques.
Très vite, l’enfant prodige attise les rancœurs, notamment accusé par ses détracteurs de brader la terre malgache à travers de grands projets miniers.
Le Fonds monétaire international (FMI) rompt même les relations avec Madagascar à la suite de l'achat d'un Boeing aménagé pour la Présidence de la République, suspectant un conflit d'intérêt dans les hautes sphères du pouvoir.
En décembre 2007, l’ancien président malgache voit le candidat de son parti à la mairie d'Antananarivo où il a pourtant été maire entre 1999 et 2001, s’incliner face au jeune indépendant Andry Rajoelina (qui dirigera le pays jusqu’en 2014), premier signe d’un désamour.
2008 révèle les faiblesses de la gouvernance de Ravalomanana, à qui on reproche d’être trop autoritaire, de monopoliser l’économie dans certains secteurs et de verrouiller des institutions politiques.
En 2009, un important mouvement de rue force, celui qui fut un jour laitier, à quitter le pays dans la précipitation, pour éviter un bain de sang devant le palais présidentiel. C'est le début de cinq années d'exil.
Si aucune raison officielle n'a été avancée pour expliquer son retour, l'ancien président malgache promet toutefois qu'il est là « non pas pour semer le trouble, mais pour apporter la paix » .
Cependant, pour certains observateurs, cette venue « vise à déstabiliser un régime déjà mis à l'épreuve par des tensions sociales ».
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