Politique

Le nouveau Premier ministre libyen: Pour un grand partenariat avec la Turquie alliée (entretien)

- Abdelhamid Dbiba a déclaré dans un entretien avec l'Agence Anadolu : « Nous formerons un gouvernement de technocrates, et tous ceux qui auront prouvé leur efficacité, leur sérieux et leur performance, feront partie de l'équipe gouvernementale ».

Mounir Bennour  | 07.02.2021 - Mıse À Jour : 08.02.2021
Le nouveau Premier ministre libyen: Pour un grand partenariat avec la Turquie alliée (entretien)

Tunis

AA/Tripoli/Mücahit Aydemir

Abdelhamid Dbiba a déclaré dans une interview à l'Agence Anadolu :

- « Nous formerons un gouvernement de technocrates, et tous ceux qui auront prouvé leur efficacité, leur sérieux et leur performance feront partie de l'équipe gouvernementale ».

- « Le gouvernement sera formé en trois semaines, après quoi il sera soumis au Parlement libyen pour un vote de confiance ».

- « Les priorités du gouvernement seront de lancer la vaccination contre le coronavirus, de résoudre les difficultés quotidiennes des citoyens, élaborer une nouvelle constitution et former des comités de réconciliation ».

- « Nous espérons renforcer le partenariat avec la Turquie et accroître le volume des échanges commerciaux aux plus hauts niveaux ».

- « Nous sommes dans une phase difficile pour instaurer la paix en Libye, et les deux parties en conflit doivent faire des concessions ».

- « Quiconque dont la culpabilité a été prouvée devra faire face à la justice ».


Le nouveau Premier ministre libyen, Abdelhamid Mohamed Dbiba, a déclaré que son gouvernement sera le partenaire de la Turquie, qu'il a qualifiée d'« amie et alliée ».

C'est ce qui ressort d'une interview qu'il a accordé à l'Agence Anadolu, la première du genre à être effectuée avec un média non-libyen, après avoir assumé le poste de Premier ministre. Au cours de l'entretien, le responsable libyen a évalué les relations turco-libyennes et les priorités de son gouvernement dans l'étape à venir.

Suite au vote des membres du Forum de dialogue libyen sous l'égide de l'ONU à Genève, qui a eu lieu vendredi, la liste des candidats ayant remporté les suffrages comprenait Dbiba en tant que Premier ministre, Mohammad Younes el-Menfi, comme président du Conseil présidentiel, aux côtés de Moussa Al-Koni et Abdallah Hussein Al-Lafi, en tant que membres du conseil.

Dbiba a expliqué que son gouvernement s'efforcera d'instaurer la paix entre les parties belligérantes dans le pays, et de résoudre les problèmes majeurs auxquels la Libye est confrontée.

Et d'ajouter que le Forum de dialogue politique libyen (qui compte 74 membres) a été formé pour représenter toutes les régions de la Libye, et qu'il reflète toute la géographie, les tribus et les catégories sociales du peuple libyen.

Le Premier ministre a souligné que les membres du Forum ont pris une décision importante en faveur de la Libye et de son peuple, et qu'elle engage un changement pacifique, démocratique et libre dans le pays.

Abdelhamid Dbiba a d'ailleurs souligné que le monde entier a été témoin de cet événement, par le biais des médias audiovisuels (les élections qui ont eu lieu à Genève et ayant abouti à la victoire de la liste de Dbiba), et qu'il a reçu la délégation du dialogue à l'aéroport international de Mitiga (dans la capitale, Tripoli), pour leur rendre les honneurs.

Il a aussi ajouté : « La délégation est satisfaite des résultats obtenus, alors que je ne connais que très peu de ses membres ».


* La formation d'un gouvernement dans les trois semaines.


Dbiba a révélé que dans le cadre des décisions prises par les membres du Forum de dialogue politique, le gouvernement sera formé dans les trois semaines à venir, suite à quoi il sera soumis au Parlement libyen pour un vote de confiance.

En réponse à une question sur la possibilité de nommer des personnalités du gouvernement précédent, le Premier ministre a déclaré : « C'est possible, car nous formerons un gouvernement de technocrates, et tous ceux qui auront prouvé leur efficacité, leur sérieux et leur performance feront partie de l'équipe gouvernementale ».

Et d'ajouter : « Il y aura une représentation équitable du peuple libyen avec toutes ses communautés et régions. Mais l'accent sera mis sur les objectifs technocratiques ».


* Le coronavirus, la constitution et la réconciliation : les priorités du gouvernement.


En réponse à une question sur les priorités de son gouvernement, Dbiba a déclaré : « Les priorités du gouvernement concernent en premier lieu de réfléchir à des solutions contre l'épidémie du coronavirus, car c'est une chose très importante pour le peuple libyen, et nous nous efforçons, autant que nous le pouvons, d'obtenir le vaccin et pour l'administrer à nos concitoyens ».

Et de poursuivre : « Ensuite nous accorderons notre attention aux difficultés de la vie quotidienne, telles que les coupures d'électricité, la santé, puis nous réfléchirons aux comités de réconciliation et à l'idée d'élaborer une constitution avec la participation du Conseil de la présidence ».

Dbiba a insisté sur l'importance d'instaurer la paix sociale pour résoudre la crise libyenne, en déclarant : « Nous formerons des comités internes de réconciliation inter-libyenne pour nous réconcilier avec le peuple, les tribus et les communautés rivales et belligérantes ».

« Ces catégories sociales vont se réunir et nous préparerons un budget de compensation, pour concrétiser un rapprochement inter-libyen au cours de cette année. Nous œuvrerons aussi pour rapprocher au mieux les points de vue libyens afin de pouvoir participer aux élections de manière unifiée, sans violence, ni conflits, ni tensions entre les villes », a-t-il ajouté.

Et de déclarer : « Nous visiterons toutes les villes de la Libye tant que faire se peut, et le Gouvernement d'unité nationale sera un véritable gouvernement libyen et porte-voix de cette unité ».


* Les relations avec la région de l'Est.


Lors de son entretien avec l’Agence Anadolu, Dbiba a réagi à la déclaration d’Abdallah al-Thani, qui dirige ce que l'on appelle le gouvernement de l’Est, non reconnu à l'échelle internationale, concernant l'attente de l’approbation par le parlement en place du nouveau gouvernement.

À cet égard, Dbiba a déclaré : « Notre gouvernement doit obtenir la confiance du Parlement de Tobrouk, et Al-Thani a promis et a annoncé qu'il attendait l'approbation de ce gouvernement. Je pense que c'est une question logique, d'autant plus que le Parlement s'est félicité des résultats du dialogue politique ».

Le Premier ministre a expliqué à ce propos : « Le choix demeure celui du peuple libyen, qui s'est félicité de ce gouvernement, et je pense que le Parlement est une composante et une partie intégrante du peuple libyen, et qu'il ne choisira pas une voie autre que celle du peuple ».

Le gouvernement dirigé par al-Thani, qui ne bénéficie pas d'une reconnaissance internationale et qui est fidèle au général putschiste Khalifa Haftar, dans l'est de la Libye, a posé l'approbation du Parlement de Tobrouk comme condition sine qua non, pour le transfert de ses fonctions à la nouvelle autorité exécutive intérimaire.


* Les relations avec la Turquie.


Concernant les relations de son pays avec la Turquie dans cette nouvelle phase, Dbiba a souligné qu'il est en faveur d'un grand partenariat entre les deux pays.

Le Premier ministre a déclaré à cet effet : « Nous bénéficions d'une grande solidarité de l’État et du peuple turcs. La Turquie est un allié, un ami et un frère, et elle a de nombreuses capacités aptes à aider les Libyens pour atteindre leurs vrais objectifs. La Turquie est l'un de nos vrais partenaires ».

Concernant son évaluation des relations commerciales entre la Libye et la Turquie, notamment au regard de son passé d’homme d’affaires, Dbiba a fait observer que : « La Turquie a imposé son statut et sa présence dans le monde, non pas seulement en Libye, et c'est le seul pays où les Libyens ont pu se rendre librement durant la guerre ».

Et d'expliquer, « La Turquie a ouvert ses aéroports et n'a pas fermé son ambassade à Tripoli, et je pense que la liberté de circulation se traduira par une coopération entre les deux peuples dans le domaine économique. Nous espérons développer cette coopération et accroître le volume des échanges commerciaux aux plus hauts niveaux ».


* Juger les auteurs de crimes de guerre.


Dbiba a également abordé la question de la responsabilité des auteurs de crimes de guerre en Libye, en déclarant dans ce sens : « En ce qui concerne les crimes commis, la justice suivra son cours, mais nous sommes dans une phase difficile d'instauration de la paix en Libye, et des concessions doivent être faites des deux côtés pour trouver un terrain d'entente commun à même de servir l'intérêt libyen ».

Et d'ajouter : « Nous ne pouvons pas nous permettre un durcissement de part et d'autre dans nos positions, nous voulons une véritable réconciliation entre toutes les parties libyennes et si la culpabilité de quiconque est prouvée, alors il devra faire face à la justice ».


* Qui est Abdelhamid Dbiba ?


Dbiba est né en 1958 dans la ville de Misrata (située à 200 km à l'est de Tripoli) considérée comme le bastion de la révolution libyenne. Il est soutenu par des tribus de l'ouest du pays.

Pendant les années de guerre, Dbiba était surtout connu pour son parcours dans le domaine du commerce en tant qu'homme d'affaires. La rue libyenne n'a eu connaissance de son identité politique que lorsqu'il a assumé le poste de Premier ministre dans le nouveau gouvernement.

Dbiba, qui dirige depuis 2006 la « Libyan Investment and Development Company », considérée comme l'une des plus grandes entreprises de construction en Libye, est également le président du club de Football libyen, Al Ittihad.

Il a achevé ses études universitaires et ses études de troisième cycle en génie civil au Canada. Ses proches lui ont donné le surnom de « l'ingénieur ». Ses enfants auraient la citoyenneté canadienne.

Le vote des membres du Forum de dialogue libyen, sous l'égide des Nations unies à Genève, qui a eu lieu vendredi, a abouti à la victoire de la liste de Dbiba, qui a remporté le suffrage face à la liste de Aguila Salah.

La candidature de l'allié du général putschiste Khalifa Haftar, en tant que président du Conseil présidentiel, n’a pas réussi à obtenir la confiance des membres du Conseil.

La liste gagnante dirigera temporairement les affaires du pays, jusqu'à la tenue des élections présidentielles et parlementaires prévues pour le 24 décembre 2021.


*Traduit de l'arabe par Mounir Bennour.

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