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"I refuse", le choix des jeunes druzes israéliens contre le service militaire

Une organisation de jeunes druzes appelée « Refuse, your people will protect you », créée en mars 2014, offre une aide légale et un soutien psychologique aux jeunes qui refusent le service militaire.

25.09.2014 - Mıse À Jour : 25.09.2014
"I refuse", le choix des jeunes druzes israéliens contre le service militaire

AA/ Haïfa (Jérusalem)/Julie Couzinet

« Refuse, your people will protect you » (Refuse, ton peuple te protègera) : bien plus qu'un mot d'ordre, "Refuse" se veut un rempart contre le service militaire israélien.

Crée en mars 2014 par de jeunes druzes israéliens qui se considèrent comme appartenant intégralement au peuple palestinien, le mouvement offre une aide légale et un soutien psychologique à quiconque refuse d'entrer dans les rangs de l'Etat hébreu.

Ces dernières semaines, les jeunes engagés organisent des opérations de sensibilisation au sein de leur communauté druze de nationalité israélienne (par opposition à la population druze syrienne des territoires occupés du Golan ne disposant pour la plupart que d’un permis de résidence en Israël) qui rassemble près de 100 000 membres. 

L'organisation, qui a pour objectif premier de rassembler les Palestiniens et de réintégrer la communauté druze en leur sein, rassemble aujourd’hui une soixantaine de volontaires en Israël et Cisjordanie et a été contactée par près de 40 jeunes souhaitant échapper au service ou à la réserve, a révélé à Anadolu l'un de ses fondateurs. 

Si le service militaire israélien ouvre supposément la porte à des aides aux études et à l’emploi,  la population druze reste, dans une large mesure, marginalisée, reproche l'un des jeunes de la communauté.

La plupart des militaires druzes servent uniquement dans des unités d’infanterie, la plus célèbre étant à la frontière libanaise, ce qui facilite peu leur intégration sur le marché du travail. 

« I refuse » essaye actuellement de leur ouvrir les portes des universités étrangères : « Nous essayons d’obtenir des bourses pour les refuzniks – terme désignant les jeunes refusant de servir dans l’armée –. Juste pour dire que si nous refusons le service militaire, ce n’est pas la fin du monde. On peut vivre, étudier, travailler comme tout le monde, » explique Maisan Hamdan, une palestinienne druse de 23 ans et l’une des fondatrices du mouvement.

La plupart des jeunes « refuzniks »  ne refusent pas ouvertement de s'engager pour raisons politiques car s'ils exprimaient ce refus, ils iraient en prison. En revanche, beaucoup se font volontairement rejeter lors des tests d’aptitude mentale à l’entrée du service, rejet catégorisé sous le terme « Profil 21 », explique un autre membre du mouvement, sous le couvert de l'anonymat.

En décembre 2013 et en juin 2014 deux jeunes hommes, Owar Saif et Omar Sa’ad ont été condamnés à 20 jours de prison, renouvelables en cas de refus de servir, jusqu'à ce qu’une exemption soit prononcée, précise la même source.

Outre la pression de l'armée israélienne, les membres du mouvement font également face à une forte opposition au sein même de la communauté druse.

« Pour beaucoup, cela ne semble pas normal de refuser le service militaire et de nous considérer comme Palestiniens au sein de notre communauté et au sein d’Israël » explique Maisan Hamdan.

« Nous sommes dans une communauté religieuse où les leaders religieux ont le pouvoir, les gens ont peur de dire en public qu’ils sont contre la politique d’Israël ou du leadership druse.  Un jeune a été battu dans son village simplement parce qu’il avait refusé publiquement de s'engager dans l'armée et un autre a été viré de la maison par ses parents pour la même raison », précise-t-elle.

« C’est dur de retourner au village et de ne pas trouver de gens avec qui parler, de se sentir rejeté et marginalisé », raconte Samer Asakli, membre du mouvement et "refuznik", sous "Profil 21".

« Depuis que j’ai rejoint le mouvement [I refuse], la communauté fait pression sur moi pour que je le quitte. Les gens ne me parlent pas, parce que je ne rentre pas dans le moule. Mais j’essaye de leur parler, je veux les sensibiliser et leur faire changer d'avis. Je veux leur montrer que je ne travaille pas contre eux mais pour eux », informe-t-il.

Maisan et Samer travaillent actuellement à l’organisation d’un soutien psychologique à destination des jeunes refuzniks ayant déjà servi puis quitté l'armée ou ayant refusé dès le début. L’organisation fait ainsi aujourd’hui appel à des psychologues volontaires afin d’organiser un soutien de groupe et individuel.

Non sans humour, Maisan avoue avoir elle-même besoin d'un soutien psychologique : « Je reçois plein d’appels sur mon portable, mes parents aussi sur le téléphone de la maison, sur leurs portables, qui ont pour objectif de me dissuader de ce combat", annonce la jeune fille qui promet dans le même temps qu'elle continuera quoiqu'il arrive.

Si plusieurs jeunes druzes rêvent d'échapper au service militaire, d'autres au contraire, sont fiers de faire partie de l'armée israélienne. 

Ainsi, le 10 septembre dernier, des représentants religieux druses ont été invités à visiter la base navale d'Haifa "pour renforcer le développement des liens de communauté entre les forces navales israéliennes et la société druse", avaient informé les forces armées israéliennes dans un communiqué dont Anadolu a reçu copie. 

 « La population druse israélienne est connue pour son implication spéciale dans les Forces de défense israéliennes », soulignait le même texte.

 L'un des invités, Major Tamir Awad, officier druse, avait d'ailleurs déclaré après la cérémonie: "Servir et protéger l'Etat israélien est notre obligation."

 
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