Politique

France / Islamophobie : Marion Maréchal Le Pen s'en prend à la construction de la grande mosquée de Strasbourg

- L'euro-députée a publié sur les réseaux sociaux une vidéo alimentant à nouveau le débat sur la place de l’islam, la laïcité et la liberté de culte dans un contexte déjà marqué par une hausse des actes islamophobes en France

Şeyma Erkul Dayanç  | 01.12.2025 - Mıse À Jour : 01.12.2025
France / Islamophobie : Marion Maréchal Le Pen s'en prend à la construction de la grande mosquée de Strasbourg

Istanbul

AA / Istanbul / Seyma Erkul Dayanc

Marion Maréchal Le Pen a diffusé dimanche soir une vidéo polémique dans laquelle elle appelle les électeurs à utiliser leurs bulletins de vote comme « une arme » politique aux prochaines élections municipales pour « faire barrage » aux élus qu’elle accuse de « complaisance » avec de prétendus « islamistes ».

Filmée devant le chantier de la grande mosquée de Strasbourg, toujours en construction, la députée européenne d’extrême-droite a ouvertement ciblé les collectivités territoriales ayant soutenu le chantier, amalgamant musulmans et association musulmanes à de « l’islamisme ».

Dans sa vidéo, la petite-fille de Jean-Marie Le Pen présente le bulletin de vote comme une arme politique et appelle à la mobilisation.

« Vendre notre pays aux islamistes est la pire des corruptions. Les coupables doivent être dégagés de toute fonction politique », déclare-t-elle, invitant les citoyens à « faire barrage » aux élus qu’elle désigne.

Alors que les discours politiques ciblant les musulmans se multiplient, les actes islamophobes continuent de proliférer.

La stigmatisation répétée des communautés musulmanes et les accusations qui les visent peuvent en effet inciter certains individus à passer à l’action.

Les chiffres du ministère de l’Intérieur  montre par exemple qu’entre janvier et mai 2025, 145 actes antimusulmans ont été recensés, contre 83 sur la même période en 2024, soit une hausse de 75 %, tandis que le nombre d’atteintes aux personnes a triplé, passant de 32 à 99 (les chiffres du ministère ne comptabilisent que les actes ayant fait l’objet d’une plainte auprès des autorités, et mentionnent un chiffre sous-évalué).

Selon le Collectif contre l’islamophobie en Europe (CCIE), certains discours politiques et publics visant les musulmans peuvent contribuer à entretenir un climat délétère, fragiliser la cohésion nationale et alimenter la peur de l’islam dans le débat public.

L’organisation note que ce contexte s’accompagne d’une hausse des actes de haine et de profanations ciblant les musulmans.

Les tensions sont particulièrement vives depuis plusieurs mois avec un dernier incident intervenu ce dimanche 30 novembre à la mosquée Ar-Rahma du Puy-en-Velay (Haute-Loire), où le Coran à été profané.

Selon le média local L’Éveil de la Haute-Loire, un ou plusieurs individus se sont introduits dans le lieu de culte en milieu d’après-midi, renversant du mobilier, des bibliothèques et plusieurs exemplaires du Coran. Aucun fidèle n’a été blessé, mais les faits sont qualifiés de « sensibles » en raison du caractère religieux de l’établissement. Une enquête a été ouverte et la police scientifique s’est rendue sur place pour procéder aux relevés d’usage. Le préfet de la Haute-Loire, Yvan Cordier, a assuré au président de l’association gestionnaire de la mosquée « la pleine mobilisation des forces de l’ordre ».

Plus largement, les organisations de suivi rapportent une intensification durable des actes visant les musulmans en France. Le CCIE a recensé 1 037 actes islamophobes pour l’année 2024, soit une hausse de 25 % par rapport à 2023. Parmi ces faits figurent des agressions, des profanations, des menaces ou des inscriptions injurieuses visant des personnes, des lieux de culte ou des symboles musulmans.

Le ministère de l’Intérieur a pour sa part signalé 242 actes anti-musulmans pour l’année 2023, contre 121 en 2022. Le CCIE estime que le phénomène revêt un caractère « structurel » et met en garde contre sa banalisation dans l’espace public et politique.

Le 16 septembre 2025, une enquête de l’institut Ifop commandée par la Grande Mosquée de Paris révélait que 66 % des musulmans interrogés déclaraient avoir subi des comportements racistes au cours des cinq dernières années.

Proposition de loi sur le port du voile aux mineures

Une proposition de loi visant à interdire le port du voile par les mineures dans l’espace public a été déposée à l’Assemblée nationale par le président du groupe Droite républicaine, Laurent Wauquiez. Le texte entend compléter la législation existante en ciblant les parents qui « contraignent ou autorisent » leurs filles mineures à dissimuler leur chevelure, dans un contexte politique marqué par de vifs débats autour de l’islam et de la laïcité.

Le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez s'est dit dimanche sur BFMTV “pas favorable” à l'interdiction du port du voile aux mineures dans l'espace public, une mesure défendue par le chef des députés LR Laurent Wauquiez. Cette proposition “est très stigmatisante vis-à-vis de nos compatriotes musulmans qui peuvent se sentir blessés”, a affirmé le ministre. “Je n'y suis pas favorable comme ça” », a-t-il ajouté.

La Grande Mosquée de Paris dénonce le rapport sénatorial

Dans un communiqué publié récemment, la Grande Mosquée de Paris a dénoncé le rapport émis par un groupe de sénateurs censé lutter contre l’« entrisme islamiste ». Selon l’institution, ce document « porte atteinte aux libertés fondamentales et stigmatise une communauté de foi tout entière ». La mosquée souligne que certaines propositions du rapport, telles que l’interdiction du port du voile aux accompagnatrices scolaires ou la limitation du jeûne du Ramadan aux mineurs de moins de 16 ans, visent en réalité les fidèles ordinaires plutôt que les extrémistes.

Le communiqué ajoute : « L’application des mesures proposées supposerait l’instauration d’une véritable police des mœurs musulmanes, intrusive et inégalitaire. […] Plus grave encore, ce rapport confond religion et idéologie, foi et radicalisme. Il stigmatise d’avance des familles, des quartiers, des mosquées, sans distinguer les croyants pacifiques des extrémistes. Il choisit un coupable idéal : l’islam. Une telle démarche menace la cohésion sociale, encourage l’exclusion et cultive la défiance. »

La Grande Mosquée de Paris appelle enfin à « défendre la laïcité qui protège toutes les religions, garantir la liberté de conscience et de culte, et promouvoir des politiques d’inclusion, de dialogue et de respect ».

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