
Tunis
AA/Tunis
En 2024, 16 000 étrangers sont passés en centres de rétention, dont une majorité de Maghrébins, selon un rapport de La Cimade (association de défense des droits des étrangers) relayé par des médias français.
La Cimade estime dans son dernier rapport que la France a recouru massivement aux placements en centres de rétention (CRA) pour tenter d’éloigner les étrangers en situation irrégulière. Parmi eux, une majorité d’Algériens, de Tunisiens et de Marocains, rapporte le site Infomigrants.
Une méthode inefficace juge la Cimade : 60 % des personnes en CRA finissent par être libérées, précise le même média.
Non seulement les expulsions au terme de cet enfermement restent faibles mais surtout le placement en rétention "augmente les tensions entre les personnes retenues, ainsi que leur angoisse et leur détresse, notamment concernant les personnes particulièrement vulnérables, souffrant de maladies graves ou de troubles psychiatriques", souligne le rapport.
Au total, 16 228 personnes ont été enfermées dans ces lieux de privation de liberté en France hexagonale, un chiffre peu ou proue similaire à celui de 2023. "Cela représente une baisse de près de 5 % par rapport à l’année précédente", note l'association. Ce nombre grimpe à 40 000 si l’on inclut les étrangers enfermés en CRA à Mayotte (22 300 en 2024) et dans les Outre-mer (Guadeloupe, Réunion, Guyane…)
En ce qui concerne l’Hexagone, La Cimade rappelle que l’écrasante majorité des retenus sont maghrébins, ils constituent le trio de tête des nationalités : un peu plus de 5 000 Algériens, 1 900 Tunisiens et 1 700 Marocains sont passés par des CRA en 2024. Des chiffres loin devant les autres nationalités : 700 Roumains, 450 Albanais, 350 Guinéens, 300 Afghans ou encore 300 Ivoiriens, rapporte encore Infomigrants.
Pourtant, selon le droit français - et européen - l’enfermement d’un étranger en CRA est une mesure qui ne doit être utilisée qu’en dernier recours, "dans les cas où l’administration n’a pas d’autres moyens moins attentatoires aux libertés pour réaliser l’expulsion", rappelle l’association.
Dans les faits, donc, il n’en est rien. L’immense majorité des retenus en France ont été placés en rétention suite à la réception d'une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) non respectée. Un peu plus de 128 000 ont été émises l'année dernière, seules 11 % ont été exécutées.
Outre le recours à cette mesure souvent injustifiée, l'association pointe l'augmentation de la durée moyenne de rétention qui s’établissait à près de 33 jours en 2024, soit 5 jours de plus par rapport à 2023.
"Nos associations constatent quotidiennement l'impact de périodes d'enfermement de plus en plus longues sur la santé mentale et physique des personnes enfermées et sur le niveau de tension dans les CRA. Gestes désespérés, tentatives de suicide, actes d'automutilation, violences [...]". Le gouvernement actuel souhaite pourtant allonger la durée de rétention à 210 jours - contre 90 aujourd’hui. Le 18 mars 2025, le Sénat a adopté en première lecture cette proposition de loi, précise infomigrants.
La Cimade insiste enfin sur la présence des mineurs en CRA. La loi asile et immigration du 26 janvier 2024 a acté la fin de l’enfermement des enfants dans les centres de rétention administrative.
Une mesure plutôt respectée à l'exception des préfectures du Bas-Rhin et du Doubs qui ont ordonné le placement en CRA de six enfants et trois familles, selon l’association. "[Ces] préfectures ont profité des quelques semaines du mois de janvier précédant l’entrée en vigueur de la loi pour placer au CRA de Metz-Queuleu trois familles, accompagnées de six enfants. Le plus âgé d’entre eux avait 7 ans, deux étaient des nourrissons", écrit La Cimade.
Cette interdiction du placement des enfants en rétention ne s’appliquera à Mayotte qu'à partir du 1er janvier 2027. "Ce décalage dans le temps vide de son sens la mesure puisque c’est dans ce territoire ultramarin que la majorité des familles avec enfants sont enfermées ; en moyenne ce sont 40 fois plus d’enfants qui y sont privés de liberté par rapport au reste des centres de rétention", souligne encore la Cimade.
Au total, la France a été condamnée à onze reprises par la CEDH pour l’enfermement d’enfants en centre de rétention, rappelle Infomigrants.