Politique

Dirigeant à Nidaa: L’absence de consensus sur "Carthage II" place le pays sur la voie de l’inconnu

L’Agence Anadolu a recueilli les propos de Borhène Bsaies, chargé des affaires politiques au mouvement.

Adil Essabiti  | 31.05.2018 - Mıse À Jour : 31.05.2018
Dirigeant à Nidaa: L’absence de consensus sur "Carthage II" place le pays sur la voie de l’inconnu

Tunis

AA / Tunis / Adel Thebti

Le chargé des affaires politiques dans le Mouvement Nidaa Tounes (Appel de la Tunisie), Borhène Bsaies a souligné que l’absence de consensus entre les parties participantes aux débats sur le Document de Carthage II fait planer sur la Tunisie le spectre d’une « crise politique qui menace son avenir ».

Dans une interview accordée à Anadolu, Bsaies a indiqué que « la nature de la crise politique actuelle est d’une gravité et d’une profondeur telles qu’elle ne peut pas être contenue par les calculs des manœuvres politiques classiques », ajoutant : « l’avenir de la Tunisie est en danger ».

Lundi dernier, le président Béji Caid Essebsi a décidé de suspendre, sine die, le Document de Carthage pour déterminer les priorités du gouvernement, sur fond de la poursuite des différends des signatures au sujet d’un remaniement, partiel ou total du gouvernement.

Grave crise politique

« L’image est des plus claires. Pendant sept ans, les réalisations sociales et économiques étaient négatives, ce qui compensait un tant soit peu la balance c’était le succès du consensus politique et social qui a sauvé la Tunisie dans ses étapes charnières et nous nous remémorons dans ce cadre l’expérience du dialogue national (automne 2013 », a-t-il lancé.

« Ce qui se passe aujourd’hui n’est qu’une accélération vers l’effondrement », a ajouté Bsaies.

« La question est loin des calculs superficiels, partir ou pas au parlement (pour la motion de censure du Chef du gouvernement Youcef Chahed), dès lors que l’ensemble du processus est désormais menacé, tout particulièrement à la lumière du laxisme de certaines parties politiques compte tenu de la gravité de la crise actuelle, et parmi ces parties nous trouvons le mouvement Ennahdha (68 députés sur un total de 217) », a encore estimé Borhène Bsaies.

Ennahdha responsable

S’agissant de la déclaration d’Ennahdha qui opte désormais pour le maintien de Chahed en vue de servir « l’intérêt national et la préservation de la stabilité et de l’image de la Tunisie à l’étranger », Bsaies a rétorqué « La politique, ce sont des résultats et non pas l’expression d’intentions ».

« Le résultat est que la position d’Ennahdha a semé la zizanie parmi les partis et les organisations et a poignardé dans le dos aussi bien le consensus politique que social », a-t-il poursuivi.

Bsaies a nié le fait que la position d’Ennadha est motivée par la préservation de la stabilité, lançant à ce propos «Le consensus s’effondrera et l’Union (Union générale tunisienne de travail UGTT, Syndicat) menace d’investir la rue ».

Bsaies a expliqué la position d’Ennahdha par « un changement de stratégies pour des calculs inconnus mais inhérents à ses coulisses internes ».
Chahed ne gouverne pas au nom de Nidaa Tounes

Dans un commentaire concernant Youcef Chahed, l’actuel Chef de gouvernement, est un des dirigeants de Nidaa Tounes, Bsaies a estimé que « le Chef de gouvernement préside un gouvernement d’Union nationale et a obtenu l’investiture des partis participants (Document Carthage I) et n’a pas gouverné au nom de Nidaa Tounes ».

Et Bsaies de poursuivre : « En plus, il (Chahed) a gouverné au nom du Document de Carthage et cela est connu par tous et c’est ce que nous répétions constamment. Nidaa Tounes faisait partie du pouvoir mais n’était pas un parti au pourvoir ».

Bsaies a exclu que la crise revêt des dimensions personnelles qui cible le Chef du gouvernement, lançant à ce sujet : « Nous considérons que le gouvernement d’Union nationale est un gouvernement qui a échoué ».

« Ces derniers jours, le gouvernement a ajouté à son palmarès d’échec social et économique un échec politique qui a abouti à la scission entre les partis et une panne quasi complète du rendement gouvernemental ainsi qu’un effondrement du consensus politique et social », a-t-il encore relevé.
Chahed est en droit de se porter candidat en 2019 mais n’est pas le candidat de Nidaa Tounes

Au sujet des informations qui font état selon certains observateurs que le conflit actuel est sur fond d’un positionnement en prévision de la prochaine Présidentielle de 2019, Bsaies a estimé que « la question est plus approfondie que cela et tout un chacun a le droit de se porter candidat aux élections de 2019 et nous avons été clairs ».

« Lorsque nous avons discuté du point numéro 64 (du pacte de Carthage II) concernant le prochain gouvernement dont les membres ne doivent pas se porter candidats, nous ne visions pas la personne de Monsieur Chahed parce que tout simplement nous ne considérons pas Monsieur Chahed comme étant l’homme de l’étape dans le prochain gouvernement », a-t-il explicité.

Bsaies a estimé que Chahed a « le droit de se présenter mais pas celui d’utiliser le pouvoir exécutif ».

« Il n’est pas possible de transformer le gouvernement en un parti. L’ancien Premier ministre français (Manuel Valls), en voulant se porter candidat à l’élection présidentielle française, il a démissionné du gouvernement et n’a pas transformé le gouvernement en un parti », a-t-il encore poursuivi.

Bsaies a tenu à démenti le fait que Chahed serait le candidat de Nidaa Tounes pour les élections de 2019, relevant que ce point sera tranché par « le prochain congrès du parti ».

« La question est plus profonde que les élections de 2019, il s’agit d’une question de résultats et d’un bilan. Le pays est au bord de la banqueroute et les finances publiques sont sur le point de s’effondrer », a-t-il alerté.

Et Bsaies de conclure ce volet : « Le pays attend le décaissement de la troisième tranche du prêt du Fonds Monétaire International pour rembourser ses dettes et payer les fonctionnaires ».

L’intérêt de la Tunisie consiste au retour du consensus

Borhène Bsaies a poursuivi : « Nous nous engagerons dans l’année 2019, année d’élections, par quel bilan ? nous sommes face à une dangereuse crise politique, économique et sociale ».

Il a mis l’accent sur le fait que les « manœuvres politiques naives mènera le pays vers l’inconnu et l’inconnu en Tunisie est ouvert sur toutes les éventualités ».

« L’intérêt de la Tunisie consiste en un retour au consensus et que toutes les parties, organisations nationales et principaux partis, se mettent d’accord, et nous représentons une partie politique responsable qui ne s’inscrit pas dans la spirale de l’action et de la réaction », a-t-il insisté.

« Nous laisserons encore le temps aux consultations politiques avec toutes les parties pour sortir de cette crise et nous discuterons avec toutes les parties politiques, notamment, celles qui sont prêtes à le faire et à offrir des concessions loin de la logique des manœuvres », a encore relevé le chargé des affaires politiques de Nidaa Tounes.

Bsaies a conclu en estimant que « la véritable victoire consiste à la sortie du pays de sa crise politique », mettant en garde sur le fait que si le temple viendrait à s’effondrer, c’est tout le monde qui sera perdant.

Au mois de janvier dernier, Caid Essebsi avait appelé les parties signataires, en juillet 2016, du Document de Carthage, à se réunir pour discuter de la situation dans le pays.

En mars, les signataires ont mis sur place un comité d’experts en vue d’élaborer un nouveau Document. Le comité est composé de 18 membres et s’est penché sur la détermination de nouvelles priorités économiques et sociales du gouvernement.

Les travaux du comité des experts ont abouti à un accord autour de 63 points du Document de Carthage II portant sur le programme politique, économique et social de la prochaine étape. Il a été cependant rendu impossible de parvenir à un accord ou un consensus au sujet du sort du gouvernement de Youcef Chahed.

Participent à l’élaboration du Pacte de Carthage II le parti de Nidaa Tounes (libéral, 56 députés sur 2017), le mouvement Ennahha (68 députés, d’obédience islamique), l’Union Patriotique Libre (UPL, 12 députés, libéral), le parti de l’Initiative national (destourien) et le parti d’al-Massar social (gauche).

Y prennent part également quatre organisations, en l’occurrence, l’Union Générale Tunisienne de Travail (UGTT , Syndicat), l’Union Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (UTICA, Patronat), l’Union Tunisienne de l’Agriculture et de la Pêche (UTAP) et l’Union Nationale de la Femme Tunisienne (UNFT).

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