
AA/ Bujumbura/ Renovat Ndabashinze
"C’est dans la cour des rois et dans les résidences des notables et des chefs que l’Inanga était joué au Burundi avant l'avènement de la première république en 1966", raconte à Anadolu Joseph Torobeka, musicien de 65 ans, qui a commencé à jouer de cet instrument alors qu’il avait à peine 12 ans.
L’Inanga, célèbre instrument musical traditionnel qui s’apparente à la Cithare, serait originaire du Rwanda et se retrouve aussi bien au Burundi qu’au Congo.
"Cette cithare est composée d’une cavité de résonnance en bois sur laquelle est tendue une longue corde de tendon de vache et c'est la tension de cette corde qui détermine la qualité des sons" informe Bernard Kaziri, octogénaire originaire de Muramvya qui a, dit-il, beaucoup fréquenté la cour royale au début du siècle dernier.
Revenant sur l’histoire de cet instrument musical, Torobeka explique pour sa part que dans le passé, notamment lorsque l'inanga était joué dans la cour royal, le musicien devait avoir un accoutrement bien particulier et devait, par exemple, porter une couronne autour de la tête afin d’attirer l’attention des spectateurs.
"A l’époque un grand nombre de personnes affluait vers le palais royal pour voir le roi, lui demander des faveurs ou juste le remercier. Certains étaient obligé de patienter pendant des jours avant de voir le roi, on jouait alors de l’inanga pour distraire ces visiteurs et meubler leur veillée étant donné qu’il n’y avait pas de place pour que tous puissent dormir", explique encore J.Toroboka.
On jouait également de l'instrument pour accompagner le roi dans son sommeil et c'est ce qui explique, estiment les connaisseurs, que les paroles du chant étaient chuchotées.
"L’Inanga émet un son très agréable et qui, semble-t-il, plait, aussi, aux vaches fait qui explique que beaucoup de bergers qui gardaient le troupeau royal en jouaient", relève Joseph Torobeka.
Aujourd’hui, encore, l’Inanga continue à séduire les jeunes autant que leurs ainés sauf qu’il n’est plus l’apanage d’une certaine classe sociale, on en joue pour raconter des histoires comme pour célébrer des fêtes familiales et publiques.
"Mon grand-père jouait à l’Inanga et j’ai, moi aussi, bien envie d’apprendre à en jouer. Les chants murmurés au son de l’instrument racontent notre histoire et les exploits des grands chefs" déclare à Anadolu Etienne Sinzinkayo, 18 ans, né à proximité de Muramvya, ancienne capitale royale.
Il cite par exemple le récit de Maconco, gendre du roi Mwezi Gisabo (qui a régné entre 1850 et1908), relatant le conflit qui l’a opposé au roi pur une histoire de chien de chasse.
Etienne juge que l’histoire de Maconco racontée au son de l’Inanga devient, autrement, plus intéressante et facile à retenir notant que cet instrument "peut-être un moyen idéal pour apprendre l’histoire du pays et la rendre accessible aux plus jeunes".
Augustin Nimbona, élève au Collège Bukeye situé non loin de Muramvya, déclare à Anadolu qu’en écoutant les chants murmurés au son de la Cithare on se rend compte que les paroles portent des conseils de valeur.
Espérance Bukuru, collégienne de la même province se dit, quant à elle, fascinée par cet instrument et les chants qui l'accompagnent relevant que les paroles murmurées au son de l'Inanga racontent l’histoire du Burundi.
A l'occasion des fêtes publiques, l’Inanga est apprécié en silence ou accompagné de danses, précise Torobeka soulignant que "les paroles des chants murmurés s'inspirent de la vie quotidienne et des spécificités de l'époque".