Politique

Burkina Faso: Le colonel Gilbert Diendéré: le fidèle de Blaise, la voix de Compaoré (profil)

L'ex chef d'état-major particulier de l’ex-président Compaoré a été proclamé président du Conseil national pour la démocratie (CND), nouvelle instance dirigeante depuis le coup d'Etat

Esma Ben Said  | 17.09.2015 - Mıse À Jour : 17.09.2015
Burkina Faso: Le colonel Gilbert Diendéré: le fidèle de Blaise, la voix de Compaoré (profil)

Tunis

AA/Tunis/Esma Ben Said

 « Si Blaise est là, pourquoi pas mon mari? », aurait déclaré un jour, en réunion privée, Fatou, l’épouse de Gilbert Diendéré, ancien chef d'état-major particulier de l’ex-président Blaise Compaoré et nouvel homme fort du Burkina Faso, depuis l’annonce, jeudi, du coup d’Etat, par les fidèles de Compaoré.

Que cette sentence ait été véritablement prononcée, ou qu’elle ne soit que légende, il n’en est pas moins vrai que Diendéré, un militaire de carrière agé de 54 ans, avait tout pour être, un jour, dirigeant du Faso, même s’il préférait, jusque-là, agir dans l’ombre, selon ses partisans.

"Cela fait quelque temps déjà qu'il se préparait à ce grand jour. Depuis le départ de Compaoré en fait, et en accord avec celui-ci dont il a toujours été l'homme de confiance. Mais  il ne pouvait pas prendre le pouvoir au lendemain de l'insurrection populaire (octobre 2014), cela n'aurait jamais été accepté par le peuple, il fallait préparer le terrain... ", explique à Anadolu un militaire burkinabé, sous le couvert de l'anonymat.

Pour arriver au pouvoir, "le double de Blaise" n’a jamais cessé de fomenter des coups d’Etat, selon ses détracteurs.

Celui qui est aujourd’hui proclamé président du Conseil national pour la démocratie (CND),  la nouvelle instance dirigeante du pays, est présent dans la vie politique du Faso depuis pas moins de trente décennies durant lesquelles il a vu défiler une série de coups d'Etat auxquels il a participé, de près ou de loin.

Le premier remonte au 4 août 1983. Lorsque Thomas Sankara, "le père de la révolution", a pris le pouvoir, il était accompagné de trois officiers à savoir Blaise Compaoré, Jean-Baptiste Lingani et Henri Zongo.  Diendéré était lui aussi présent mais bien plus en retrait. A l'époque, il était l'un des principaux commandants de l'armée et celui qui a annoncé le coup d’Etat à la radio nationale « Peuple de Haute-Volta, le capitaine Thomas Sankara vous parle… ».

Quatre ans plus tard, le 15 octobre, un second coup d'Etat (le 5e en 54 ans d'indépendance) secoue le Faso. Diendéré est celui qui « supervise » l’arrestation de Sankara, qui tourne rapidement au bain de sang au siège du Conseil national de la révolution. Aujourd'hui encore, on ignore encore ce qui s'est véritablement passé ce 15 octobre, mais déjà, Diendéré est le fidèle bras droit de Compaoré qui prend le pouvoir. 

A 30 ans, le nouvel homme fort du pays est donc officiellement dans les bons papiers du président Compaoré. En effet, le 18 septembre 1989, il déjoue une tentative de coup d’État qui aurait été fomenté par ses vieux compagnons d'armes Lingani et Zongo. Selon la version officielle du général, Lingani lui aurait fait part de leur plan, Diendéré aurait alors informé Compaoré de ce qu'il l'attendait avant d'arrêter les complotistes. A la suite de cet évènement, Diendéré nommé secrétaire général du comité exécutif du Front populaire (parti au pouvoir) devient le numéro deux du régime. On le charge de la défense et de la sécurité du pays. 

Vingt six ans plus tard, Diendéré est resté fidèle à Compaoré et est devenu l'élément incontournable de la défense du pays. Il dirige les soldats d’élite, du pays, le Régiment de la sécurité présidentielle (RSP).  Pas moins de 1300 hommes, répartis en cinq groupes de commandos formés, très armés, et parés à toutes les situations sont sous ses ordres.

En réalité, encore aujourd'hui, "Diendéré n'est pas que le bras droit, il est la voix, le choix, de Compaoré ", poursuit la source. 

Un document diffusé le 15 novembre 2014,par "Africa Intelligence" le portail d'information sur l'Afrique indépendant et intitulé "Comment Diendéré a manœuvré en coulisses", confirme cette version. 

"C’est au cours d’une réunion de plusieurs heures au palais de Kossyam, dans la nuit du 29 au 30 octobre, que Blaise Compaoré a fait part, pour la première fois, de son intention de démissionner et de quitter le Burkina Faso. Durant la discussion, celui-ci, entouré d’un carré de fidèles collaborateurs, a évoqué son bilan et ses « actions pour les populations ». Toutefois, le spectre d’une répression des manifestants, comme en Côte d’Ivoire en 2011 durant la crise post-électorale, a conforté la nécessité d’un départ", révèle le document. 

" Lors de cette rencontre, le patron du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), Gilbert Diendéré, a été désigné pour pousser le scénario d’une transition, tout en restant l’intermédiaire direct du chef de l’Etat burkinabé. Dans les heures ayant suivi la démission de ce dernier, le 31 octobre, il est intervenu auprès du chef d’état-major des armées (CEMA), le général Honoré Nabéré Traoré, pour désapprouver l’annonce de ce dernier de s’autoproclamer nouveau chef de l’Etat", poursuit le texte.

"A défaut de pouvoir prendre personnellement le contrôle de la transition par crainte d’envenimer la situation, Gilbert Diendéré a demandé à son adjoint, le lieutenant-colonel Isaac Yacouba Zida de prendre attache auprès des appareils politiques et de la société civile afin d’entamer des négociations. Porté par l’adhésion de la foule, le n°2 du RSP s’est à son tour proclamé chef d’Etat, avec l’aval de son patron", assure encore le document. 

C'est ce même Colonel Zida, devenu premier ministre, qui a été pris en otage, avec le président de la transition Michel Kofando, depuis mercredi, par la garde présidentielle, mais qui sera relâché, dans la journée, a promis Gilbert Diendéré, via un communiqué, justifiant ce nouveau coup d'état de jeudi fait en étroite collaboration avec l'un des commandants du régiment présidentiel, Aziz Korogho,  par "une grave situation sécuritaire pré-électorale". 

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