À bord de la Sumud, un Franco-Marocain dénonce les souffrances des civils et demande la protection de la France
- « C'est bien beau de reconnaître l'État de Palestine, mais si on a un président qui veut œuvrer pour la paix, il devrait œuvrer aussi pour que l'œuvre humanitaire puisse arriver » déclare Mustapha Karmim à bord de la Flotille mondiale Sumud

Istanbul
AA / Istanbul / Şeyma Erkul Dayanç
Mustapha Karmim, un Franco-marocain et aide-soignant en réanimation en région parisienne, participe actuellement à la flottille en direction de Gaza. Joint à bord du navire Anas-el-Sharif, où il se tient aux côtés d’Alma Dufour et de Youssef Swatts, il s’est présenté comme « simple citoyen » ayant choisi de s’engager dans une initiative humanitaire.
Sa motivation principale est « de sauver des vies ». Il explique avoir pris la décision de rejoindre cette mission en réaction à ce qu’il décrit comme « un génocide qui dure depuis plus de deux ans », au cours duquel « des milliers de personnes, femmes, enfants, personnes âgées » périssent « sous les bombes, sans protection et sans aide de quelconque gouvernement ». Face à « l’inaction des gouvernements », il ajoute que « des citoyens ont pris leur courage à deux mains » pour tenter d’« ouvrir un couloir humanitaire » vers Gaza, a-t-il indiqué au correspondant d’Anadolu.
Karmim indique que son navire a fait face à des survols de drones. « Cette nuit, on a eu la présence de deux drones au-dessus de nos têtes », rapporte-t-il, précisant qu’en dehors de cet épisode, l’acheminement se poursuit « sans difficulté » et que « rien ne les empêchera d’avancer ».
La flottille comprend cette fois davantage de navires, ainsi que la présence accompagnatrice de navires militaires italiens et espagnols. Pour Karmim, cette protection supplémentaire constitue un atout. « Déjà, c'est une bonne chose qu'ils soient à nos côtés. Ça sécurise un petit peu notre flottille. On ne sait jamais ce qui peut se passer », explique-t-il. Il ajoute espérer que « d'autres pays se joindront à cette initiative pour mettre une pression supplémentaire sur le gouvernement israélien » et estime que la présence de ces navires augmente « les chances d’accéder » à Gaza.
Il mentionne également que d’autres bateaux doivent rejoindre l’expédition. « On se rapproche de plus en plus. On a quelques navires qui comptent nous rejoindre. Derrière, on a normalement le « Conscience » qui vient se rajouter à nous », précise-t-il, soulignant la coopération avec la Freedom Flotilla Coalition.
À l’égard des autorités françaises, Mustapha Karmim formule une demande explicite : « On aimerait être protégés, comme nos camarades belges ou italiens ou espagnols. On aimerait avoir une protection qui garantirait au moins notre sécurité. » Selon lui, la France doit aller au-delà de la reconnaissance de l’État de Palestine. « Si on a un président qui veut œuvrer pour la paix, il devrait œuvrer aussi pour que l’œuvre humanitaire puisse arriver », affirme-t-il, appelant Paris à « tout faire pour ramener ses citoyens en vie ». Il insiste : « Notre but n'est pas d'aller mourir là-bas, mais d'apporter simplement une aide humanitaire. »
Enfin, Karmim tient à adresser un message aux Palestiniens. « On a envie de leur dire qu'on arrive, on espère y arriver et on fera tout pour y arriver », déclare-t-il. Et d’ajouter : « S'ils arrêtent cette flotte, ce n'est pas grave, on en enverra d'autres, d'autres et encore d'autres, jusqu'à ce qu'on puisse briser enfin ce blocus. »
Il insiste sur le caractère non-violent de la mission : « On est pacifique, on est non-violent, on n'a rien d'autre à part de l'aide humanitaire, du matériel scolaire et de l'aide alimentaire. Notre objectif, c'est juste de transmettre ce qu'on a apporté et de refaire demi-tour. »
Il conclut que, selon lui, les volontaires n’aspirent qu’à « retourner chez eux, vivant, et revoir leurs familles » une fois leur mission accomplie.
- Flottille Sumud
La « Global Sumud Flotilla », coalition de plus de 50 navires civils partis des côtes de plusieurs pays méditerranéens, transporte environ 250 tonnes d’aide humanitaire à destination de Gaza. Ces dernières semaines, plusieurs de ses bateaux ont été la cible d’attaques par drones en Méditerranée orientale, non revendiquées mais imputées à Israël par les organisateurs.
L’Italie et l’Espagne ont déployé des navires militaires pour protéger leurs ressortissants. Des experts de l’ONU ont exprimé leur solidarité avec la flottille et exigé la protection de ses passagers. La France, pour l’heure, s’est contentée de déclarer suivre la situation « avec préoccupation », condamnant toute attaque en mer.
- Situation humanitaire à Gaza
Pour rappel, selon les autorités sanitaires de la bande de Gaza, en Palestine, plus de 66.000 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes depuis le début du conflit en octobre 2023, suite à une attaque meurtrière attribuée au Hamas.
La majorité des victimes palestiniennes sont des enfants et des femmes, tandis que des centaines de civils ont été abattus dans des zones de distribution d’aide humanitaire ces derniers mois. Ces événements interviennent dans un contexte humanitaire dramatique à Gaza, alors que retentissent les appels internationaux pour un cessez-le-feu et une intensification du flot d’aide.
Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, Antonio Guterres, a déclaré en juillet que Gaza est confrontée à « une mort et une destruction sans précédent », que « la malnutrition est en forte hausse » alors que le système d'aide s'est effondré.
La Cour internationale de Justice (CIJ) a ordonné à Israël dès janvier 2024 de prévenir tout acte de génocide et de permettre l’accès à l’aide humanitaire. La Cour pénale internationale (CPI) a confirmé, en juillet, les mandats d’arrêt contre Benyamin Netanyahu et Yoav Gallant, les accusant de crimes de guerre, notamment d’avoir utilisé la famine comme méthode de guerre.