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Turquie : Un séminaire s'est penché sur les ambitions de Macron au Liban

- Des experts ont évoqué les événements récents en Méditerranée orientale, ainsi que les politiques agressives de la France dans la région, au cours d'un panel sur le Liban, qui s'est tenu samedi à Istanbul

1 23  | 29.08.2020 - Mıse À Jour : 29.08.2020
Turquie : Un séminaire s'est penché sur les ambitions de Macron au Liban

Ankara

AA - Paris - Ümit Dönmez

Un séminaire organisé par le think tank turc « KASAM » (Karadeniz Stratejik Araştırma Merkezi) à propos de la situation politique et géopolitique du Liban, s'est tenu samedi à Istanbul.

Des experts du Moyen-Orient ont discuté des événements récents survenus en Méditerranée orientale, des politiques agressives, passées et présentes, de la France dans la région, ainsi que des enjeux géopolitiques au Liban.

Après le discours d'ouverture prononcé par le président de la KASAM, Yusuf Cevahir, les académiciens Zekeriya Kurşun, Vehbi Baysan et Tuba Yildiz ont notamment évoqué les divisions internes du Liban, dans une perspective diachronique.

- "La Turquie doit ses souvenir de son histoire"

L'historien Zekeriya Kurşun a commencé par évoquer les tentatives françaises, à travers l'histoire, de contrôler la Méditerranée orientale, notamment sous Napoléon Bonaparte. Kursun, se basant sur les documents d'archive, a notamment rappelé que les Britanniques avaient livré à l'Empire Ottoman des renseignements préparés par la France en 1798 en vue de tenter la conquête de l'Égypte et de la Syrie. L'historien explique cette décision par la volonté britannique d'empêcher une telle implantation française dans la région.

"Sur cette nouvelle, le gouvernement du Sultan ottoman Selim III a demandé à l'ambassade à Paris qu'elle enquête sur l'exactitude de ces renseignements", explique l'historien, notant qu'après un certain temps d'attente, "le gouvernement ottoman a reçu deux lettres importantes".

"L'une d'elles venait de l'ambassadeur ottoman à Paris et l'autre d'Égypte", ajoute l'historien.

Lorsque le gouvernement a voulu révéler le contenu de ces lettres au sultan, Selim III s'est d'abord intéressé à la lettre de Paris, explique Kursun, ajoutant que "selon le rapport de l'ambassadeur ottoman à Paris, la Marine française se dirigeait vers l'Italie, et n'avait aucunement l'objectif d'attaquer des terres ottomanes".

Selon l'académicien, dans la lettre parvenue d'Égypte et remise au sultan Selim III, il était indiqué que la Marine française s'approchait de l'Égypte et que la situation était urgente et dangereuse.

Le Professeur Kursun a conclu ses observations en rappelant la nécessité pour la Turquie "de se souvenir de son histoire" et d'en tirer les leçons utiles, notamment sur la situation actuelle en Méditerranée orientale, et l'agressivité française dans la région.

- "Les alliances établies dans la région visent à mettre la Turquie hors-jeu"

Selon le Professeur Vehbi Baysan, spécialiste du Moyen-Orient, les alliances multilatérales récemment établies en Méditerranée orientale visent à exclure la Turquie du partage des ressources en hydrocarbures présentes dans la région, le professeur notant que cet objectif était "le dénominateur commun de ces pays", en référence notamment à la Grèce, l'Égypte, Israël, l'Administration chypriote grecque (ACG), et à la France.

L'académicien a souligné que les tensions géopolitiques en Méditerranée orientale et les ambitions françaises dans la région défavorisaient le Liban qui souffre déjà d'une situation politique, économique et sociale extrêmement tendue.

Baysan a notamment rappelé la visite du Président français Emmanuel Macron au Liban le 6 août, survenue deux jours après l'explosion au port de Beyrouth ayant tué plus de 170 personnes et blessé 6000 autres.

Le géopoliticien a évoqué l'attitude hautaine de Macron face à son homologue Libanais, le Président Michel Aoun "que Macron n'a pas considéré comme son égal, et qu'il a invité à disparaître de la scène lors de son discours de Beyrouth, qui a rappelé l'ère du Mandat français dans ce pays du Levant", entre 1920 et 1944.

- Les divisons internes au Liban, une source de tensions

La Professeure Tuba Yıldız, qui a vécu au Liban pendant ses années de doctorat, a rappelé que le Liban, qui est divisé sur des bases démographiques, religieuses et sectaires, doit souvent faire face à des impasses politiques issues de désaccords profonds.

Yildiz note, selon les observations de ses amis Libanais, que le petit pays du Proche-orient, récemment sorti d'une guerre civile extrêmement destructrice, "est confronté à des problèmes ayant gagné de l'ampleur depuis l'instauration de la paix" en 1990.

L'académicienne a tenu à faire part d'une expérience qu'elle a eue récemment, après l'explosion de Beyrouth.

Après avoir donné un aperçu des divisions religieuses régissant le fonctionnement de la Constitution libanaise, et citant une série d'exemples, Yıldız a relaté sa récente participation à un programme d'aide humanitaire destinée au Liban, suite à l'explosion survenue le 4 août dans la capitale.

L'académicienne se souvient qu'un de ses amis libanais lui avait posé la question suivante, révélatrice d'un certain état d'esprit au Liban :

"Devrions-nous donner cette aide uniquement aux musulmans ou pouvons-nous la donner aux chrétiens aussi ?", lui avait notamment demandé son ami libanais.

Yildiz a également exprimé son inquiétude, rappelant que le Président français, Emmanuel Macron avait parlé de la situation libanaise en évoquant la menace d'une guerre civile "si nous n'intervenons pas au Liban".

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