Syrie: Témoignages des femmes syriennes, victimes du régime d'al-Assad
- Les forces du régime ont été impliquées dans 7 699 viols dont 432 commis sur des jeunes filles mineures

Ankara
AA - Idleb
Bien que les conséquences des guerres touchent les communautés dans leur ensemble, elles affectent plus particulièrement les femmes.
Parmi elles se trouvent notamment celles illégalement emprisonnées dans les geôles du régime Assad, en Syrie.
Ces femmes victimes de tortures et de viols ont brisé le silence et fait part de leurs douloureuses expériences à l’Agence Anadolu.
Selon les données officielles obtenues par le Réseau Syrien des Droits de l’Homme (SNHR), au moins 8 633 femmes sont emprisonnées dans les geôles du régime d’Al Assad, dont 7 009 détenues sans procès.
Le SNHR ajoute que les forces du régime sont impliquées dans 7 699 cas de viol dans les centres de détention sur 864 femmes dont 432 sont mineures.
Cependant le nombre de femme emprisonnées et violées serait bien plus élevé. Le non enregistrement des emprisonnements et le silence des femmes qui subissent des viols expliquent, entre autres, la raison pour laquelle ces chiffres ne reflètent pas entièrement la réalité.
- «Une fillette de 15 ans violée, sous le regard des autres»
Dissimulant son visage avec son voile, Oum Mouhammed, originaire de la Ghouta orientale, a confié avoir été enlevée par les forces du régime, un matin en 2012, alors qu’elle se rendait sur son lieu de travail.
Les violences infligées aux femmes emprisonnées se lisent sur leur visage, indique la Syrienne qui raconte qu'une fillette de 15 ans a été violée, par six personnes, sous le regard de tous.
Violée à l'instar de la majorité des femmes emprisonnées, Oum Mouhammed a été battue et torturée jusqu'à perte de conscience pour avoir refusé d’ôter son voile.
- «Vous y entrez avec votre honneur mais ressortez sans»
«Vous y entrez (dans la prison) avec votre honneur mais ressortez sans», s'indigne Oum Mouhammed qui raconte qu’aucune des femmes emprisonnées dans les geôles d’Assad sont épargnées et subissent des viols et des tortures durant leur détention.
Aujourd'hui en liberté, la jeune femme souffre de nombreuses maladies. De plus, Oum Mouhammed est rejetée par ses proches pour avoir été violée.
- «Les escaliers sentaient la mort et les cadavres»
Originaire de Hama, Sayha El Baroudayi, cette mère de deux enfants raconte qu’elle a été arrêtée au niveau d’un point de contrôle alors qu’ils tentaient, avec son mari, de se rendre à Beyrouth, au Liban.
Indiquant avoir été arrêtée au motif qu’elle possédait dans son sac l’autorisation de chasse de son mari, El Baroudayi explique que lors de son jugement elle a été accusée à tort d’aider et d’encourager le terrorisme. Après le procès elle sera torturée pendant plusieurs heures.
Transférée dans différentes prisons de la région, la Syrienne explique avoir rencontré des femmes «semblables à des cadavres, affamées, la peau sur les os abîmée par les coups» et d'ajouter que la cellule de l'une des prisons, sentait « la mort et les cadavres».
«Les femmes emprisonnées se sont approchées de moi comme si j’étais quelqu’un qui descendait des cieux pour venir les sauver», raconte Baroudayi qui indique que les détenues étaient surexcitées à l'idée d'entendre la chute du régime et ainsi retrouver la liberté.
«Une seule patate douce était distribuée, tous les trois jours, pour trois personnes», partage-t-elle au sujet des conditions de détention, avant d'ajouter qu'elle n'y avait pas eu droit au motif que son nom ne figurait pas sur les listes de détenues.
«Les femmes à mes côtés m’ont donné de leur part. Malgré toutes les difficultés que nous avons subies, cet acte de bonté m’a apaisé, j’en ai pleuré (...) La nuit, après 21 heures les cris des jeunes, en particulier, nous empêchaient de dormir.»
«C’est comme si le temps s’était arrêté à cet instant», partage Baroudayi, qui a retrouvé la liberté aujourd'hui, en référence à l'instant où elle a vu des cadavres trainés par les forces du régime dans les corridors de la prison.
- «Il y avait deux pièces dans son bureau, celle à l’arrière était utilisée pour les viols»
«Si vous saviez ce qu’il se passait après minuit, raconte Mariem, également victime du régime, répugnée face au souvenir du général Souleimane, rencontré le premier jour de son arrivée à la base militaire. Il demandait à ce qu’on lui apporte les plus belles filles. Il y avait deux pièces dans son bureau, celle à l’arrière était utilisée pour les viols. Lorsque je lui demandais ‘Ne le fais pas pour l’amour d’Allah’ il rétorquait ‘Allah n’existe pas’. Alors je disais ‘Pour l’amour du Prophète’. Il se moquait et répondait qu’il était en vacances.»
Mariem confie que l'une des filles, tombée enceinte à la suite d’un viol, a perdu la raison après avoir vu le bébé, mis au monde à six mois de grossesse et abattu par balle.
«Des tortures chaque jour, s'est indignée la jeune femme. Des viols la nuit. Personne ne nous a accordé d’importance. Personne ne nous a entendu.»
- «Je m’adresse seulement à notre père Recep Tayyip Erdogan»
Divorcée de son mari et reniée par sa famille, Mariem est dénigrée par la population locale pour s'être fait violée.
Aujourd'hui, elle s'adresse au président turc, Recep Tayyip Erdogan, qu'elle qualifie de «père».
«Je m’adresse seulement à notre père Recep Tayyip Erdogan pour qu’il fasse entendre nos voix. Nous nous sommes adressées aux États-Unis, aux organisations des droits de l’Homme mais en vain. Personne ne nous a entendu. Je souhaite que Erdogan tende la main à ces femmes libérées après leur détention», partage Mariem, avant d’ajouter qu’elle pense toujours à ses amies emprisonnées, souhaitant que personne ne les oublie.
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