
Karaçi
AA/Ankara/Amir Latif Arain
Les forces cambodgiennes et thaïlandaises se sont affrontées jeudi le long de leur frontière disputée, échangeant des tirs de roquettes, déployant des avions de chasse et rétrogradant leurs relations diplomatiques à leur niveau le plus bas depuis des décennies.
Au moins 12 Thaïlandais ont été tués et 17 autres blessés dans cette nouvelle flambée de tensions autour d’un différend frontalier séculaire, qui a donné lieu à de fréquents affrontements entre les deux armées ces dernières années.
Le Cambodge n’a fourni aucune information sur d’éventuelles pertes humaines.
L’armée thaïlandaise a déployé des chasseurs F-16 qui auraient visé des sites militaires cambodgiens, tandis que Phnom Penh a riposté par des tirs de roquettes, provoquant le déplacement de centaines de civils des deux côtés de la frontière.
Les deux pays se disputent une portion de la frontière entre la province cambodgienne de Preah Vihear et celle d’Ubon Ratchathani, dans le nord-est de la Thaïlande.
Les tensions se sont intensifiées depuis le 28 mai, date à laquelle un soldat cambodgien a été tué, apparemment lors de tirs transfrontaliers.
La dernière escalade, jeudi, aurait été déclenchée par la pose de mines terrestres dans la zone disputée, entraînant explosions et blessés.
La crise frontalière a également engendré des répercussions politiques en Thaïlande, avec la suspension de l’ancienne Première ministre Paetongtarn Shinawatra, à la suite de la fuite d’un enregistrement d’un appel téléphonique privé entre elle et l’ex-Premier ministre cambodgien Hun Sen.
Dans cet enregistrement, Paetongtarn appelle Hun « tonton » et tient des propos désobligeants à l’égard d’un haut commandant militaire thaïlandais.
- Héritage colonial
Les revendications du Cambodge sur certaines portions de la frontière s’appuient sur une carte datant de 1907, établie sous l’administration coloniale française. Toutefois, l’ambiguïté de cette carte a entraîné des interprétations divergentes, que la Thaïlande a contestées.
Les deux pays ont tenté de résoudre ce différend par la voie diplomatique, sans jamais parvenir à un accord définitif, malgré l’intervention de la Cour internationale de justice (CIJ) en 1962.
Les affrontements entre les deux armées ont commencé en 2008, chaque camp accusant l’autre d’avoir déclenché les hostilités.
La dernière flambée meurtrière remonte à 2011, avec au moins 15 morts et des dizaines de milliers de civils déplacés.
Les combats se sont concentrés dans une zone frontalière boisée abritant d’anciens temples revendiqués par les deux parties.
Après sept jours de combats, un cessez-le-feu avait alors été déclaré.
- Interventions juridiques
La Thaïlande a affirmé que la démarcation n’était pas encore achevée pour certaines parties externes de la zone adjacente au temple de Preah Vihear, que la Cour internationale de justice (CIJ) avait attribuée au Cambodge par une décision de neuf voix contre trois en 1962.
En 2011, une juridiction de l’ONU a ordonné aux deux voisins de retirer leurs forces et d’établir une zone démilitarisée, sans toutefois statuer sur le contrôle d’un territoire plus vaste toujours disputé, où les affrontements se poursuivaient.
En novembre 2013, la CIJ a confirmé la souveraineté du Cambodge sur l’ensemble du territoire du temple de Preah Vihear, en ordonnant à la Thaïlande de retirer ses forces militaires de la zone.
Le Premier ministre cambodgien Hun Manet a désormais officiellement demandé au Conseil de sécurité de l’ONU d’intervenir rapidement face à ce qu’il qualifie d’« agression militaire préméditée ».
« Il est profondément condamnable que cet acte d’agression survienne alors que le Cambodge poursuit activement des voies juridiques pacifiques et impartiales pour résoudre les différends frontaliers », a déclaré Hun Manet.
Il a également saisi la CIJ suite aux nouvelles tensions survenues le 28 mai.
Dernières hostilités
Le conflit frontalier s’est de nouveau aggravé début mai, lorsque les deux armées se sont affrontées lors d’une nouvelle escarmouche, causant la mort d’un soldat cambodgien le 28 mai.
Cet incident a conduit les relations entre les deux pays à leur point le plus bas depuis des années.
Un soldat thaïlandais a perdu sa jambe droite dans l’explosion d’une mine terrestre mercredi, ce qui a provoqué de nouvelles attaques des deux côtés et la dégradation des relations diplomatiques.
Traduit de l'anglais par Sanaa Amir