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OTAN : La Suède et la Finlande considèrent l'adhésion sur fond de guerre en Ukraine

- La Russie adresse aux pays baltes une mise en garde contre les "conséquences militaires et politiques" de leur adhésion à l'Alliance militaire

Ekip  | 12.05.2022 - Mıse À Jour : 12.05.2022
OTAN : La Suède et la Finlande considèrent l'adhésion sur fond de guerre en Ukraine

London, City of

AA / Stockholm / Leila Nezirevic

Malgré les menaces de Moscou qui estime que leur adhésion à l'OTAN poussera la région dans un conflit avec la Russie, la Suède et la Finlande s'apprêtant à adhérer à l'OTAN, mettant ainsi fin à des décennies de neutralité.

La guerre que la Russie mène en Ukraine depuis le 24 février a incité la Suède et la Finlande à réévaluer leur politique de sécurité et à envisager de mettre fin à leur opposition à l'adhésion à l'OTAN.

Les sociaux-démocrates suédois au pouvoir se prononceront sur la candidature à l'OTAN le 15 mai, tandis que la Finlande devrait annoncer son soutien à l'adhésion à l’alliance dès cette semaine.

La candidature à l'OTAN pourrait être présentée lors du sommet de l'alliance qui se tiendra en juin à Madrid, et il est fort probable qu'elle soit traitée de manière accélérée.


** La Russie met en garde contre l'adhésion à l'OTAN de la Suède et de la Finlande


La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a brandi la menace de "conséquences militaires et politiques" si les deux pays rejoignaient l'organisation.

Stefan Ring, ancien membre des forces armées suédoises et expert militaire, a déclaré que le comportement du président russe Vladimir Poutine en Ukraine était "considéré comme très irrationnel et créait un sentiment d'insécurité, notamment en Finlande."

Il a soutenu que le processus politique était rapide pour la Finlande puisqu'elle a déjà eu une option politique pour rejoindre l'OTAN.

"Lorsque le gouvernement suédois a réalisé que la Finlande allait probablement prendre la décision de rejoindre l'OTAN, il a compris qu'un scénario où la Suède serait le seul pays en dehors de l'OTAN pourrait engendrer une situation négative", a-t-il affirmé.

Selon Ring, une telle situation "pourrait entraîner des pressions de la part de la Russie et de l'OTAN, et la coopération actuelle en matière de défense avec la Finlande serait également menacée".

Mais la Russie met en garde les deux pays nordiques contre l'adhésion à l'OTAN, une alliance de défense composée de 30 nations fondée peu après la Seconde Guerre mondiale.

L'alliance est largement dominée par les États-Unis et son siège se trouve à Bruxelles, en Belgique.

Moscou avertit que l'adhésion de la Suède et de la Finlande à l'OTAN serait préjudiciable à leur sécurité et à celle de l'Europe.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré que "l'alliance reste un outil orienté vers la confrontation."

Peskov a prévenu que l'OTAN "n'est pas le genre d'alliance qui assure la paix et la stabilité, et que la poursuite de son expansion n'apportera pas de sécurité additionnelle au continent européen."

Il a également averti que, si la Suède et la Finlande décidaient d'aller de l'avant avec leur adhésion à l'OTAN, la Russie devrait "rééquilibrer la situation" en prenant ses propres mesures.

Le dépôt d'une candidature en soi ne placerait pas les deux pays nordiques sous le parapluie de l'article 5 de l'OTAN, qui garantit qu'une attaque contre un pays membre est une attaque contre tous.

La procédure de candidature prenant généralement de six mois à un an, beaucoup pensent que la Suède et la Finlande sont particulièrement vulnérables aux représailles de la Russie pendant la période de candidature, alors que l'OTAN ne sera pas tenue de défendre ses membres potentiels.


** Les Russes ne vont pas recourir à la force militaire, mais des cyberattaques sont toujours possibles


Gunilla Herolf, chargée de recherche à l'Institut suédois des affaires internationales, a affirmé qu'il s'agit d'une phase sérieuse car les Russes "risquent de nous faire subir diverses représailles, mais nous ne pensons pas qu'ils feront usage de moyens militaires, alors que des attaques informatiques, des sabotages contre l'électricité, les systèmes de chauffage, etc. sont tout à fait possibles. "

Et de poursuivre : "Ils violeront nos frontières, ce qu'ils font de toute façon de temps en temps lorsque nous les contrarions, c'est donc le genre de choses que nous pensons être en mesure de gérer assez bien, certaines d'entre elles se produisant déjà."

Herolf estime que le Kremlin n'aura pas recours à la force militaire.

"Nous ne le croyons pas, parce que nous pensons que s'ils essaient de nous attaquer militairement, ils ne peuvent pas savoir avec certitude si l'OTAN ou des pays de l'OTAN viendraient à notre aide, et ce serait une décision extrêmement délicate pour la Russie", a-t-elle affirmé.

Gunilla Herolf estime que la Russie ne prendrait pas cela à la légère et qu'"elle s'abstiendrait très probablement de le faire et s'adonnerait aux autres actions qu'elle maîtrise déjà très bien, et bien sûr continuerait sa guerre de l'information contre nous, comme elle le fait toujours, en nous disant que nous détruisons les bonnes relations dans la région de la mer Baltique".

Selon elle, la Russie a menacé la Suède et la Finlande dès le mois de décembre.

"Ils nous ont dit que nous ne serons pas autorisés à rejoindre l'OTAN même si nous le souhaitons. Ils ont également dit que nous ne pourrions pas organiser de manœuvres avec d'autres pays de notre choix et que nous ne pourrions pas organiser de manœuvres dans les pays baltes à proximité des navires russes", a-t-elle expliqué.

Selon Herolf, ces menaces du Kremlin ont contribué à l'évolution soudaine de la politique suédoise et finlandaise vers l'adhésion à l'OTAN.

"Ils ont exigé de pouvoir contrôler tout notre comportement en mer Baltique, ce qui a bien sûr été rejeté par la Suède et la Finlande (…) C'est très grave qu'un autre pays essaie de limiter notre propre politique étrangère et notre comportement", a ajouté Herolf.

Et de conclure : "De plus, la télévision russe se moque beaucoup de la Suède et de la Finlande ; elle dit à son public que ce serait très bien si elle pouvait occuper l'île très stratégique de Gotland, par exemple. Je dirais qu'ils se comportent comme des ennemis".


** La Suède et la Finlande se préparent à des attaques militaires et virtuelles


La Finlande se concentre en grande partie sur la manière dont les 30 États membres de l'OTAN peuvent assurer la sécurité de la Suède et de la Finlande pendant la période de candidature, où les deux pays seront exposés aux menaces de la Russie sans les garanties de l'OTAN.

Des troupes britanniques, américaines, lettones et estoniennes ont récemment participé à une manœuvre avec une brigade blindée finlandaise, dans le cadre de la force expéditionnaire conjointe de l'OTAN. Le ministère britannique de la défense a déclaré que l'objectif était de "dissuader toute agression russe en Scandinavie et dans les États baltes".

Henri Vanhanen, conseiller en politique étrangère du Parti de la coalition nationale, le principal groupe d'opposition finlandais, a déclaré que "les deux (pays) se préparent désormais à faire face à diverses menaces à caractère militaire et virtuel".

La Suède et la Finlande se sont préparées au niveau national, mais elles sont également sur le point de recevoir une assistance en matière de sécurité, a-t-il expliqué, ajoutant : "Je dirais donc que les deux pays sont aussi sûrs qu'ils peuvent l'être dans ces circonstances, et c'est dans l'intérêt de toutes les parties en ce moment. "

Le Kremlin considère l'OTAN comme une menace pour la sécurité de la Russie, car au lendemain de la disparition de l'Union soviétique en 1991, l'alliance militaire a étendu son influence jusqu'à la frontière russe.

Alors que Moscou contrôlait autrefois tous les pays d'Europe de l'Est, avec des soldats russes stationnés dans la plupart d'entre eux, la situation est bien différente aujourd'hui, car presque tous ces pays ont le regard tourné vers l'ouest.

Même des pays comme l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie, qui faisaient autrefois partie de l'Union soviétique, ont rejoint l'alliance.

Poutine a exigé par le passé que l'OTAN se retire de tous ces pays d'Europe de l'Est et qu'aucun nouveau pays ne rejoigne l'alliance.

Une fois membres à part entière, l'OTAN garantirait à la Suède et à la Finlande la sécurité collective au titre de l'article 5, le parapluie nucléaire de l'OTAN et un plan de défense commun en Europe du Nord.

La Suède et la Finlande sont toutefois situées entre la région de l'Arctique et celle de la mer Baltique. Ces deux pays doivent donc être considérés comme stratégiquement importants et peuvent apporter une valeur ajoutée à l'alliance, car ils peuvent renforcer la sécurité et la défense de l'OTAN en Europe du Nord. La Finlande, en particulier, est d'une grande importance pour l'alliance car elle partage une frontière avec la Russie.

"Cela créerait une sorte de bastion nordique, augmentant la stabilité et la sécurité en Europe du Nord, et je pense donc qu'ils seraient très bien accueillis dans l'alliance et apporteraient une valeur ajoutée à sa sécurité collective dans le Nord", a déclaré Vanhanen.

La neutralité a bien servi la Suède et la Finlande au fil des ans, mais le fait de prendre parti et d'étendre l'OTAN jusqu’aux portes de la Russie pourrait inciter Moscou à déclencher un nouveau conflit militaire, ce qui, selon beaucoup, pourrait entraîner une destruction majeure en Europe et dans le monde entier.

Venhanen affirme cependant : "Je pense que la Russie a également tiré une leçon de l'Ukraine, à savoir que l'aventurisme et le recours à des guerres dont les objectifs et la finalité sont vagues peuvent être risqués et difficiles, aussi je pense que dans le cas de la Suède et de la Finlande, elle ne va pas recourir à ces moyens."


*Traduit de l’Anglais par Mourad Belhaj

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