Négociations de paix d'İstanbul – Selon les experts, Istanbul est le lieu idéal pour négocier la paix
Dans ce contexte, le président Erdogan a réaffirmé la position constante de la Türkiye depuis le début du conflit, soulignant que son pays est prêt à accueillir des négociations afin d’aboutir à une paix juste et durable en Ukraine

Brussels Hoofdstedelijk Gewest
AA / Bruxelles / Selen Valente Rasquinho - Melike Pala
Les experts estiment que, en raison des efforts déployés par la Türkiye depuis le début en faveur d'une paix juste et durable, Istanbul constitue le lieu le plus approprié pour accueillir les pourparlers directs entre les parties russe et ukrainienne, qui se retrouveront après trois ans d'interruption.
Avec la proposition du président russe Vladimir Poutine de lancer des négociations directes « sans conditions préalables » avec l’Ukraine, l’attention se tourne désormais vers les pourparlers prévus demain jeudi à Istanbul.
En réponse à cette initiative, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré qu’il attendrait son homologue russe en Türkiye à la date convenue.
Dans ce contexte, le président Recep Tayyip Erdogan a réaffirmé la position constante de la Türkiye depuis le début du conflit, soulignant que son pays est prêt à accueillir des négociations afin d’aboutir à une paix juste et durable.
Les pourparlers organisés à Istanbul en avril 2022, alors que seulement deux mois s’étaient écoulés depuis le début de la guerre, sont aujourd’hui perçus comme une occasion manquée.
Depuis plus de trois ans, les pays européens ont alloué des milliards d’euros pour soutenir l’Ukraine face à la Russie.
Par ailleurs, l’attitude du président américain Donald Trump, arrivé au pouvoir en début d’année et déterminé à mettre fin au conflit, suscite l’inquiétude à Bruxelles, dans la mesure où elle marginalise l’Europe dans ce processus.
Les journalistes d'Anadolu ont recueilli les analyses de plusieurs experts européens concernant les pourparlers à venir à Istanbul sous l’égide de la Türkiye.
La fondatrice de l’Institut d’études sur la Türkiye à Cracovie, en Pologne, Dr. Karolina Wanda Olszowska, a souligné que, depuis les discussions menées à Istanbul en 2022, la principale évolution réside dans l’intensification des pressions internationales, notamment de la part des États-Unis, pour parvenir à un accord de paix.
Elle estime également que les sanctions économiques, la guerre prolongée et les pertes humaines ont significativement affaibli la Russie, tant sur le plan militaire qu’économique.
« Ce que nous observons aujourd’hui, c’est une combinaison de lassitude intérieure, de tensions économiques et de pressions internationales croissantes pour mettre un terme à l’hostilité », a-t-elle analysé.
Rappelant que la Türkiye entretient des relations équilibrées avec l’Ukraine, l’Europe et la Russie depuis le début du conflit, elle a affirmé : « Du point de vue de l’Ukraine et de l’Union européenne, il ne fait aucun doute que la Türkiye est à ce stade le médiateur le plus adapté et le plus fiable. »
« La Türkiye est le lieu idéal pour des négociations de paix »
« La Türkiye a le potentiel de jouer un rôle critique, à la fois important et nécessaire », a estimé Olszowska, soulignant son appartenance à l’OTAN et ses liens étroits avec l’Union européenne.
Concernant la perspective d’accueillir des pourparlers entre l’Ukraine et la Russie, elle a déclaré :
« En tant que pilier fondamental de la sécurité européenne, la Türkiye possède une compréhension approfondie des risques posés par une Russie surpuissante.
N’oublions pas que c’est la Türkiye qui s’est constamment opposée à l’influence russe en Syrie, en Libye, dans certaines régions d’Afrique et dans la mer Noire. En outre, la Türkiye a rappelé à plusieurs reprises à la communauté internationale que la Crimée faisait partie intégrante de l’Ukraine et le restera.
Je suis convaincue que la Türkiye, en tant que cheffe de file dans cette médiation, ne perdra pas de vue ces réalités.
C’est pourquoi je considère la Türkiye comme le meilleur lieu possible pour ces négociations. Je crois qu’Ankara peut contribuer à mettre fin à la guerre dans des conditions qui préservent la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine. Une telle issue garantirait une sécurité durable pour la Türkiye, la Pologne et toute l’Europe. »
Elle a exprimé l’espoir que ces discussions aboutissent à un cessez-le-feu et ouvrent la voie à un processus pouvant mener à une paix durable.
- Istanbul, à nouveau lieu des négociations après trois ans
Ondrej Ditrych, analyste principal de l’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne (EUISS), spécialisé dans la Russie et les régions de voisinage oriental, a également souligné : « Je suis entièrement d’accord sur le fait que la Türkiye, et Istanbul en particulier, est le lieu indiqué pour ces discussions. »
Se référant aux pourparlers de 2022, Ditrych a rappelé qu’ils constituent un précédent, bien qu’il soit encore incertain de connaître la position réelle que la Russie adoptera lors de ces nouvelles discussions.
Il estime que la position de la Russie n’a pas fondamentalement changé et avance qu’elle cherche peut-être davantage à apparaître comme favorable à la paix aux yeux des États-Unis qu’à réellement œuvrer en ce sens.
« Le gouvernement turc et le président Erdoğan ont un rôle important à jouer. C’est pourquoi je considère cette situation comme une partie très délicate à manœuvrer », a-t-il déclaré.
Et d’ajouter : « La proposition de négociation de la Russie pourrait n’être qu’une manœuvre tactique pouvant entraîner un léger changement temporaire dans sa position.
Mais sans pression réelle, je doute fortement qu’elle renonce à sa position maximaliste sur le conflit en Ukraine. »
Amanda Paul, experte de la Türkiye et de l’Ukraine au sein du Think tank bruxellois European Policy Centre (EPC), a rappelé que, dès les premiers jours du conflit, le président Erdogan s’est activement investi dans les efforts internationaux en vue de parvenir à une solution juste et durable pour l’Ukraine, et que les premières discussions sérieuses ont eu lieu à Istanbul.
Elle a souligné que, comme en 2022, la Türkiye se montre à nouveau disposée à accueillir ces négociations, rappelant également que Poutine avait qualifié les discussions d’alors de « point de départ » ou d’« exemple du type de conclusion » qu’il recherchait.
Toutefois, Paul s’est dite sceptique quant à la position actuelle de Moscou, en soulignant que les dernières déclarations des responsables russes reflètent la volonté d’annexer l’ensemble des territoires ukrainiens, ce qui, selon elle, démontre un désintérêt pour un quelconque cessez-le-feu.
- La guerre Russie-Ukraine et les négociations
La guerre déclenchée par l’attaque russe contre l’Ukraine, le 24 février 2022, a conduit à l’annexion de vastes portions des régions ukrainiennes de Donetsk, Luhansk, Kherson et Zaporijjia.
Depuis l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, l’Ukraine a perdu le contrôle d’environ un cinquième de son territoire.
Alors que les États-Unis et les pays européens ont fourni une aide économique et militaire massive à l’Ukraine, de lourdes sanctions ont été imposées à la Russie pour sa politique d’annexion.
Après des premiers pourparlers menés au Belarus, les ministres des Affaires étrangères russe et ukrainien se sont rencontrés le 10 mars 2022 à l’occasion du Forum diplomatique d’Antalya.
La Türkiye a ensuite réuni les deux parties à Istanbul le 29 mars 2022.
Mais le compromis obtenu à Istanbul a été remis en cause à la suite des accusations de massacres de civils dans la ville de Boutcha, tandis que des allégations ont circulé selon lesquelles les États-Unis et le Royaume-Uni se seraient opposés à l'accord.
Malgré l’intensification du conflit, la Türkiye a poursuivi ses efforts diplomatiques en faveur de la paix. Avec le soutien des Nations Unies, elle a notamment permis la signature de l’Initiative céréalière de la mer Noire, qui a eu un large retentissement international.
Le président Recep Tayyip Erdoğan, l’un des rares dirigeants à pouvoir dialoguer avec les deux camps, n’a cessé de proposer la Türkiye comme médiateur et hôte pour des négociations de paix. L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a ravivé la dynamique diplomatique.
Le 11 mai, le président russe Vladimir Poutine a proposé de reprendre les pourparlers directs interrompus trois ans plus tôt, sans condition préalable, dès le 15 mai à Istanbul, en sollicitant l’accueil de ces discussions par le président Erdogan.
La réponse de Kiev a été positive et la communauté internationale a salué favorablement cette relance du processus de paix à Istanbul.
* Traduit du turc par Sanaa Amir
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