
Ankara
AA / Antalya / Alex Sinhan Bogmis
Le mercredi 7 juillet 2021, Haïti était en émoi à la suite de l'assassinat du Président Jovenel Moïse. Sa veuve, Martine Moïse, espère que "justice sera rendue", plus de huit mois après l'incident qui a fait écho à travers le monde. Madame Moïse, 47 ans, entretient l'espoir de voir les responsables du crime punis à la hauteur de leurs actes.
"Le Président ne doit pas mourir en vain. Il s'est battu et s'est même sacrifié pour son peuple. On ne peut pas l'oublier. Il faut que justice soit rendue et que les personnes qui ont financé, commandité le crime, aillent en prison", a-t-elle confié au cours d'une interview accordée à l'AA en marge du deuxième Forum d'Antalya sur la Diplomatie (ADF).
Ce forum s'est tenu du 11 au 13 mars sur le thème "Reconstruire la diplomatie", dans le sud-est de la Turquie. Il a mobilisé des participants de 75 pays, dont 17 Chefs d'État et de gouvernement, 80 ministres, 39 représentants d'organisations internationales, et a été couvert par environ 600 journalistes.
Martine Moïse estime avoir été miraculeusement échappée à la mort dans la nuit du 7 juillet 2021. Elle a reçu des balles à l'épaule et gisait dans une marre de sang dans la même pièce que Jovenel Moïse. Son bras droit, pratiquement handicapé, porte encore les séquelles de ce violent incident.
"Je ne peux pas dire que je vais bien. Cela a été un choc. Du jour au lendemain, vous perdez votre partenaire de 25 ans. On a fêté le 25ème anniversaire de notre mariage en janvier 2021 et il est parti en juillet", a-t-elle révélé.
"Au moment des faits, ajoute-t-elle, j'ai pensé que j'étais la seule vivante, que les enfants également étaient morts. Je me suis dit oh mon Dieu, qu'est-ce que je fais, pourquoi suis-je la seule survivante? J'ai repris espoir lorsque les enfants sont venus me rejoindre."
Martine Moïse est déterminée à poursuivre son combat afin de faire triompher la justice.
"L'espoir est tout ce qui me reste depuis que mon époux est parti. L'espoir que les choses vont changer, l'espoir que justice soit rendue, bien que les choses soient ralenties un tout petit peu actuellement. Le juge qui a avait été désigné est parti, un autre est sur le point d'être nommé. Nous verrons ce que ça va donner, a dit Martine Moïse. Aujourd'hui, je veux me battre non seulement pour ma famille, mais aussi pour le peuple haïtien. Parce que le peuple haïtien est le premier perdant. La famille a perdu un père, un mari, un ami. Mais le peuple, lui, a perdu son Président. Ils sont dans une énorme douleur, dans une grande souffrance puisqu'il y a plein de changements qu'il avait effectués pour les populations, et actuellement elles sont en train de les perdre."
Madame Moïse a également mis un accent sur l'importance d'entretenir le dialogue dans la résolution des différends, tel que préconisait le Président Jovenel Moïse.
"Il disait qu'il ne faut jamais arrêter de dialoguer, parce qu'en se parlant, on peut résoudre beaucoup de problèmes. Il faut toujours prioriser le soft power sur le hard power, a-t-elle souligné. Pour tous les peuples et les dirigeants du monde, au lieu de se battre ou d'utiliser le hard power, il est beaucoup mieux d'utiliser le soft power. De fois c'est plus lent et plus long, mais cela produit de meilleurs résultats. Il n'y a pas de morts, pas de dommages."
Martine Moïse a exprimé sa reconnaissance des organisateurs et des participants au Forum d'Antalya sur la Diplomatie qui, selon elle, appréciaient son époux.
"Je me suis rendu compte de la solidarité exprimée à notre endroit en rencontrant les premières dames et les dirigeants à ce forum [ADF]. Ils ont manifesté leur intérêt, partagé avec moi leur sympathie, a-t-elle affirmé. Quand l'incident est arrivé, je ne savais pas que cela avait frappé le monde aussi fortement. Le Président Moïse s'est fait, au cours des quatre années au pouvoir, beaucoup d'amis. Il y a beaucoup qui l'appréciaient et qui sont désolés pour ce qui est arrivé."
La gent féminine représente la base de la société, soutient-elle, ajoutant qu'elle devrait davantage être impliquée dans les actions de développement et les sphères de prise de décision, notamment en Haïti qui reste secouée par une crise sociale.
"Haïti prend appui sur la gent féminine. Lorsque tu as une femme à un niveau de responsabilité, le plus souvent, ça se passe toujours bien", a conclu Martine Moïse.