L’ONU dénonce une « escalade terrifiante » au Soudan, après la prise d’El-Fasher par les Forces de soutien rapide
- « La situation est chaotique. Dans ce contexte, il est difficile d’estimer le nombre de civils tués », a déclaré la responsable onusienne Martha Ama Akyaa Pobee
Washington DC
AA / Washington / Diyar Guldogan
Une haute responsable des Nations unies a averti jeudi que la guerre civile au Soudan était entrée dans une nouvelle phase après la prise d’El-Fasher, dans le nord du Darfour, par les Forces de soutien rapide (RSF), suscitant des craintes d’atrocités de masse et d’une déstabilisation régionale accrue.
S’exprimant devant le Conseil de sécurité, Martha Ama Akyaa Pobee, secrétaire générale adjointe pour l’Afrique aux départements des affaires politiques, de la consolidation de la paix et des opérations de maintien de la paix, a déclaré que la situation au Soudan « s’est encore détériorée », évoquant des souffrances généralisées, une nouvelle flambée de violence et des risques croissants pour les civils.
« Après plus de 500 jours de siège, la ville d’El-Fasher, dans le Nord-Darfour, est tombée aux mains des Forces de soutien rapide. Seules de petites poches de résistance subsistent. La chute de la ville marque un tournant majeur dans la dynamique sécuritaire. Les conséquences pour le peuple soudanais et pour la région sont considérables », a-t-elle déclaré.
Pobee a souligné que les évolutions militaires continuaient de façonner le cours du conflit.
« Le coût humain est profond. Le risque d’atrocités massives, de violences à caractère ethnique et d’autres violations du droit international humanitaire, y compris des violences sexuelles, demeure alarmant dans tout le pays, en particulier à El-Fasher », a-t-elle ajouté.
« La situation est tout simplement terrifiante », a-t-elle poursuivi, précisant que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme avait reçu la semaine dernière des informations crédibles sur des massacres, des exécutions sommaires et des fouilles maison par maison, alors que des civils tentaient de fuir.
« C’est le chaos. Dans ces conditions, il est difficile d’estimer le nombre de civils tués. Malgré les promesses de protection, la réalité est que personne n’est en sécurité à El-Fasher », a-t-elle affirmé.
La responsable onusienne a indiqué que les violences s’étaient également intensifiées dans la région du Kordofan, où les RSF ont récemment pris la ville de Bara. Elle a fait état d’informations sur des représailles et des meurtres ciblés à caractère ethnique, notamment l’exécution de cinq volontaires du Croissant-Rouge.
Elle a réitéré l’appel du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, à un cessez-le-feu immédiat et à la reprise des pourparlers de paix, tout en condamnant les ingérences étrangères et l’afflux d’armes et de combattants au Soudan.
- « Nous devons redoubler d’efforts pour une solution urgente et durable »
Pobee a indiqué que l’envoyé personnel de l’ONU, Lakhdar Lamamra, avait invité les deux parties à participer à des discussions techniques axées sur la désescalade et la protection des civils. Les deux camps auraient manifesté une première ouverture à ces discussions.
La diplomatie régionale s’intensifie également. L’Union africaine (UA), l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Ligue des États arabes et l’ONU — réunies dans le cadre du « mécanisme du Quartet » — préparent un dialogue intersoudanais sous l’égide de l’UA. Parallèlement, une coordination se met en place avec l’initiative dite du « Quad », qui réunit l’Égypte, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les États-Unis.
La prochaine réunion ministérielle consultative UA–ONU à Addis-Abeba offrira, selon elle, une occasion pour les médiateurs d’harmoniser leurs efforts et de renforcer leur coordination.
Pobee a conclu par un appel appuyé à une action internationale résolue, avertissant que l’inaction du Conseil risquait d’encourager de nouvelles atrocités.
« Alors que le conflit atteint un nouveau tournant critique, nous devons redoubler d’efforts pour parvenir à une solution urgente et durable. Des rapports et des alertes sur la catastrophe en cours à El-Fasher circulent depuis des mois. Jusqu’à présent, le Conseil de sécurité n’a pas pris de mesures décisives pour empêcher la situation de s’aggraver. Nous devons tous contribuer à mettre fin à cette guerre dévastatrice et nous tenir aux côtés du peuple soudanais, qui a déjà trop souffert », a-t-elle insisté.
Pobee a exhorté le Conseil à utiliser « tous les outils à sa disposition » pour exiger la paix au Soudan. « Nous comptons sur le Conseil pour montrer la voie », a-t-elle ajouté.
Le conflit entre l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide, déclenché à la mi-avril 2023, a déjà fait plus de 20 000 morts et provoqué le déplacement de 14 millions de personnes, selon l’ONU et les autorités locales.
* traduit de l'anglais par Ayse Betul Akcesme
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