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L'élection du nouveau secrétaire général de l'OEA marque la rupture avec l'ère Trump

- Albert Ramdin, originaire du Suriname, a été élu secrétaire général de l'Organisation des États américains (OEA)

Laura Gamba Fadul  | 12.04.2025 - Mıse À Jour : 15.04.2025
L'élection du nouveau secrétaire général de l'OEA marque la rupture avec l'ère Trump

Colombia

AA/Bogota/Laura Gamba

Albert Ramdin, originaire du Suriname, a été élu secrétaire général de l'Organisation des États américains (OEA) le 10 mars, marquant un tournant décisif pour l'organisation et signalant une possible redéfinition des relations interaméricaines.

Cette élection intervient après une période de direction marquée par des tensions et des divisions.

Cependant, Ramdin n'était pas initialement perçu comme le favori, et sa victoire vient bousculer les pronostics.

L'Organisation des États Américains (OEA), fondée en 1948, regroupe 35 États du continent américain.

Elle sert de forum de dialogue sur les questions politiques, économiques et de sécurité, avec un accent sur la démocratie et la prévention des conflits.

-Le candidat pro-Trump échoue à obtenir du soutien

Le candidat du Paraguay, l'actuel ministre des Affaires étrangères, Ruben Ramirez Lezcano, était entré dans la course pour le poste de secrétaire général de l'OEA comme le prétendant favori, semble-t-il destiné à obtenir la direction de l'organisation.

L'administration de Donald Trump aux États-Unis a activement soutenu Ramirez Lezcano, utilisant des pressions diplomatiques pour obtenir des soutiens. Cependant, l'endorsement de Trump s'est finalement avéré un handicap pour la campagne de Lezcano.

Une coalition composée de pays des Caraïbes et de gouvernements progressistes d'Amérique du Sud, notamment la Colombie, le Chili, l'Uruguay et le Brésil, qui se méfiaient des politiques de Trump, s'est unie pour soutenir Ramdin. Finalement, Lezcano s'est retiré et 28 des 32 pays votants ont exprimé leur soutien à Ramdin.

Les experts suggèrent que cette élection a servi de référendum sur l'approche de l'administration américaine vis-à-vis de l'Amérique latine.

Camilo Manuel Gonzalez, professeur de Relations internationales à l'Université Javeriana en Colombie, avance que les politiques de Trump, notamment l'imposition de droits de douane, ses menaces de prendre le contrôle du canal de Panama et son mépris général des préoccupations régionales, ont galvanisé l'Amérique latine dans sa défiance.

« Lorsque Donald Trump a lancé sa politique tarifaire, attaqué certains gouvernements latino-américains et soulevé la question très controversée du canal de Panama, les perspectives de Ramirez Lezcano ont commencé à se dégrader », a déclaré Gonzalez.

Trump a maintenu que son gouvernement chercherait à revendiquer le contrôle du canal de Panama pour des raisons économiques et en raison de son prétendu contrôle par la Chine, des affirmations que le président panaméen José Raul Mulino a contestées.

Ses positions sur l'immigration ont également créé des frictions avec les gouvernements colombien et brésilien.

- Le nouveau leader de l'OEA

Cette élection marque la première fois qu'un représentant des Caraïbes occupe ce poste. Albert Ramdin succédera à l'Uruguayen Luis Almagro à la tête de l'OEA, après avoir présidé l'organisation depuis 2015. Ramdin devrait assumer ses nouvelles fonctions le 26 mai, avec un mandat qui s'étendra jusqu'en 2030.

Ramdin est le principal diplomate du Suriname depuis 2020 et a précédemment occupé le poste de secrétaire général adjoint de l'OEA pendant deux mandats consécutifs, de 2005 à 2015.

Les experts caractérisent son style de leadership comme étant favorable à la diplomatie discrète et soulignent sa réputation de bâtisseur de consensus.

« Ramdin a une longue histoire de travail au sein de l'organisation et possède une compréhension approfondie de ses opérations quotidiennes », a observé Gonzalez. « Il privilégiera probablement la recherche du consensus parmi les États membres. »

Selon Gonzalez, l'approche de Ramdin consiste à éviter les actions susceptibles d'éroder la confiance des gouvernements. Cela signifie que l'OEA, sous sa direction, reflétera probablement les préférences des États membres qui l'ont élu, limitant ainsi les interventions dans les affaires internes des pays.

Les divisions sous Almagro

L'élection de Ramdin marque un contraste frappant avec la direction sortante de Luis Almagro, qui est connu pour sa rhétorique de confrontation.

Lors de sa prise de fonction, Almagro a mis la situation du Venezuela et la crise en cours dans le pays au centre de son agenda. Il a constamment affirmé que l'intimidation politique est répandue au Venezuela et a abordé des questions telles que la violence, la pauvreté, la corruption et les accusations de trafic de drogue portées contre le gouvernement du pays sud-américain.

Almagro a même demandé officiellement l'arrestation du président vénézuélien Nicolás Maduro devant la Cour pénale internationale après la mort d'une dizaine de personnes lors des manifestations qui ont suivi la déclaration de Maduro comme vainqueur des élections du 28 juillet 2024.

Le pays a annoncé son intention de se retirer de l'OEA et a accusé Almagro de chercher « une intervention étrangère », n'ayant actuellement aucun représentant à l'organisation basée à Washington.

« Cela reflète la faiblesse de l'organisation car elle n'a pas été capable de générer des résultats crédibles et contraignants », explique Gonzalez.

Ramdin a déjà exprimé son intention de rechercher des accords et des solutions aux défis de l'hémisphère à partir d'une position d'intermédiaire, une position qui le distingue clairement d'Almagro.

Dans un discours prononcé lors de l'Assemblée générale de l'OEA à Washington en mars, Ramdin a appelé à l'unité régionale et au dialogue entre les États membres.

« Unissons-nous et mobilisons nos capacités collectives », a-t-il exhorté. « J'espère que vous me rejoindrez sur ce chemin, pour avancer, non pas reculer, unis, pas divisés. »

- Le multilatéralisme sous Trump

Le scepticisme marqué de l'administration Trump envers le multilatéralisme représente une menace potentielle importante pour la stabilité financière de l'OEA.

La doctrine "America First" de Trump peut être interprétée comme un mépris pour les organisations internationales perçues comme ne servant pas directement les intérêts nationaux des États-Unis.

Cette perspective soulève des préoccupations quant à la réduction significative ou même à la suppression du financement américain de l'OEA, qui a historiquement été un contributeur majeur.

"Il est tout à fait plausible que Trump annonce son intention de couper les fonds à l'OEA", a spéculé Gonzalez.

"Cependant, si Ramdin et les États latino-américains présentent un front uni contre Trump, il pourrait reconsidérer, comme cela s'est produit lors de disputes commerciales passées."

- L'OEA sous la nouvelle direction

Gonzalez suggère que sous la nouvelle direction de Ramdin, l'OEA devrait s'attaquer à des questions régionales pressantes, notamment l'immigration.

Une autre priorité clé pour l'organisation sous Ramdin devrait être la consolidation de liens diplomatiques et économiques plus forts entre les États latino-américains et d'autres blocs mondiaux, tels que l'UE, ainsi que des acteurs majeurs comme la Chine et d'autres pays.

"Cette approche stratégique vise à diversifier les partenariats et potentiellement créer un contrepoids aux pressions unilatérales et aux politiques de Trump", a-t-il ajouté.

Traduit de l'anglais par Sanaa Amir


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