Israël accusé d’utiliser la famine comme arme de guerre à Gaza, selon Amnesty International
- L’ONG alerte sur une faim catastrophique et des décès d’enfants, pointant l’entrave délibérée de l’aide humanitaire sous un « dispositif militarisé » israélien

Ankara
AA / Ankara / Ikram Kouachi
Israël continue d’avoir recours à la famine comme arme de guerre contre les civils de la bande de Gaza, dans le cadre d’une stratégie plus large visant à « commettre un génocide » contre les Palestiniens, a déclaré jeudi l’organisation de défense des droits humains Amnesty International.
Dans un communiqué, l’ONG basée à Londres affirme que les conditions de vie restent catastrophiques pour les civils de Gaza, notamment les enfants, en raison des bombardements incessants, des déplacements forcés, et du manque d’accès à la nourriture, à l’eau potable et aux soins médicaux.
« Le génocide perpétré par Israël se poursuit sans relâche à Gaza », a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty.
Israël, ajoute-t-elle, « impose délibérément des conditions de vie conçues pour entraîner la destruction physique » des Palestiniens.
Selon Amnesty, des centaines de Palestiniens ont été tués ou blessés en tentant d’accéder à l’aide humanitaire, que ce soit sur des points de distribution militarisés ou sur le chemin des convois.
- Aide détournée, blocus renforcé
L’organisation dénonce un « dispositif militarisé d’aide humanitaire », mis en œuvre par l’ONG américaine Gaza Humanitarian Foundation (GHF), qui non seulement ne répond pas aux besoins urgents de la population, mais s’apparente désormais à « un piège mortel pour des Palestiniens affamés et désespérés ».
L’aide qui parvient à Gaza reste extrêmement limitée, souligne Amnesty, précisant que des centaines de camions humanitaires sont bloqués à l’extérieur de l’enclave, en attente d’un permis d’entrée israélien.
L’ONG affirme qu’Israël a transformé la recherche d’aide en une condamnation à mort, tout en interdisant aux Nations Unies et aux agences humanitaires internationales d’acheminer nourriture, carburant et abris.
Malgré l’indignation mondiale et trois décisions contraignantes de la Cour internationale de Justice (CIJ), Amnesty déplore qu’Israël continue d’ignorer les injonctions internationales en refusant l’accès humanitaire sans entrave.
– Les enfants en première ligne
Amnesty souligne également l’impact dévastateur de la guerre israélienne sur les enfants de Gaza.
Depuis octobre 2023, au moins 66 enfants sont morts directement de causes liées à la malnutrition, tandis que beaucoup d’autres ont succombé à des maladies évitables aggravées par la faim, déplore l’organisation.
Parmi les victimes figure Jinan Iskafi, une fillette de quatre mois décédée en mai de déshydratation sévère et de malnutrition, sa famille n’ayant pas pu obtenir de lait infantile spécialisé en raison du blocus, précise le rapport.
Dans les hôpitaux de la ville de Gaza et de Khan Younès, les médecins rapportent que près de 15 % des enfants examinés quotidiennement présentent des signes de malnutrition sévère ou modérée, et beaucoup sont réhospitalisés après une première prise en charge, les conditions de vie dans les camps de déplacés s'étant détériorées.
Un pédiatre décrit la situation comme « réellement sans précédent », tandis qu’un autre alerte sur les séquelles cognitives et psychologiques à long terme que risquent les enfants.
Le personnel médical lui-même est en grande difficulté, souvent déplacé et sous-alimenté.
« Nous essayons de sauver des vies… mais une fois les patients sortis, nous avons très peu de moyens d’agir », a confié un médecin à Amnesty.
– Une complicité internationale dénoncée
Amnesty pointe aussi du doigt l’inaction de la communauté internationale face au génocide en cours à Gaza, avertissant que le soutien implicite ou explicite aux agissements israéliens pourrait engager la responsabilité de certains États.
« Les États doivent sortir de leur inertie et honorer leurs obligations légales », a déclaré Callamard, appelant à une suspension immédiate de toute aide militaire à Israël, à l’interdiction du commerce et des investissements liés à des violations des droits humains, ainsi qu’à des sanctions ciblées contre les responsables israéliens impliqués dans des crimes internationaux.
L’organisation appelle à une pleine coopération avec la Cour pénale internationale (CPI), qui a délivré en 2024 des mandats d’arrêt contre des dirigeants israéliens pour crimes de guerre à Gaza.
« Non seulement la communauté internationale a échoué à stopper ce génocide, mais elle a aussi laissé Israël inventer de nouveaux moyens de détruire les vies palestiniennes », a fustigé Callamard.
En dépit des appels mondiaux à un cessez-le-feu, l’armée israélienne poursuit une guerre qualifiée de génocidaire contre Gaza, ayant déjà fait plus de 57 000 morts, majoritairement des femmes et des enfants, depuis octobre 2023.
En novembre dernier, la CPI a émis des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis à Gaza.
Israël est également visé par une procédure pour génocide devant la Cour internationale de Justice pour sa guerre contre l’enclave palestinienne.
* Traduit de l'Anglais par Adama Bamba