Guadeloupe : L’auteur du tableau montrant Macron décapité mis en examen
- Le peintre Blow voulait dénoncer le non-lieu prononcé par la justice française dans l'affaire du chlordécone

France
AA / Tunis / Fatma Ben Amor
Le peintre guadeloupéen Blow, auteur d'un tableau représentant la tête décapitée d'Emmanuel Macron tenue à bout de bras par un homme noir, a été mis en examen mardi, a rapporté Guadeloupe La 1ère.
Blow a comparu devant le juge d'instruction au Tribunal correctionnel de Pointe-à-Pitre, pour l'affaire du tableau intitulé "Non-lieu" qu'il a réalisé et présenté dans l'exposition “Exposé.e.s au chlordécone", en janvier dernier. Le tableau a été présenté aux côtés de ceux de 44 autres artistes, lors d’une exposition collective sur le chlordécone au Centre des arts de Guadeloupe. L’artiste avait expliqué que son œuvre était "la colère d’un Guadeloupéen (…) exprimant sa frustration". Il voulait dénoncer le non-lieu prononcé par la justice française dans l'affaire du chlordécone, un pesticide ultra-toxique utilisé pendant plus de vingt ans dans les bananeraies en Guadeloupe et Martinique.
L'artiste a été mis en examen, après une plainte du président Macron, pour "provocation ou incitation à commettre un crime par le biais d'un support sans que cela ne soit suivi d'effets". Blow avait été entendu le 20 février dernier au commissariat de Pointe-à-Pitre, dans le cadre de la plainte contre X d'Emmanuel Macron.
"Cela remet encore une fois pour moi en doute toute cette légitimité de gérer la vie des gens, ce que l'on fait, ce que l'on pense, comment on doit le faire et cela me pose problème dans ma souveraineté guadeloupéenne d'être jugé sur des choses comme cela, qui n'ont aucun sens pour moi", a indiqué Blow cité par Guadeloupe La 1ère.
Son avocate, Me Evita Chevry, dénonce, elle, une provocation. "Porter plainte contre Blow, je l'ai vécu comme une sorte de provocation. Vouloir poursuivre un artiste qui a exprimé son sentiment par rapport au non-lieu à la suite de l'affaire du chlordécone, c'est de la provocation et les avocats seront là pour réagir", a-t-elle déclaré, citée par le même média.
Le chlordécone est un pesticide ultra-toxique, utilisé massivement dans les bananeraies en Guadeloupe et en Martinique à partir de 1972 pour lutter contre le charançon de la banane, un insecte qui détruisait les cultures. La France a fini par l’interdire en 1990, puis l'a autorisé aux Antilles jusqu’en 1993 par deux dérogations successives.
Selon Le Monde, c'est à partir du début des années 2000, qu'on a découvert que le chlordécone, qui passe dans la chaîne alimentaire, avait non seulement contaminé les sols, mais aussi les rivières, une partie du littoral marin, le bétail, les volailles, les poissons, les crustacés, les légumes-racines et la population elle-même.
En 2006, plusieurs associations martiniquaises et guadeloupéennes avaient déposé plainte pour "empoisonnement, mise en danger de la vie d’autrui et administration de substance nuisible". Une information judiciaire avait été ouverte au tribunal judiciaire de Paris en 2008. La justice a prononcé un non-lieu en 2023.