France Télévisions : la Grande Mosquée de Paris saisit l’Arcom pour des propos jugés stigmatisants sur les musulmans
-Chems-eddine Hafiz a signalé à l’Arcom des déclarations de la directrice de la rédaction nationale » du groupe France Télévisions Nathalie Saint-Cricq, tenues sur franceinfo, estimant qu’elles établissent un amalgame entre musulmans et antisémitisme
Istanbul
AA / Istanbul / Serap Dogansoy
Chems-eddine Hafiz a signalé à l’Arcom des déclarations de la directrice de la rédaction nationale du groupe France Télévisions Nathalie Saint-Cricq, tenues le 3 décembre sur franceinfo, estimant qu’elles établissent un amalgame entre musulmans et antisémitisme
La séquence incriminée a été diffusée le 3 décembre dans l’émission Tout est politique. Interrogeant le député Alexis Corbière sur les accusations récurrentes d’antisémitisme visant son ancienne formation politique, Nathalie Saint-Cricq a déclaré, après que son interlocuteur eut affirmé que « l’antisémitisme est chose sérieuse », que « la quête du vote musulman » l’était également.
Alexis Corbière a immédiatement contesté ce rapprochement, demandant à la journaliste d’en expliquer le lien. Interrogée sur l’idée que des responsables politiques pourraient tenir des propos antisémites afin de séduire un électorat musulman, Nathalie Saint-Cricq a répondu par l’affirmative, évoquant l’existence « d’études ». L’ancien député a alors jugé ces propos « intolérables », estimant que « les musulmans n’ont pas besoin qu’on leur tienne des propos antisémites pour voter pour quelqu’un ». La journaliste a ensuite précisé qu’elle ne visait pas les musulmans, mais « ceux qui croient » qu’un tel discours permettrait de les rallier.
Dans sa réaction, Chems-eddine Hafiz a qualifié ces déclarations d’« extrêmement graves » et annoncé un signalement auprès de l’Arcom, dénonçant une stigmatisation des musulmans de France. Plusieurs responsables politiques de gauche ont également réagi. Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a salué « la réponse immédiate et claire » d’Alexis Corbière, affirmant qu’« il n’y a aucun lien mécanique entre musulmans et antisémitisme ». Le coordinateur national de La France insoumise, Manuel Bompard, a dénoncé pour sa part un « amalgame islamophobe ».
Dans le débat suscité par cette séquence, le journaliste Sylvain Attal a interrogé publiquement le recteur de la Grande Mosquée de Paris en ces termes : « Tous les musulmans ne sont pas antisémites, loin de là. Mais pouvez-vous nier qu’il existe des préjugés antijuifs très répandus dans ces milieux ? »
En réponse, Chems-eddine Hafiz a affirmé que l’antisémitisme devait être combattu « partout » et a rejeté toute essentialisation des musulmans. Il a rappelé que, selon lui, l’islam proscrit l’antisémitisme, citant un verset du Coran affirmant la foi des musulmans dans l’ensemble des prophètes, dont Moïse et Jésus, sans distinction. Le recteur a également dénoncé ce qu’il qualifie de « campagne médiatique » visant les musulmans de France et a estimé qu’ils ne pouvaient être rendus collectivement responsables de l’antisémitisme, qu’il décrit comme un phénomène ancien et enraciné dans les sociétés européennes.
Parallèlement, le Collectif contre l’islamophobie en Europe (CCIE) a appelé, sur le réseau social X, basé aux Etats-Unis, à effectuer des signalements auprès de l’Arcom. Le collectif estime que la séquence concernée établit un lien entre « vote musulman » et antisémitisme, constituant selon lui un message « stigmatisant » et portant atteinte à la neutralité du service public audiovisuel, compte tenu des fonctions de la journaliste au sein de France Télévisions.
Sollicité, l’Arcom n’a pas réagi dans l’immédiat.
Ce n’est pas la première fois que Chems-eddine Hafiz saisit le régulateur de l’audiovisuel. En septembre, il avait déjà engagé des démarches similaires après des propos diffusés sur BFMTV, franceinfo TV et CNews, qu’il jugeait stigmatisants à l’égard des musulmans.
