France : Noyés par le travail, les magistrats font grève
- Outre la surcharge de travail, la précarité et la vétusté matérielle, les syndicats dénoncent les attaques à l'indépendance de la Justice.

France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Un an après leur tribune parue dans le journal « Le Monde » et dénonçant leurs conditions de travail, les magistrats et greffiers français sont en grève ce mardi.
Suite à l'appel de l'Union syndicale des magistrats (USM) et le Syndicat de la magistrature (SM), des centaines de magistrats et autres personnels de la Justice, ont exprimé leur colère par le report des audiences ainsi que des manifestations dans leurs juridictions.
Par voie de communiqué commun publié ce lundi, les deux syndicats majoritaires ont dénoncé le "dilemme" auxquels les magistrats sont confrontés : "juger vite mais mal, ou juger bien mais dans des délais inacceptables".
Faisant référence à leur tribune publiée l'année dernière et la mobilisation qui s'est ensuivie, ils ont établi que "la mobilisation aura permis une libération de la parole des professionnels sur leurs conditions de travail déplorable, mais également une prise de conscience sur l'état général de la Justice".
Déplorant la communication du gouvernement et du ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti, les deux syndicats ont dénoncé "les coups de com" de ces derniers, qui s'opposent à la "réalité sur le terrain", l'USM et le SM faisant état d'"audiences surchargées qui se terminent trop souvent au milieu de la nuit", de "délais au-delà du raisonnable", de "jugements non expliqués", de "décisions exécutées plusieurs mois - voire plusieurs années - après".
Les magistrats ont également déploré la vétusté des tribunaux et des "logiciels datant des années 1990" rendant difficile voire parfois impossible le bon suivi des dossiers judiciaires, ainsi que leur surcharge de travail les menant à "renoncer à leurs congés et à leurs formations pour rédiger leurs décisions".
En outre, les magistrats ont également fait état de "précarisation et relégation" des fonctionnaires et greffiers "qui renoncent à se faire payer leurs heures supplémentaires".
Faisant référence aux recrutements prévus de magistrats en fonctionnaires pour 2023, les deux syndicats dénoncent leur "large insuffisance" et l'absence d'un "plan clair d'action" de la part de l'exécutif, face à "l'urgence de la situation", alors que le ministre de la Justice refuse une expertise sur le "risque grave auquel sont exposés les personnels" noyés par la surcharge de travail et l'inadéquation des moyens mis en place, tant au niveau du personnel que du matériel.
"Nous exigeons que les droits de la défense soient réellement accessibles à toutes et tous", lit-on encore dans le communiqué, appelant les personnels de la Justice à se mobiliser ce mardi 22 novembre, pour "dénoncer la justice au rabais", notamment à travers le report de "toutes les audiences" et la participation "à des rassemblements dans leurs juridictions".