France : manifestation contre les livraisons d’armes et de composants à usage militaire vers Israël
– Des manifestants se sont rassemblés à l’aéroport Charles-de-Gaulle pour dénoncer le rôle de la France dans l’acheminement de matériel militaire ou dual à l’armée israélienne.
Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Une manifestation s’est tenue samedi à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle contre les exportations françaises d’armement et de composants à usage militaire à destination d’Israël. Le rassemblement, organisé à l’appel de syndicats et d’associations, visait à alerter sur le rôle logistique que joue la France dans l’alimentation de l’armée israélienne, notamment via son principal aéroport international.
Par voie de communiqués, les organisateurs — dont la CGT 93, la CGT Roissy, FO, Solidaires, SUD Aérien et la Ligue des droits de l’Homme — ont dénoncé le transit par Roissy de matériel militaire ou de composants dits « à double usage », c’est-à-dire utilisables dans le domaine civil aussi bien que dans des systèmes d’armement. Ils exigent l’arrêt immédiat de toutes les exportations françaises pouvant contribuer aux opérations militaires israéliennes, y compris celles qui ne relèvent pas juridiquement du matériel militaire au sens strict.
Cette mobilisation intervient dans un contexte de vives critiques contre la politique d’exportation française. Une récente enquête de Disclose a révélé qu’un lot d’alternateurs électromécaniques fabriqués par la société française Sermat devait être livré lundi 20 octobre à l’entreprise israélienne Elbit Systems. Ces pièces sont destinées à des drones Hermes 900, massivement utilisés à Gaza. Depuis 2023, Sermat a déjà livré 29 alternateurs et 171 actionneurs à ce même client, pour un montant supérieur à 840 000 euros.
Disclose souligne que ces composants, bien qu’utilisés dans des systèmes d’armes, ne sont ni classés comme matériel militaire ni comme biens à double usage par les autorités françaises, échappant ainsi à toute obligation de licence d’exportation. Ce régime dérogatoire, en vigueur depuis 2012, est désormais au cœur des critiques.
Les manifestants ont aussi rappelé que plusieurs pays européens — Espagne, Pays-Bas, Belgique, Italie — ont suspendu leurs exportations militaires vers Israël depuis l’intensification de la guerre à Gaza. La France, elle, a continué d’autoriser des ventes d’armement (pour un montant de 27,1 millions d’euros en 2024) ainsi que des biens à double usage pour un total de 74 millions d’euros.
Depuis janvier 2024, la Cour internationale de justice estime qu’un risque de génocide pèse sur la population palestinienne de Gaza. En France, l’association JURDI a saisi le Conseil d’État et déposé un recours indemnitaire, accusant le gouvernement de manquement à ses obligations internationales en n’ayant pas suspendu les transferts de matériel militaire ou assimilé.
La manifestation de Roissy s’inscrit dans une stratégie de pression grandissante mêlant recours juridiques, mobilisations syndicales et appels d’ONG, sur fond de contradictions apparentes entre la diplomatie française — qui a reconnu l’État palestinien dans le cadre d’une initiative conjointe avec l’Arabie saoudite — et la continuité des exportations d’équipements utilisés dans les bombardements à Gaza.
Pour rappel, un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, entré en vigueur le 10 octobre 2025, a été établi sous l’impulsion des États-Unis et de son président Donald Trump. Il vise à mettre fin à deux années de guerre meurtrière d'Israël sur l'enclave palestinienne.
Le conflit a été marqué par des bombardements massifs de l’armée israélienne sur la bande de Gaza, provoquant la mort de plus de 67 000 personnes, selon les autorités locales, en majorité des enfants et des femmes.
Israël est par ailleurs visé par une procédure en cours devant la Cour internationale de justice, où plusieurs États accusent Tel-Aviv de violations graves du droit international et d’« actes de nature génocidaire ». La Cour pénale internationale a également délivré des mandats d’arrêt contre le Premier ministre Benjamin Netanyahu et un ancien ministre israélien pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, notamment pour l’usage présumé de la famine comme méthode de guerre.
