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France : Les « travaux d’intérêts éducatif » font craindre un ciblage des jeunes des quartiers populaires

- Dans une interview accordée à Anadolu, le député LFI, Carlos Martens Bilongo, dénonce « une mesure purement raciale »

Feiza Ben Mohamed  | 01.02.2024 - Mıse À Jour : 01.02.2024
France : Les « travaux d’intérêts éducatif » font craindre un ciblage des jeunes des quartiers populaires

France

AA/Paris/Feïza Ben Mohamed

Le discours de politique générale prononcé mardi par le Premier ministre Gabriel Attal au palais Bourbon, a été l’occasion pour le nouveau chef de gouvernement de dérouler sa feuille de route pour les mois à venir.

De nombreux thèmes ont été mis en exergue, parmi lesquels le travail, la santé, mais également l’éducation, la sécurité ou encore l’écologie.

Au cours de sa prise de parole, Gabriel Attal a dévoilé une nouvelle mesure qu’il souhaite mettre en œuvre, celle de « travaux d’intérêt éducatif » pour les jeunes mineurs de moins de 16 ans.

« Je ne me résoudrai pas à ce qu'on préfère attendre avant de donner une lourde peine, alors que bien souvent, c'est très tôt qu'il aurait fallu agir », a-t-il plaidé face à la représentation nationale. estimant que « dès le plus jeune âge, il faut revenir à un principe clair : tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter ».

Cette annonce, alors que jusqu’à présent, la loi ne permet que d’imposer des travaux d’intérêt général pour les plus de 16 ans, provoque néanmoins de vives inquiétudes, alors que la France a connu des révoltes urbaines conduisant à une réponse pénale particulièrement sévère, après la mort de Nahel en juin dernier.

Dans une interview accordée à Anadolu, le député LFI (La France Insoumise), Carlos Martens Bilongo dénonce « une mesure purement raciale ».

« Les quartiers populaires, on n’a pas envie d’y mettre de l’argent, on n’a pas envie d’y investir (…) ce sont des zones qui sont abandonnées, qui sont victimes de discriminations (…) et c’est ça le vrai sujet », relève l’élu du Val d’Oise.

Et de poursuivre : « On se rend compte que quand les gens se révoltent et font des blocages, on va écouter les agriculteurs, mais on ne va pas écouter les gens de banlieue ».

Il estime, par ailleurs, qu’il « faut entendre » ces jeunes des quartiers populaires « dès lors où ils se sentent abandonnés (…) ou ont l’image d’une injustice ».


- "Sortir d’une zone grise"


Pour sa part, la députée Renaissance (majorité présidentielle) des Yvelines, Nadia Hai, considère, dans une interview accordée à Anadolu, que cette mesure est légitime et balaie l’accusation de stigmatisation formulée par la gauche.

« Il n’y a pas plus stigmatisant que d’attribuer une mesure à un territoire en particulier. le fait de dire qu’on stigmatise, qu’on vise les quartiers prioritaires de la ville, c’est justement admettre que la délinquance est là où ils se situent », plaide l’ancienne ministre de la ville d’Emmanuel Macron.

Elle rappelle, à cet effet, que « les émeutes, les violences urbaines, ont eu lieu partout » et ces « travaux d’intérêt éducatif » s’adresseront « à tous les jeunes de moins de 16 ans » sans exception.

Selon Nadia Hai, ce dispositif permettra « de sortir d’une zone grise » avec « des enfants qui commettent des délits qui doivent être sanctionnés mais qui ne peuvent pas être sanctionnés à la hauteur d’une peine de prison ».

Pour la député de la majorité, « il faut quand même avoir une sanction à la hauteur du préjudice commis » et la mesure annoncée par Gabriel Attal répond à ce besoin de « poser un cadre éducatif qui permettra à l’enfant de se remettre dans le cadre du droit et de pouvoir avancer potentiellement en lui redonnant des bases ».

Pour rappel, les émeutes qui ont eu lieu en France entre le 27 juin et le 7 juillet 2023 en réaction à la mort de Nahel, 17 ans, abattu par un policier à Nanterre, ont conduit à 3 847 procédures pénales menées à leur terme avec des sanctions, dont 1 498 comparutions immédiates.

La réponse apportée par les pouvoirs publics en la matière avait été qualifiée de démesurée avec des peines particulièrement sévères, y compris pour des jeunes inconnus des services de police et de justice.

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