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France: Les emplois réservés aux descendants de "Harkis","provocation"ou"différence de traitement"?

- La Métropole Nice Côte d’azur (sud-est) a décidé début octobre de réserver des emplois aux descendants de Harkis - Algériens ayant combattu aux côtés de la France pendant la Guerre d'indépendance d'Algérie-

Lassaad Ben Ahmed  | 02.11.2017 - Mıse À Jour : 03.11.2017
France: Les emplois réservés aux descendants de "Harkis","provocation"ou"différence de traitement"?

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AA/Nice/Fawzia Azzouz

Alors que la Métropole Nice Côte d’azur (sud-est) a décidé début octobre de réserver des emplois aux descendants de Harkis - Algériens ayant combattu aux côtés de la France pendant la Révolution algérienne, - communément appelé "Guerre d’Algérie"-, Anadolu est allée à la rencontre d’habitants pour recueillir leurs sentiments sur cette mesure.

Le 9 octobre dernier, Nice a été la première grande ville de France à prendre une telle mesure en faveur des Harkis, justifiant cette décision par la persistance de leurs difficultés d'insertion, plus d'un demi-siècle après le déclenchement de la Révolution algérienne.

Une délibération en ce sens a été adoptée à l'unanimité par le conseil de la métropole Nice Côte d'Azur qui regroupe 49 communes dans un département, les Alpes-Maritimes, où la communauté harkie est estimée à environ 20.000 personnes.

Désormais, chaque année, un certain nombre d‘emplois de catégorie B et C reviendront aux descendants de Harkis, «sans concours ni condition d'âge».

«Le manque de reconnaissance et la persistance de difficultés d'insertion rencontrées par la première génération et leurs descendants sont encore perçues comme des discriminations à l'encontre de la communauté des Harkis», a justifié la métropole Nice Côte d'Azur ajoutant que le nombre d'emplois réservé sera défini chaque année par un comité en fonction des besoins et des profils de demandeurs.

Une décision qui ne fait toutefois pas l'unanimité pour les habitants de la Côte d'Azur, interrogés par Anadolu.

Très vite, au fil des discussions, deux notions reviennent. Les langues se délient et ce qui est qualifié de « différence de traitement » par les uns, est perçu par d’autres comme une véritable « provocation ».

Nabil a grandi près de Nice, il est aujourd’hui avocat et avoue avoir lui-même « bénéficié du système de discrimination positive » lorsqu’il était étudiant, mais il estime que le fait de « réserver des emplois aux enfants de Harkis tout en ne prévoyant rien pour les enfants d’algériens massacrés pendant la guerre d’Algérie est une mesure purement politique ».

Pour lui, les « harkis sont des agitateurs qui s’organisent méthodiquement en France via des associations pour réclamer des réparations » alors que du côté des « Algériens qui ont combattu contre le système colonial français, rien n’est mis en place ».

Il dénonce une « différence de traitement » et raconte avoir régulièrement eu à subir « des contrôles au faciès avec parfois des comportements provocateurs de la part des forces de l’ordre ».

Si dans un premier temps l’octroi de ce quota d’emplois réservés aux harkis, pose le problème des compétences, la mesure est surtout perçue comme « une provocation » par certains jeunes à l’image de Malik, jeune trentenaire, franco-algérien.

Il vit à Nice et nous raconte que son grand-père est « décédé pendant la guerre d’Algérie, pour avoir combattu la colonisation française ».

Lorsqu’il a pris connaissance de cette mesure en faveur des Harkis, Malik a été « déçu mais pas surpris ». Il estime que le contexte politique à Nice est tel que « les harkis et pieds-noirs sont érigés en héros de la guerre d’Algérie » tandis que les Algériens indépendantistes seraient « perçus comme des traitres, alors que c’est tout l’inverse ! ».

« Il y a des discours qui font mal », lâche-t-il en précisant que « dire qu’on donne des emplois aux harkis en signe de reconnaissance et pour leur montrer qu’ils sont français signifie qu’on considère les autres algériens comme n’étant pas français ». Le sujet est électrique.

Sur la promenade des Anglais à Nice, un monument a été érigé en 2012 par le maire Christian Estrosi en mémoire des Harkis et Pieds-noirs. On peut y lire : « Hommage aux Français d’Algérie de toutes confessions. Ils ont construit un pays, l’ont quitté dans la douleur en 1962. Arrivés en nombre sur la Côte d’Azur, ils ont participé à son essor et à sa réussite. Ne sont pas oubliés les Français du Maroc et de Tunisie ».

La sépulture, faisant l’apologie de la colonisation, avait créé l’émoi dans les rangs des français issus de l’immigration maghrébine.

Il faut préciser que dans le sud de la France et à fortiori dans les Alpes-Maritimes, les pieds-noirs et harkis représentent une très forte communauté et une réserve de voix conséquente pour les partis-politiques de droite, voire d’extrême-droite.

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