Politique, Monde

France : l’UJFP dénonce “une stratégie du gouvernement pour museler toute parole favorable aux Palestiniens”

– Richard Wagman, de l’Union juive française pour la paix (UJFP), réagit à la suspension d’un académicien par une université lyonnaise.

Ümit Dönmez  | 05.12.2025 - Mıse À Jour : 05.12.2025
France : l’UJFP dénonce “une stratégie du gouvernement pour museler toute parole favorable aux Palestiniens”

Ile-de-France

AA / Paris / Ümit Dönmez

La suspension du professeur Julien Théry par l’université Lyon-II suscite des réactions jusqu’au sein de la communauté juive. Richard Wagman, représentant de l’Union juive française pour la paix (UJFP), estime que cette décision n’est pas un cas isolé, mais qu’elle s’inscrit dans une dynamique politique plus large à “museler les voix critiques de la politique israélienne, notamment celles qui dénoncent les massacres en cours à Gaza”.

Interrogé par Anadolu, Richard Wagman dénonce ce qu’il qualifie de “descente aux enfers de l’intelligentsia française” et de “campagne orchestrée par le gouvernement, les médias dominants et certaines institutions universitaires pour réduire au silence toute parole favorable aux Palestiniens”.

Julien Théry, historien et enseignant-chercheur à Lyon-II, a été suspendu le 3 décembre 2025 après la publication sur Facebook d’un visuel mentionnant “20 génocidaires à boycotter”, en réaction à une tribune de personnalités publiques parue dans Le Figaro, demandant au Président français Emmanuel Macron de ne pas reconnaître l’État palestinien tant que les otages détenus à Gaza ne seraient pas libérés. La LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) avait signalé cette publication, la jugeant antisémite. L’université a alors pris une mesure de suspension à titre conservatoire et a saisi le procureur.

Richard Wagman affirme que cette suspension n’est pas fondée : “Ce professeur n’est pas antisémite. Il critique la politique française au Proche-Orient, comme le font de nombreuses associations juives, y compris la nôtre.” Il ajoute que “la direction de l’université agit par peur, en suivant le mouvement, alors qu’elle sait très bien qu’aucune infraction réelle n’a été commise”.

Le responsable associatif accuse la LICRA, à l’origine du signalement, de ne plus incarner ses valeurs historiques. “C’était une organisation progressiste née dans la foulée de l’affaire Dreyfus. Aujourd’hui, elle est devenue l’avatar de la politique israélienne en France, un apologiste du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) et des crimes à Gaza”, déclare-t-il. Selon lui, ce glissement contribue à disqualifier toute critique d’Israël sous le soupçon d’antisémitisme.

Il déplore également l’attitude du gouvernement français, qu’il accuse de tenter “d’intimider les intellectuels critiques”. Il évoque un contexte de surveillance croissante et de criminalisation de la solidarité avec la Palestine, en particulier dans les universités. “La France vend des composants militaires à Israël, et elle ne tolère plus les voix qui s’élèvent contre ce partenariat. Il ne s’agit pas d’un débat d’idées, mais d’une stratégie d’étouffement.”

L’UJFP est l’un des signataires d’une tribune publiée sur le Club Mediapart en soutien à Julien Théry. Ce texte dénonce une “campagne de haine” et une atteinte grave aux libertés universitaires. “Cette tribune vise à rappeler le droit à l’expression, à la recherche, à la publication. Ce sont des droits fondamentaux que le gouvernement veut restreindre dès qu’il s’agit de Palestine”, explique Wagman.

L’affaire Théry intervient dans un climat tendu, où la dénonciation du "génocide à Gaza" est de plus en plus fréquemment assimilée à de l’antisémitisme. Pour Richard Wagman, cette confusion est délibérément entretenue afin de “délégitimer les soutiens aux droits des Palestiniens”.

“Franchement, je ne suis pas fier de mon pays en ce moment”, conclut-il, évoquant un climat de plus en plus autoritaire. “La France se comporte comme une république bananière qui ne tolère pas la dissidence.”


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