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Des universitaires du monde entier dénoncent une institutionnalisation de l'islamophobie en France

Ekip  | 23.02.2022 - Mıse À Jour : 23.02.2022
Des universitaires du monde entier dénoncent une institutionnalisation de l'islamophobie en France

France

AA/Paris/Fatih KARKAYA

Une trentaine d’universitaires du monde entier dénoncent, dans une lettre adressée à Emmanuel Macron et dont Anadolu a reçu une copie, "l’institutionnalisation de l'islamophobie" en France.

Ces universitaires, spécialisés notamment dans les études islamiques, les études françaises et francophones, les études religieuses, l'histoire, la sociologie, l'anthropologie et les sciences politiques et plus encore, expriment « leur profond choc face à l’institutionnalisation de l'islamophobie qui a caractérisé le travail d’Emmanuel Macron ».

D’après les informations obtenues par Anadolu, le courrier a été rédigé et envoyé mi-février en anglais et devait être publié dans des médias anglophones. Mais à l’approche des élections présidentielles en France, ces médias ont considéré « la publication de cette lettre comme une tentative d'ingérence aux élections et ont refusé de publier ».

Toujours selon les informations d’Anadolu, les signataires sont en discussion avec des médias français pour que la lettre soit relayée à grande échelle.

  • Une société de plus en plus islamophobe

Dans cette lettre, les signataires ne pèsent pas les mots pour critiquer la politique menée par Emmanuel Macron. « En 2017, vous avez été élu sur la promesse d'une société inclusive loin du déclinisme et du sectarisme antimusulman de Marine Le Pen. Malheureusement, presque dès que vous êtes entré à l'Elysée, ce que nous avons vu était exactement le contraire. Sous votre direction, la France est devenue une société de plus en plus islamophobe et dangereusement répressive. Soyons francs ; vous êtes bien plus dangereux pour la liberté française que ces « islamistes » que votre gouvernement paranoïaque voit derrière chaque hijab ou « barbe salafiste ». En effet, contrairement à eux, vous diriger en réalité l'État français et possédez donc les moyens pour supprimer des libertés », soulignent les signataires parmi lesquels on trouve des professeurs français tels que l’islamologue et politologue François Bug et le sociologue Raphaël Liogier.

Rappelant « la loi contre le séparatisme islamiste » jugée « autoritaire et avalée de force par les représentants des organisations musulmanes françaises », les universitaires dénoncent aussi « le projet sur la sécurité globale, qui s'attaque littéralement à toutes les libertés civiles ».

Pour les signataires de la lettre il s’agit « d’un exclusivisme antimusulman qui constitue en réalité une violation de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l'État ».

  • Grand Mufti autoproclamé

Qualifiant Emmanuel Macron de « grand mufti autoproclamé de France », les universitaires protestent sa volonté de « dicter la doctrine islamique aux musulmans français, tout en traitant l'islam de manière discriminatoire, comme la seule religion qui devrait être disciplinée de cette manière par l'État ».

Regrettant « l'amalgame constant de l'islam avec une menace pour la sécurité et la perception des musulmans comme une population dangereuse nécessitant un contrôle constant de police », les signataires rappellent que le ministre de l’Intérieur précédent Christophe Castaner entendait par signes de radicalisation religieuse, la « pratique religieuse rigoriste », « porter la barbe », « une pratique régulière et ostentatoire de la prière rituelle », « la marque de friction de la tabaâ sur le front d'un musulman ».

Estimant que ces pratiques « ne peuvent être décrit comme l'extrémisme religieux ou les premiers signes de la radicalisation djihadiste », ils protestent contre le fait « qu’ils soient néanmoins répertoriés sur diverses pages Web du gouvernement français de « anti-terrorisme » dans une démonstration honteuse de sectarisme et d'ignorance envers les musulmans et l'islam ».

Par ailleurs, les signataires regrettent « une approche antiscientifique de la critique, notamment en ce qui concerne l'étude de l'impact du racisme structurel et de l'islamophobie » et les discours complotistes du ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer et la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal.

  • Dissolutions des associations

Dénonçant les taxations de « radicalisation », « d'extrémisme », « d'islam politique » ou « d'islamisme », les musulmans qui tentent de lutter contre l'injustice et la discrimination, les signataires rappellent aussi que le ministre de l’Intérieur actuel, Gérald Darmanin « a lancé un assaut de grande envergure contre les organisations civiques antiracistes, anti-islamophobie et de défense des droits humains telles que CCIF et le CRI.

Bouleversés par l’image de la France à l’étranger, les universitaires demandent également à Macron « d’accepter les critiques d’autant plus qu’il soutien une flopée de régimes autocratiques et de dictatures violentes dans le monde arabe ».

Attirant l’attention sur les violences et les répressions policières, les signataires rappellent aussi que « les politiques discriminatoires envers les musulmans ont été abondamment dénoncées par les plus hautes organisations de défense des droits humains et dans les enceintes internationales dont les Nations Unies ».

Accusant Macron, d’être « personnellement responsable des récentes campagnes de boycott et des manifestations de masse dans plusieurs pays à majorité musulmane », les universitaires regrettent « la mise en danger des compatriotes musulmans en alimentant la violence terroriste à travers une islamophobie d'État qui fournit à des gens comme DAECH l'alibi parfait pour attaquer la France ».

Les universitaires observent avec tristesse « la France qui devient tristement une société de plus en plus raciste et islamophobe » avec la montée en puissance, notamment d’Eric Zemmour et imputent la responsabilité une fois de plus à Emmanuel Macron.

« Vous n'avez pas le droit de vous positionner comme plus éclairé et plus tolérant envers l'islam qu’Éric Zemmour ou Marine Le Pen, ou de prétendre être l'alternative au sectarisme d'extrême droite. Parce que vous êtes devenu l'un d'entre eux », fustigent encore les signataires.

Enfin, les universitaires appellent au bon sens et « exhortent Macron à changer ses discours et ses politiques sur l'islam et les musulmans avant de blesser et de fracturer davantage la société française ».

« C'est en fait facile : il suffit de traiter l'Islam et les musulmans exactement de la même manière, ni plus ni moins, que vous traitez les autres religions », conseillent d’ailleurs les universitaires.

Enfin pour terminer, les universitaires rappellent les obligations du président français « par rapport à la laïcité française et la loi de 1905 » est espèrent Macron « respectera les grands principes de la République, notamment la laïcité et l'égalité de tous quelle que soit leur religion ».

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