AA / Tel-Aviv / Enes Canli et Faruk Hanedar

Après plusieurs mois de manifestations pour réclamer la conclusion d’un accord visant à ramener les otages israéliens détenus à Gaza, de nombreux Israéliens estiment que l’accord de cessez-le-feu et d’échange de prisonniers dans l’enclave a été obtenu grâce au président américain Donald Trump, malgré l’opposition du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

Alors que les attaques israéliennes contre la bande de Gaza, qualifiées de génocidaires par certains observateurs, se poursuivaient depuis deux ans, les proches des otages se rassemblaient régulièrement à Tel-Aviv, sur la place dite des « Otages », pour exiger un cessez-le-feu et un échange de prisonniers.

À quelques heures de la libération annoncée des otages israéliens, les familles, leurs soutiens et les opposants au gouvernement Netanyahu se sont de nouveau réunis sur la même place pour saluer l’accord conclu.

Lors du rassemblement, auquel ont participé Steve Witkoff, envoyé spécial du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, ainsi que Jared Kushner et Ivanka Trump, les manifestants israéliens ont scandé des slogans hostiles à Benjamin Netanyahu et à son gouvernement.

Lorsque Witkoff a évoqué le rôle de Netanyahu dans la conclusion de l’accord, la foule a réagi par des huées nourries.
À plusieurs reprises, son discours a été interrompu par les manifestants, qui ont crié en hébreu : « Honte à toi ! Honte, honte, honte ! » en signe de protestation contre le Premier ministre israélien.

Tenant Benjamin Netanyahu pour responsable de la poursuite des attaques contre la bande de Gaza depuis deux ans, les Israéliens Michel et Imanuel Yelin ont déclaré qu’ils commenceraient à œuvrer au renversement du gouvernement actuel une fois les otages rentrés.

- « Le moment est venu de changer de gouvernement. »

Parmi les manifestants présents à Tel-Aviv, Michel a accusé le gouvernement israélien et le Premier ministre Benjamin Netanyahu d’avoir saboté toutes les négociations menées jusqu’à présent en vue d’un cessez-le-feu et d’un accord d’échange d’otages à Gaza, estimant que c’est pour cette raison que la guerre se poursuit depuis deux ans.

Affirmant qu’il n’y aurait pas eu de cessez-le-feu sans le président américain Donald Trump, Michel lui a exprimé sa gratitude et a déclaré : « Le moment est venu de changer de gouvernement. Ce n’est pas un bon gouvernement pour nous. Je ne pense pas qu’il ait fait quoi que ce soit de bien au cours des deux dernières années. »

Interrogé sur la manière dont il accueille l’accord, il a répondu : « Je suis très heureux que la guerre prenne fin et que tous nos otages rentrent à la maison. Mais je ne peux pas dire que je sois satisfait du fait qu’Israël n’ait joué aucun rôle dans cet accord. L’accord a été conclu par le président Trump. »

Il a été négocié avec le Qatar, qui soutient financièrement le Hamas, avec la Türkiye, qui n’aime pas Israël, et avec les dirigeants du Hamas. Nous n’avons eu notre mot à dire sur rien. »

Michel a déclaré que le Hamas continue de gouverner la bande de Gaza et possède toujours des armes, ajoutant qu’en tant qu’Israélien, il n’en est pas satisfait.

Tout en soulignant qu’Israël s’était retiré de Gaza en 2005, il a nié l’existence de décennies d’occupation et du blocus imposé à Gaza depuis près de vingt ans, affirmant que « les Palestiniens sont responsables de la guerre ».

Critiquant les sociétés du monde entier qui descendent dans la rue pour dénoncer le génocide commis par Israël — qui a tué plus de 65 000 Palestiniens dans la bande de Gaza, déplacé des centaines de milliers de personnes à plusieurs reprises et utilisé la famine comme arme — et pour exprimer leur solidarité avec les Palestiniens, Michel a déclaré : « Sortir dans la rue en criant “Free Palestine” est beau et facile. Mais apprenez l’histoire. Renseignez-vous sur toutes les propositions de paix qui ont été mises sur la table et découvrez qui les a rejetées. Ce n’était pas Israël. C’étaient les Palestiniens. Et ils l’ont fait parce qu’ils ne veulent pas qu’Israël existe. »

- « Je ne suis pas un grand partisan de Trump, mais nous devons le remercier. »

Imanuel Yelin, qui a participé à la manifestation avec une pancarte portant la photo du soldat israélien otage Nimrod Cohen dans la bande de Gaza, a expliqué qu’il vivait à Beersheva et que ses actions et manifestations en soutien aux familles des otages avaient été harcelées par les partisans du Premier ministre Netanyahu.

Selon lui, ces partisans étaient gênés par la « cause des otages », estimant qu’elle révélait les échecs de Netanyahu. Ils auraient déchiré, barbouillé ou recouvert les affiches et photos qu’il avait placées.

Interrogé sur la question de savoir si l’accord de cessez-le-feu et d’échange d’otages entre le Hamas et Israël aurait été signé sans l’intervention de Trump, Yelin a déclaré : « Je ne suis pas un grand partisan de Trump, mais nous devons le remercier. Lui seul pouvait exercer une telle pression sur Netanyahu. »

Il a ajouté qu’il était satisfait de l’accord, précisant qu’il avait été imposé à Netanyahu, et non à Israël en général.

Yelin a également estimé que cet accord ne mettrait pas fin à la présence du Hamas à Gaza, mais que l’implication de l’Autorité palestinienne et la participation d’autres pays arabes pourraient conduire à la fin de la domination du Hamas dans l’enclave.

Yelin a souligné que les élections en Israël devraient avoir lieu au plus tard dans un an, ajoutant : « J’espère que Netanyahu perdra, sinon Israël connaîtra davantage de difficultés. »

- La présence de « civils » israéliens armés sur la place attire l’attention

Lors du rassemblement, où ont pris la parole Steve Witkoff, envoyé spécial de Donald Trump pour le Moyen-Orient, ainsi que Jared Kushner et Ivanka Trump, la présence de « civils » israéliens armés a été particulièrement remarquée.

Après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu à Gaza, Witkoff, Kushner et Ivanka Trump se sont rendus à Tel-Aviv pour s’exprimer sur la place des Otages, où se tiennent chaque semaine des manifestations organisées par les familles des otages israéliens. Cette semaine-là, la mobilisation a rassemblé des centaines de milliers de participants pour célébrer l’entrée en vigueur de l’accord de cessez-le-feu et d’échange de prisonniers.

Sur la place, où les responsables américains sont montés sur scène, de nombreux Israéliens armés ont été aperçus parmi la foule, vêtus de tenues civiles et portant de longues armes à feu, se mêlant au public.

*Traduit du turc par Ben Amed Azize Zougmore