AA / Paris / Ümit Dönmez

Le chef de l'État français Emmanuel Macron affirme que l’Europe a su infléchir la position de Donald Trump sur le conflit en Ukraine.

Par voie d’un entretien accordé à « Paris Match » lors d’un déplacement à Washington, le Président français revient longuement sur ses discussions avec son homologue américain à propos de la guerre en Ukraine, sa vision des relations avec Moscou et la place de l’Europe dans la diplomatie mondiale. « Il a pris acte qu’il faut garantir la sécurité de l’Ukraine », affirme-t-il au sujet de Trump, qu’il accuse d’avoir d’abord cru à une résolution rapide du conflit. Macron évoque notamment « la scène d’humiliation du président Zelensky dans le bureau Ovale », à laquelle l’unité européenne aurait opposé une réponse forte.

Interrogé sur la possibilité de dialoguer avec son homologue russe Vladimir Poutine, Macron assume une ligne réaliste. « La diplomatie, ce n’est pas la morale », insiste-t-il. Il se dit prêt à lui serrer la main si cela peut faire avancer des négociations. « Il faut parler avec les gens », martèle-t-il, tout en affirmant que la France doit « se faire respecter » dans ces échanges. Pour rappel, Le 1ᵉʳ juillet 2025, le Président français s'est entretenu par téléphone avec Vladimir Poutine. Il s'agissait du premier contact direct entre les deux dirigeants depuis septembre 2022.

Dans son interview, le Président français plaide aussi pour que les Européens soient partie prenante à tout sommet impliquant Trump, Zelensky et Poutine. Il met en avant son expérience du dialogue direct avec les grandes puissances, et son positionnement singulier face à Trump : « Je lui parle franchement. Il est arrivé que le ton monte entre nous, mais je ne me moque jamais de lui. »

Concernant la Russie, Macron distingue le contexte actuel des relations passées, notamment sous Jacques Chirac. Selon lui, le tournant a eu lieu autour de 2007-2008, quand Poutine a commencé à mentir « sans cesse », comme l’avait aussi constaté Angela Merkel. « C’est une politique de déstabilisation systématique à l’égard de l’Europe », affirme-t-il.

Sur les tensions économiques transatlantiques, Macron note que Trump « déteste l’Europe comme entité », tout en respectant certains pays, comme la France. Il y voit une logique de puissance : « Il a surtout la volonté d’enrichir les États-Unis, et on ne peut pas le lui reprocher. »

Les déclarations d’Emmanuel Macron interviennent au cœur d’un tournant diplomatique majeur. Le 18 août, à Washington, Donald Trump a accueilli son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, entouré de plusieurs dirigeants européens – dont Emmanuel Macron – pour un sommet présenté comme décisif. Il s’agissait de consolider le soutien occidental à Kiev, en réponse aux signaux russes favorables à une reprise des pourparlers, notamment après la rencontre Trump-Poutine en Alaska le 15 août courant.

Parmi les points débattus : la définition de garanties sécuritaires pour l’Ukraine, la possibilité d’un cadre trilatéral États-Unis–Ukraine–Russie, et la ligne rouge posée par Zelensky quant à d’éventuelles concessions territoriales. Trump, selon plusieurs sources européennes, n’aurait pas exclu l’idée d’un compromis sur le Donbass, ce que Macron et ses partenaires tentent de contrer par un front commun.

Une visioconférence se tient aujourd’hui entre les membres du noyau européen de soutien à Kiev, réunissant notamment Emmanuel Macron, Volodymyr Zelensky et Ursula von der Leyen. Ce format vise à prolonger la dynamique enclenchée à Washington, tout en maintenant l’Union européenne au cœur des décisions diplomatiques à venir.