“Briser le siège, stopper le génocide”, les voix de la flottille Madleen témoignent à Paris
– Dans des interviews exclusives à Anadolu, Caoimhe Butterly et Reva Seifert-Viard reviennent sur leur engagement pour Gaza, à l'occasion de la manifestation du 14 juin à Paris.

Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Deux figures associées à la flottille Madleen ont participé, samedi, à la manifestation parisienne de soutien à Gaza, où plusieurs milliers de personnes ont défilé entre République et Nation. En marge de la mobilisation, Caoimhe Butterly, militante irlandaise, et Reva Seifert-Viard, militant français récemment expulsé d’Israël, ont livré des interviews exclusives à Anadolu.
Caoimhe Butterly, coordinatrice au sein de la "Freedom Flotilla Coalition", a rappelé que cette campagne maritime internationale vise à “ouvrir un corridor maritime humanitaire populaire vers Gaza”. Présente à Paris, elle a souligné que la mission Madleen s’inscrit dans une longue série d’initiatives semblables : “Il y a eu plus de 36 bateaux. Le Madleen était le 36e. Nous essayons de représenter la conscience du monde.”
“Le siège doit être brisé, le génocide stoppé et la mer est, aujourd’hui, le seul moyen encore accessible pour entrer à Gaza”, a-t-elle affirmé. Pour elle, la mission a représenté un sursaut : “Nous pensons que cette mission a été un succès, car elle a représenté de l’espoir. [...] Elle a montré que l’on peut faire plus, que les peuples peuvent agir là où les gouvernements n’agissent pas.”
Reva Seifert-Viard, de retour en France depuis jeudi soir aux côtés de Rima Hassan et Baptiste André, revient sur les conditions de leur arrestation et de leur détention par Israël. “Ça ne fait que renforcer la détermination, bien sûr”, déclare-t-il. Il parle d’“incarcération”, d’“enlèvement arbitraire et illégal” et de “vol du bateau”.
Sur place, les conditions de détention étaient particulièrement dégradantes : “On était dans la cellule la plus sale, la moins équipée. Ils veillaient à saper notre moral, à ce qu’on dorme le moins bien possible, le moins longtemps possible. C’est une forme de torture psychologique.” Il insiste toutefois pour remettre cette expérience en perspective : “Mais ce n’est rien à côté de ce que vit le peuple palestinien tous les jours. L’idée, c’est plutôt d’orienter la lumière vers la Palestine plutôt que vers nous.”
Engagé dans une démarche de paix, Reva revendique une approche humaniste : “Je suis catholique et Jésus, il dit une chose : ‘aimez-vous les uns les autres’.” Il appelle à “s’éloigner des idéologies coloniales et se rapprocher de messages humanistes et de valeurs universelles.” Il exprime également une pensée pour ceux qui restent détenus : “Aujourd’hui nous sommes libres. On aimerait que nos amis soient libres également, les trois qui sont encore en incarcération en Israël. Et on aimerait aussi que les 10 000 détenus palestiniens et palestiniennes soient également libérés.”
Parmi les membres de la flottille toujours retenus par Israël figurent les Français Pascal Mauriéras (marin) et Yanis Mhamdi (journaliste), Marco Van Rennes (coéquipier néerlandais de la flottille), détenus dans la prison de Giv’on près de Ramla.
Alors que la situation humanitaire à Gaza continue de se détériorer, ces voix, venues de la mer comme de la rue, rappellent la nécessité urgente d’une action internationale concrète.
- Situation humanitaire à Gaza
Depuis la reprise des hostilités par Tel-Aviv le 18 mars 2025, les attaques israéliennes ont causé la mort de plus de 5 000 Palestiniens, portant le bilan total à Gaza à plus de 55 000 morts, depuis le début du conflit en octobre 2023, suite à une attaque du Hamas. La majorité des victimes palestiniennes sont des civils, notamment des enfants et des femmes. Malgré l'annonce de cessez-le-feu, les violations persistent, aggravant la situation humanitaire déjà critique.
Pour rappel, la Cour internationale de Justice (CIJ) a ordonné à Israël, le 26 janvier 2024, de prévenir tout acte de génocide à l'encontre des Palestiniens à Gaza et de permettre l'accès à l'aide humanitaire. De son côté, la Cour pénale internationale (CPI) a émis, le 21 novembre 2024, plusieurs mandats d'arrêt, notamment contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis dans la bande de Gaza.
Par ailleurs, Israël bloque, depuis le 2 mars, l’entrée de toute aide humanitaire dans la bande de Gaza, invoquant des raisons de sécurité. Quelques autorisations minimes de passage de l'aide humanitaire ont été accordées, mais celles-ci demeurent largement insuffisantes pour répondre aux besoins de la population gazaouie.
Ce blocus a été condamné par plusieurs ONG, dont Médecins du monde, Oxfam et le Norwegian Refugee Council, qui alertent sur un "effondrement total" de l’aide humanitaire et dénoncent "l’un des pires échecs humanitaires de notre génération". Dans ce contexte, le ministre israélien de la Défense, Israel Katz, a réaffirmé qu’"aucune aide humanitaire n’entrera à Gaza".