Ifop, islamophobie et ingérences : des députés LFI saisissent la justice après un sondage controversé
- Une nouvelle plainte vient s’ajouter à celle déjà déposée par des conseils musulmans contre le sondage Ifop sur les musulmans de France, un sondage désormais visé pour ses liens supposés avec une puissance étrangère.
Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Des députés de La France insoumise (LFI) ont saisi la procureure de la République de Paris, au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale, au sujet du sondage publié par l’Ifop le 18 novembre 2025 sur « le rapport des musulmans à l’islam et à l’islamisme en France ».
Dans leur courrier daté du 5 décembre et adressé à la procureure Laure Beccuau, les élus insistent sur les « très nombreux biais méthodologiques » de cette étude, déjà critiquée pour sa rigueur scientifique, et dénoncent une publication ayant « servi de support à des discours incitant à la haine, à la discrimination et à la violence » à l’encontre des personnes de confession musulmane. Les députés estiment que les faits exposés sont susceptibles de relever des articles 23 et 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, relatifs à la provocation à la haine raciale.
Mais ce signalement va plus loin. Les députés LFI évoquent également de possibles ingérences étrangères, citant des révélations de Mediapart et Le Monde sur d’éventuels liens entre le commanditaire du sondage — la revue Écran de veille — et les services de renseignement d'un pays étranger. Ces connexions supposées, si elles étaient avérées, « pourraient participer d’une opération d’influence d’une puissance étrangère sur notre sol », affirment les parlementaires. Ils rappellent que les relations entretenues par Écran de veille avec certaines figures suspectées d’espionnage ont été évoquées dans plusieurs enquêtes de presse.
La démarche de LFI intervient après une première plainte déposée contre X, le 23 novembre, par quatre conseils départementaux du culte musulman (CDCM) — ceux du Loiret, de l’Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne. Dans cette plainte, leurs avocats, Maîtres Romain Ruiz et Raphaël Kempf, dénoncent des manquements à la loi du 19 juillet 1977 encadrant les sondages, notamment une focalisation « sur des résultats minoritaires à des fins polémiques » et des conclusions jugées « orientées ». L’un des points les plus sensibles concernait l’évocation de la « charia » dans les conclusions du directeur de l’Ifop, alors que ce terme ne figurait dans aucune des questions posées aux sondés.
Depuis la publication de l’étude, plusieurs actes islamophobes ont été signalés, rappellent les élus. Parmi eux, une balle retrouvée dans la boîte aux lettres d’une mosquée dans l’Ain, des dégradations de lieux de culte à Lyon et au Puy-en-Velay, dans un contexte marqué par une hausse inquiétante des actes hostiles envers les musulmans. Le ministère de l’Intérieur évoquait déjà une augmentation de 75 % sur les cinq premiers mois de 2025 par rapport à l’année précédente.
