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Tunisie : Six partis d'opposition accusent Saïed de violer le silence électoral

- Le mouvement Ennahda a déclaré que, par le biais d'un discours télévisé, le président du pays a délibérément orienté les électeurs et attaqué ses adversaires

Adel Bin Ibrahim Bin Elhady Elthabti  | 25.07.2022 - Mıse À Jour : 25.07.2022
Tunisie : Six partis d'opposition accusent Saïed de violer le silence électoral

Tunisia

AA / Tunisie / Adel Thebti

Six partis d'opposition en Tunisie ont accusé, lundi, le président du pays, Kaïs Saïed, d'avoir rompu le silence électoral par une intervention télévisée dans laquelle il a appelé les électeurs à voter "oui" au référendum en cours sur le projet de Constitution, tout en s'en prenant à ses adversaires.

Lundi matin, la télévision publique a diffusé une intervention de Saïed accusant des partis (non nommés) de monter des crises de toutes pièces et de détourner l'attention du peuple des vrais problèmes, leur assurant qu'ils auraient à faire face à un "procès équitable".

"Le chef de l'autorité de facto, Kaïs Saïed, a prononcé un discours diffusé par la chaîne nationale après avoir voté ce matin lors du dit référendum", a déclaré le mouvement Ennahdha, dans un communiqué consulté par l'Agence Anadolu.

Le mouvement, qui disposait du bloc le plus important au sein du Parlement "dissous", a ajouté que Saïed "a intentionnellement orienté les électeurs à voter oui à son projet de Constitution, qu'il a longtemps vanté, pour s'en prendre ensuite à ses adversaires."

Et de poursuivre : "Il s'agit d'une violation claire et flagrante de la période de silence électoral, qui comprend la veille du scrutin et le jour même du scrutin jusqu'à la fin du processus de vote."

Le mouvement a condamné ce qu'il a qualifié comme " une violation de la loi "par le plus haut sommet du pouvoir, et a considéré que c'était "un indice supplémentaire du caractère factice du référendum."

Et de pointer son incompréhension face au "silence des responsables de l'Instance électorale (ISIE) sur cette infraction électorale avérée, qui renforce encore plus les doutes sur sa crédibilité."

"Cette violation de la loi, émanant du chef de l'autorité, est un indice du futur respect par les gouvernants des exigences de la Constitution et de la loi", a ajouté Ennahdha.

Le mouvement a déclaré que ce que Saïed avait fait "ajoute une infraction électorale au nombre des violations enregistrées pendant la période électorale et pendant les premières heures du jour du scrutin, dont les répercussions sur les résultats seront déterminées après la fin du processus référendaire et l'achèvement des données confirmées les concernant."

Plus tôt dans la journée de lundi, cinq partis d'opposition ont également accusé Saïed de "rompre le silence électoral" en diffusant un discours de propagande en faveur du projet de Constitution.

Ces accusations ont été formulées dans une déclaration publiée par la "campagne nationale pour le boycott du référendum", composée du Parti Al Joumhouri (centre gauche), du Courant démocrate (social), du Forum démocratique pour le travail et les libertés (Ettakatol), du Parti des travailleurs (gauche) et du Pôle démocratique moderniste (gauche).

"En violation flagrante de la loi et des usages électoraux, le porteur du projet de la dite nouvelle république a fait un discours de propagande en faveur de son projet (la Constitution) qui est présenté au référendum aujourd'hui, et ce long discours a été diffusé sur la chaîne publique, dite la Nationale 1", ont déclaré ces partis.

Et de poursuivre : "Le gouvernant (Saïed) est passé outre à tout cela, et son discours devant les bureaux de vote n'a pas été exempt de tensions et d'attaques contre ses adversaires, faisant fi des règles de droit les plus élémentaires."

"Ces violations, qui ne sont pas les premières, se sont produites sous couvert du silence assourdissant de l'instance électorale", ont-ils précisé.

Les cinq partis ont estimé que ce comportement est un autre indicateur du manque d'indépendance de cet organe, et du caractère frauduleux de l'ensemble du processus électoral et des résultats qui en découleront.

Jusqu'à 17h00 GMT, la présidence tunisienne n'a fait aucun commentaire sur ces accusations au président du pays.

Malgré la controverse actuelle, les observateurs de la scène politique tunisienne estiment que les résultats du référendum seront en faveur de l'adoption et de l'entrée en vigueur de la nouvelle Constitution proposée par Saïed.

Le référendum s'inscrit dans le cadre des mesures d'exception que Saïed a décidé d'imposer le 25 juillet 2021, dans un contexte de grave crise politique.

Parmi ces mesures figurent la destitution du gouvernement, la nomination d'une nouvelle équipe gouvernementale, la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature et du Parlement, la promulgation de lois par décret et la tenue d'élections législatives anticipées le 17 décembre.

Selon certaines forces politiques tunisiennes, ces mesures constituent un "coup d'État contre la Constitution" et visent à instaurer un "pouvoir individuel absolu", tandis que d'autres forces y voient une "correction du cours de la révolution de 2011."

Quant à Saïed, qui a entamé en 2019 un mandat présidentiel de 5 ans, il a affirmé plus d'une fois que ses mesures sont légales et nécessaires pour sauver la Tunisie d'un effondrement complet.


*Traduit de l’Arabe par Mourad Belhaj

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