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Les terres arables d’Afrique de l’Ouest bradées dans le souk des grands

"Dans un contexte de prévalence du droit coutumier, où la terre n’appartient plus à la communauté, les investisseurs étrangers ne trouvent plus autant de contraintes à acquérir des terres arables africaines"

09.10.2014 - Mıse À Jour : 09.10.2014
Les terres arables d’Afrique de l’Ouest bradées dans le souk des grands

AA/ Tunis/ MHA

Les terres arables d’Afrique de l’Ouest massivement acquises par des étrangers sont souvent spoliées dans le souk des grands. Ces terres fertiles peu exploitées par les populations locales peuvent néanmoins sauver plusieurs régions du continent de la famine et de la précarité.

Une récente recherche de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), portant sur neuf pays ouest-africains (le Bénin, le Burkina Faso, la  Côte d’Ivoire, la Guinée, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo),  note que la superficie des terres louées par des étrangers est estimée à 7 millions et 125.968 hectares de terres, sur  un total de 121 millions et 413.000 ha des terres arables ou agricoles des neufs pays. Soit 6.4% de l’ensemble des terres arables ou agricoles de ces pays.

Les superficies acquises sont estimées à 85.764 ha au Bénin, 5 millions et 747.602 ha au Burkina Faso qui s'adjuge la part de lion, 119.578 ha en Côte d’Ivoire, 34.900 ha en Guinée, 2860 ha en Guinée Bissau, 74.938 ha au Mali, 207.643 ha au Niger, 77.065 ha au Togo et 844.976 au Sénégal. Soit un total de 7 millions et 125.968 ha.

D’après une autre étude récente de l’Oakland Institute (Think Tank américain), au premier rang des acquéreurs des terres arables en Afrique de l’Ouest et dans le continent noir en général, figurent des sociétés relevant de la Corée du Sud avec un total de terres louées ou achetées estimé à 2 millions et 912.000 ha. Il y a ensuite l’Arabie Saoudite avec 1 million et 912.117 ha, suivie par l’Inde, qui totalise 1 million et 644.000 ha. S’y ajoutent la Chine avec 1 million et 460 800 ha,  l’Egypte avec 1 million ha, le Japon acquéreur de 922. 862 ha et la Libye qui détient 264.000 ha.

Commentant cet état de fait, l’économiste rural ivoirien Koné Miaman de l’Agence nationale pour le développement rural (Anader, publique) note à Anadolu que « les multinationales convoitant les terres africaines cherchent à sécuriser leurs activités ».

De ce point de vue, il ajoute : «  la mondialisation aidant, la concurrence s’est exacerbée et créé un besoin de sécurisation en matières premières. C’est une des principales raisons de la venue en Afrique des multinationales qui y trouvent un coût de cession très à la portée, vu la vulnérabilité des propriétaires qui n’ont pas les moyens financiers, logistiques et techniques pour assurer la mise en valeur de ces terres ». Il n’a néanmoins pas donné de détails sur l’intervalle des prix de l’hectare, étant donné qu’ils ne sont pas stables.

« Dans un contexte de prévalence du droit coutumier, où la terre n’appartient plus à la communauté, ces investisseurs étrangers ne trouvent plus autant de contraintes à acquérir des terres arables africaines », explique-t-il.

Sur un autre plan, l’économiste pointe du doigt  « des systèmes éducatifs et économiques africains toujours en déphasage avec l’actualité du Continent ». Un système éducatif qui n’arrive toujours pas, selon lui, à inculquer aux apprenants les profits qu’il y a à travailler et à fertiliser les terres et la valeur de l’initiative privée.

Dans la même optique, il observe que le financement est l’un des principaux handicaps devant l’investissement agricole en Afrique. «  Les banques refusent souvent de financer les petits projets car il y a assez de risques, avec une administration peu fiable, des marchés non structurés et une production faible. Toutes ces difficultés sont à aplanir afin d’encourager les Africains à investir dans l’agriculture et à exploiter et à rentabiliser leurs terres arables, dont une bonne partie est encore abandonnée », estime-t-il.

S’attardant sur le phénomène de l’accaparement des terres arables en Afrique de l’Ouest, des médias et des plateformes de recherche, dont Grotius International (Géopolitique de l’humanitaire) font pour leur part allusion à « une recolonisation de la région par le foncier ».

De ce point de vue, Grotius explique que l’expression « recolonisation par le foncier» rimerait avec l’expansion du « contrôle capitaliste » des richesses de l’Afrique subsaharienne.  Ce qui ferait penser à une reprise des méthodes anciennes d’exploration et de « pillage du temps » d’avant les indépendances africaines, sinon, à «  un prolongement du dit néo-colonialisme alors que, en fait, le contexte africain semble avoir changé », selon lui.

Il reconnait par ailleurs les profits "minimes" tirés par les Etats africains en échange de la location de leurs terres pour des investisseurs étrangers (création de postes d'emploi et fertilisation de terres).

 
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