Culture et Arts

Tunisie: L’Algérie à Jazz à Carthage : la musique malgré tout

La plus grave catastrophe aérienne de l’histoire de l’Algérie est survenue quelques heures avant le coup d’envoi de la soirée 100 % algérienne du principal festival de jazz tunisien. Koum Tara et Labess sont malgré tout montés sur scène.

Esma Ben Said  | 12.04.2018 - Mıse À Jour : 12.04.2018
Tunisie: L’Algérie à Jazz à Carthage : la musique malgré tout

Tunisia
AA/Tunis/Rached Chérif

Dans la matinée du 11 avril, un Iliouchine Il-76 de l’armée algérienne s'est écrasé peu après son décollage de la base aérienne de Boufarik, à quelques kilomètres au sud d'Alger. Le bilan est très lourd : 257 morts, en majorité des militaires et leurs familles, a expliqué le ministère algérien de la Défense. Ce bilan en fait la pire catastrophe aérienne - civile ou militaire - survenue en Algérie et la quatrième plus meurtrière au monde ces vingt dernières années.

C’est dans ce contexte que deux groupes algériens devaient monter sur la scène de Jazz à Carthage. Il s’agissait pour eux de « conjurer le sort » en faisant malgré tout vibrer la salle et danser le public tunisien venu nombreux. La soirée affichait d’ailleurs complet depuis plusieurs jours, tout comme un certain nombre d’autres concerts du festival, qui se tient du 6 au 14 avril à Tunis.

En première partie, le groupe Koum Tara a démontré de la plus belle manière que les influences musicales maghrébines et occidentales peuvent se marier à la perfection. Ce métissage avec la musique chaabi et le style arabo-andalou a permis au jazz de prendre une nouvelle dimension, grâce à l’interprétation de haut vol du quatuor à cordes. Malgré certaines compositions plus mélancoliques, la peine des Algériens a semblé bien loin des esprits pendant un instant.

Mais, c’est pour le groupe Labess que la majorité des 1300 spectateurs ont fait le déplacement. La formation, qui se produit habituellement sur les grandes scènes d’Europe, a donné le meilleur d’elle-même pour le public de l’hôtel Carthage Thalasso de Gammarth.

« Je suis tombée amoureuse de leur musique sur internet il y a quelques jours, et je voulais à tout prix venir », s’enthousiasmait Michela avant le concert. Retrouvée à la sortie, la spectatrice affichait un large sourire et fredonnait encore quelques-unes des chansons de la soirée. « La soirée était magnifique, avec beaucoup de rythme et de générosité de la part des musiciens », glisse-t-elle encore sous le charme de la musique.

Le leader et chanteur du groupe, Nedjim Bouizzoul, avait pourtant appris la nouvelle de l’accident d’avion juste avant de monter sur scène. « C’est une très grosse perte. Que Dieu leur accorde sa miséricorde », souffle-t-il, visiblement ému en sortant de scène. « Mais, j’ai essayé de me concentrer sur le spectacle », admet-il. « C’était des êtres humains comme nous, qui faisaient leur travail. Je souhaite du courage à leur famille », a ajouté le chanteur algérien.

Il fait le lien entre ces disparitions et les atrocités qui ont lieu partout dans le monde. « C’est pas juste en Algérie. En ce moment, il y a des pertes humaines partout sur la planète (…) On est en train de voir que l’être humain ne vaut plus rien : on le tue, on le massacre, on le bombarde avec des armes chimiques », s’est indigné l’artiste, dans une référence explicite aux récentes attaques à l’arme chimique attribuée par certains pays au régime de Bachar-Al-Assad.

« Donc, mon message de courage n’est pas seulement pour les Algériens, mais pour tout le monde : que Dieu accueille ceux qui sont morts et qu’Il aide ceux qui sont vivants, parce que c’est encore plus dur pour eux », a-t-il souhaité.


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