Mali/Bamako: Les pêcheurs de sable sur le fleuve Niger, un beau spectacle de labeur et pragmatisme

AA/ Bamako/ Baba Ahmed
Dès les premières lueurs de l’aube, des marées humaines assurent le spectacle sur le fleuve Niger. Ce sont les pêcheurs de sable qui s’activent pour gagner leur pain à la sueur de leur front et participer à l’urbanisation de Bamako.
Le vrombissement des moteurs est on ne peut plus assourdissant et le paysag est haut en couleurs. La ruée des véhicules quêtant du sable pour approvisionner les chantiers qui pullulent dans la ville est d’autant plus continue que remarquable.
« Je suis là depuis 7 heure et je suis déjà à mon sixième camion de sable remplis avec l’aide autres amis. Nous pouvons continuer sur ce rythme du lever au coucher du soleil pour voir édifiées des gratte-ciel à Bamako. Mes recettes dépendent du nombre des camions que je charge, mais je suis souvent dans la fourchette de 1000 à 5000 Fcfa (1,72 à 8,62 USD) par jour », confie Moussa Dembélé, un ouvrier en train de charger le sable dans des camions.
Un camion se sable se vend aux entreprises de construction à 12500 Fcfa, selon Ousmane Koné, un des transporteurs. « Parfois, je fais plus de 10 voyages. Le secteur est informel, mais c’est du bon business, du gagne-pain pour nous autres petits entrepreneurs », clame-t-il.
Le même spectacle est presque quotidien à Bamako. Mais il arrive souvent que des pêcheurs partent plus loin à la recherche du précieux sable. « Tous les matins ou presque, des dizaines de pirogues partent jusqu’à Siguiri en Guinée Conakry pour pêcher du sable», témoigne un gardien malien des lieux, sous couvert d’anonymat.
Cette exploitation intensive du sable du fleuve n’est toutefois pas sans risques. D’ailleurs, une équipe d’hydrologues de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) qui étudie le fleuve depuis 2007, a révélé que le lit de la rivière s'affaissait plusieurs centimètres par an, du côté de Bamako.
Les chercheurs ont, de ce fait, établi une liste de 60 sites d’extraction le long des rives du fleuve, sur 150 km en amont et en aval de la capitale malienne. Un prélèvement de «15 à 20 millions de m3 a été réalisé entre 2000 et 2006», selon les chercheurs.
Selon des études portant sur l’urbanisation des capitales africaines, Bamako a vu sa taille décupler en 50 ans pour atteindre 1,8 millions d’habitants en 2009, date des dernières statistiques officielles.
Bien que le phénomène ne concerne pas la totalité des 4.200 km du lit du Niger, ses conséquences ne sont pas des moindres.
La pêche et l’écosystème en font le lourd tribut. L’eau trouble perturbe «le peuplement des poissons», selon les scientifiques. L’agriculture est également affectée par l’abaissement du niveau du fleuve, généré par l’exploitation intensive de son sable.
Les autorités maliennes ont récemment fait part de leur préoccupation quant à la situation du fleuve, promettant de mettre en place une startégie pour la protection de ce bien national.
Le Niger est le troisième plus long fleuve d'Afrique, après le Nil et le Congo. Il prend sa source en Sierra Leone à 800 m d'altitude au pied des Monts Loma et verse dans l'océan Atlantique, au Nigéria. Son cours traverse ou borde six États dont deux d'entre eux portent son nom ( le Niger et le Nigéria).