Bénin/Abomey: La "cité des rois", destination privilégiée de voyageurs internationaux
Le site des palais royaux, un chef-lieu chargé d'histoire et un microcosme des civilisations qu'a connues la ville.

AA/ Cotonou/ Serge David Zouéme
Logé au cœur de la ville historique d’Abomey, à 135 kilomètres au nord de Cotonou (capitale), le site des palais royaux draine des touristes issus de divers coins de la planète, pendant les fêtes de fin d’année.
Près de 20 mille visiteurs se rendent chaque année à ce site, selon Urbain Hadonou, gestionnaire du monument . Français, Anglais, Américains, Cubains, Italiens, Brésiliens, Nigérians, Togolais, Ivoiriens, et Burkinabès sont les principaux touristes prisant ces lieux.
«La cité des rois » comment aiment l’appeler certains Béninois abrite dix palais et bien des secrets des douze rois qui y ont élis domicile au fil du temps. Le royaume de Danxôme (dans le ventre du serpent), devenu Abomey pendant la colonisation française était dirigé à partir de ce chef-lieu chargé d’histoire et de civilisations.
Entouré de murs de couleur ocre et érigé à base de terre mélangée à du sang humain, selon la légende (le sang des ennemis capturés et tués lors des razzia et conflits tribaux a été mélangé à de la terre cuite pour la construction des palais), ce site héberge le royaume d’Abomey. Lequel royaume s’étendant sur une superficie de près de 48 hectares, témoigne de la bravoure des souverains de la ville.
De l’extérieur, ce bâti patrimonial et traditionnel apprivoise les yeux et demeure une cocarde de la résistance coloniale face aux colononisteurs français de 1883 jusqu’à 1960. En témoigne l’architecture atypique de certaine concessions dressées symbolisant, chacune, un pan de l’histoire du royaume.
A l’entrée principale où attendent les premiers visiteurs de la journée, trente touristes de nationalités française et américaine, est finement posé un écriteau sur lequel figure le logo d’une des institutions les plus prestigieuses au monde: l’Unesco. Cela, n'est point fortuit.
Urbain Hadonou, septuagénaire, chargé de la gestion des lieux, indique à ce propos: «le site des palais royaux d’Abomey, se démarquant par son architecture assez originale est classé en tant que bien culturel de l’humanité sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1985».
Revisitant l’histoire du site, M.Hadonou, très passionné, explique que le royaume d’Agbomè devenu Danxôme avant d’avoir une nouvelle appellation : Abomey, fut fondé au XVIe siècle par le roi Houégbadga. De 1625 à 1900, douze rois y compris le plus fameux: Houégbadga, se succédèrent à sa tête. A l'exception de deux souverains, chacun des dix autres fit édifier son palais à l'intérieur d'un enclos entouré de murs solides tout en conservant certaines caractéristiques de l'architecture des palais précédents, à commencer par l'organisation de l'espace et le choix des matériaux. Sur dix palais, deux ont été transformés et abritent actuellement le musée historique d'Abomey créé depuis 1943 par l'administration coloniale française. Il s’agit des palais des rois Guézo et Glèlè réservés à la visite des touristes. Ils couvrent une surface de 10 hectares
A l’intérieur du musée, s’élèvent encore les vestiges de la résistance et sont exposés des objets appartenant aux rois défunts. On y découvre également des collections composées de sièges royaux, de statuettes et d’objets cultuels vaudous. Les Vaudous représentent des croyances religieuses adorées par bon nombre de Béninois et protégées par les garants de la tradition. Ces croyances sont nombreuses et ont pour emblèmes des objets spécifiques comme les masques, les cauris (coquillage du groupe des cyprées ou porcelaines, qui a servi longtemps de monnaie à diverses populations, notamment en Afrique noire et en Asie) et les accoutrements (tenues de déguisement).
L’œil du visiteur ne peut omettre de méditer les sept insignes du pouvoir royal à Abomey, chacun ayant une signification particulière: le kataklè (tabouret tripode), les afokpa (sandales) légitimant le roi nouvellement élu, l’avotita (pagne tissé et décoré de motifs appliqués servant d’habit prestigieux pour le roi ), l’awè (le parasol), le makpo (recarde) indispensable lors de la présentation du roi au public, le so (fusil) et le hwi (sabre) qui renvoient au caractère guerrier du roi. La recarde est l'emblème qui permet de représenter le roi où qu'il soit et après sa mort, selon le gestionnaire du musée.Toutes ces collections témoignent du passé et reflètent l’héritage historique et culturel du peuple Fon (sud béninois).
Le musée garde, par ailleurs, une part de ses secrets. Près de 1.500 objets de grande valeur sont encore réservés et n’ont jamais été exposés, affirme M. Hadonou. Cet édifice culturel encourt, par delà, certains risques. Selon le conservateur, ce site sis au centre de la ville d’Abomey est menacé d’occupation illicite. «Avec l’explosion démographique d’Abomey, une partie de la population insuffisamment sensibilisée à l’importance du patrimoine a, à maintes reprises, cherché à piétiner le piétiner, à s’en accaparer d’une partie pour s’en servir en tant que domaine d’habitation. Le danger est permanent, en l’absence de renforts pour les dix-neuf agents veillant sur près de 47 hectares », fait-il observer.
Aucune réaction n'a pu être obtenue auprès des autorités compétentes par rapport à la préservation de ce patrimoine mondial.