La filière équine malgache en quête de sa gloire passée
"Les gens qui montent à cheval sont plus nombreux, et nous nous apercevons que de plus en plus de personnes viennent assister aux rencontres sportives qui sont organisées" la présidente de la FMSE.

AA/ Antananarivo/ Alain Ilionaiana
Après plusieurs années d'absence, les concours de saut d’obstacles et les courses hippiques reprennent peu à peu à Antananarivo, la capitale malgache, pour le plus grand plaisir des amateurs de chevaux qui espèrent ardemment que la filière équine reprendra sa splendeur d'antan.
Un week-end par mois, les férus de courses établis à Antananarivo se retrouvent ainsi dans l’un des cinq centres équestres ou dans l’un des deux hippodromes que compte la Grande île.
Les ambiances autour des courses et des concours de chevaux ne sont certes, pas aussi festives qu’elles l’étaient dans les années 1960 ou 1980, mais les spectateurs reprennent peu à peu leur place dans les gradins.
La journée de clôture de saison à l'hippodrome de la capitale a ainsi réuni une quarantaine de chevaux en novembre même s'il est vrai que « dans le temps, plus de 120 chevaux participaient aux courses », se rappelle avec nostalgie, Sylvain Ranjalahy, ancien journaliste sportif et grand amateur des courses de chevaux, rencontré par Anadolu.
« L’industrie équine est moribonde. Nous ne disposons plus que de deux hippodromes fonctionnels alors qu’auparavant nous en avions une demi-douzaine. Et si à l’époque, la Grande île comptait un millier de têtes de chevaux, elle n’en compte plus aujourd’hui qu’environ 350», regrette-t-il.
Si la filière équine peine à retrouver sa splendeur d'antan c'est, en autres, parce que l’élevage des chevaux se heurte à certaines difficultés qui entravent les efforts de développement engagés.
« 80% des éleveurs sont des paysans qui ont parfois du mal à trouver de quoi nourrir leurs chevaux et sont contraints de les vendre, ce qui handicape les courses hippiques », déplore Michelson Rakotoarison, ancien jockey et président de l’Autorité hippique pour les courses et l’élevage des chevaux (AHCEL) à Madagascar, rencontré par Anadolu.
D'ailleurs, le coût élevé d'un cheval ne contribue pas au redressement de la filière dans un pays en difficulté économique. "Un cheval de quatre ans coûte entre 5 millions et 6 millions d'ariary (2000 à 2 500 dollars)", reconnaît Nicole Ratsimbazafy, présidente de la Fédération malgache des sports équestres (FMSE), alors que le salaire minimum est de 50 dollars.
Mais les amoureux des équidés ne baissent pas les bras et de nombreuses pistes sont évoquées pour améliorer la filière.
« Les gens qui montent à cheval sont plus nombreux, et nous nous apercevons que de plus en plus de personnes viennent assister aux rencontres sportives qui sont organisées », s'enthousiasme ainsi Nicole Ratsimbazafy, pour témoigner du regain d’intérêt dont la filière fait l’objet ces dernières années.
La présidente concède que « même si les sports équestres ne sont pas aussi populaires qu’avant, ils recommencent à se développer ».
« Cela se fait de manière discrète », poursuit-elle. « Nous comptons aujourd’hui sept centres équestres alors qu’à un moment, il n’y en avait plus que deux », témoigne-t-elle.
"Et l'offre (de chevaux) commence à ne plus suivre la demande. D'où l'obligation d'importer", s'enorgueillit-elle.
Propriétaire d’un poney club situé à une douzaine de kilomètres de la capitale, Mireille Bersia témoigne du nombre croissant des amateurs de chevaux adhérants. « Il y a beaucoup d’étrangers, mais de plus en plus de Malgaches s’inscrivent aussi chez nous, et nous prenons part aux différents concours organisés par la FMSE pour gagner des points », confie-t-elle.
Outre les concours de sauts d’obstacles et les courses hippiques, la randonnée à cheval ouvre, elle aussi, une nouvelle perspective et constitue un secteur en plein développement sur la Grande île: « Madagascar dispose de paysages magnifiques qui peuvent faire le bonheur des randonneurs », assure Bersia, en référence à la qualité de la biodiversité locale, fer de lance du tourisme malgache.
Pour Félix Rakotomamonjy, un amateur de randonnée à cheval, « les professionnels existent, les chevaux sont bien préparés, le principal problème reste celui du tourisme à Madagascar, en général », soulève-t-il, déplorant la réputation d’insécurité qui colle à la Grande île.
« Le peu de chevaux existants nécessite de coupler une amélioration en nombre et en qualité de la filière élevage, appuyé par une formation aux éleveurs, tant pour le cheval de sport que pour le cheval de course », lance Jean-François Grandjean, opérateur dans la randonnée et le tourisme équestre.
Des actions sont déjà engagées pour enrichir le cheptel équin malgache. « Nous importons de France, de l’île Maurice ou d’Afrique du Sud, des étalons pur-sang », précise Michelson Rakotoarison. « Nous faisons des efforts pour améliorer les races de nos chevaux », indique-t-il.
Or, de l’avis quasi-unanime des acteurs, ce sont les courses, à travers les paris, qui devraient, entre autres, tirer le secteur vers le haut. « Nous sommes en train de monter un projet pour élargir la palette de nos offres et rendre les courses plus attractives », dévoile-t-il.