
Tunis
AA/ Tunis/Mohamed Abdellaoui
La Chine qui a vu baisser ses investissements en Afrique de 40% durant les six premiers mois de 2015, une première depuis 2009, se tourne vers d’autres domaines et d’autres régions du monde après s’être rassasiée en réserves provenant du continent noir, soutient le géoéconome sénégalais, Siré Sy, dans un entretien avec Anadolu.
L'intérêt porté vers de nouveaux types d'investissements, jugés "plus porteurs", à l'heure où le ralentissement de sa croissance économique se confirme, sous-tend ce constat, selon l'expert sénégalais.
Le constat du géoéconome sénégalais et dirigeant d’Africa WorldWide Group, cabinet conseil en géostratégie, basé à Dakar, prend racine dans le bilan récemment annoncé par le porte-parole du ministère du Commerce chinois Shen Danyang, faisant état d’un effritement de 40% des investissements chinois en Afrique, soit 1,2 milliard de dollars, pour le 1er semestre 2015, et d’une baisse des importations en provenance du même continent de 43%, lors de la même période, par rapport au premier semestre 2014.
Le ralentissement à 6.9% de la croissance économique du géant asiatique au troisième trimestre 2015 (chiffres officiels chinois), a entraîné une baisse drastique de sa demande en matières premières de l'Afrique, d'où le recul de ses importations, selon la même source.
«Il faut s’attendre au maintien de cette baisse pendant les deux ou les trois années à venir, vu que la Chine sera beaucoup plus portée vers d’autres marchés et d’autres régions du monde plus prometteuses pour investir dans les domaines nucléaires et technologiques, sans pour autant renoncer complètement à l’Afrique », détaille le géoéconome.
Il n’y a pas longtemps, au cours de la décennie écoulée, le partenariat sino-africain était au beau fixe et la Chine a presque absorbé la majorité des marchandises produites en Afrique, gagnant du terrain sur d’autres puissances rivales, dont les Etats-Unis, la Grande Bretagne et la France, selon des rapports diffusés par différents médias, dont le Monde.fr.
Bien plus, la Chine s’imposait dans un passé proche comme un géant de l’investissement en Afrique, avec plus de 75 milliards de dollars investis dans les secteurs du transport, l’énergie, les mines et l’immobilier entre 2000 et 2011, selon l'Institut Amadeus, un Think-tank marocain.
Avec près de 1.046 projets en Afrique, plus de 2.500 grandes et moyennes entreprises chinoises issues d'une grande variété de secteurs présentes sur plus de 50 pays et régions du continent, et avec la construction de 2.233 kilomètres de voie ferrée et 3.530 de routes, la Chine s'est fortement implantée sur le continent noir et devenue depuis 2009 le premier partenaire commercial de l'Afrique, selon des données officielles chinoises.
Dans la même perspective, un rapport de l’institut américain Brookings note qu’au cours de l’année 2011 les investissements chinois en Afrique ont représenté 4,3% du total des investissements chinois dans le monde.
Un bilan qui a plutôt suscité des réactions mitigées. Si certains ont salué cette politique chinoise privilégiant un partenariat gagnant-gagnant, des personnalités politiques de poids l’ont vu de mauvais œil. Tel était le cas de l'ex secrétaire d'Etat amérciain Hilary Clinton qui a déclaré lors de sa visite au Sénégal en 2012 en tant que Secrétaire d’Etat américain, faisant allusion à la Chine : «Le continent africain a besoin de partenariats qui permettraient d’en augmenter la valeur et non pas de ceux qui vont lui enlever sa valeur ».
Aujourd’hui il se trouve que l’Empire du milieu change de tactique. Bien que le ralentissement de son économie soit un fait accompli, d’ailleurs le gouvernement chinois l’a reconnu, le géoéconome Sy explique ce changement de tactique, orienté vers l'Occident, par la détermination de l’Empire céleste à changer de business-modèle, en privilégiant d’autres domaines techniquement plus pointus, tels la construction de centrales nucléaires et les nouvelles technologies, domaines qui font défaut à l'Afrique.
« La Chine aura prochainement sa propre monnaie intégrée de référence internationale (comme l’Euro, le Dollar américain et le Yen japonais, une fois de référence internationale le yuan chinois sera fonctionnel sur le plan international, ndlr), ce qui l’aidera à mieux intégrer les marchés des pays dotés de forts potentiels technologiques, notamment les pays développés et autres », détaille l’économiste.
«La Chine sera, ce faisant, orientée vers les pays les plus avancés s'agissant des domaines techniquement pointus, en vue de se faire remarquer en tant que plateforme internationale de choix et monter en gamme pour ce qui est de ses investissements à travers le monde », conclut le stratège.
Abonde dans ce sens, l'intention annoncée par la Chine d’investir 78 milliards USD dans le développement de ses centrales nucléaires et d’en faire fonctionner plus de 110 d’ici à 2030, d’après le plan de développement quinquennal du gouvernement, tout autant qu’elle a entrepris des études pour la construction de centrales nucléaires dans diverses régions du monde, dont l’Iran, selon des rapports de presse.
Seulement une partie des dépêches, que l'Agence Anadolu diffuse à ses abonnés via le Système de Diffusion interne (HAS), est diffusée sur le site de l'AA, de manière résumée. Contactez-nous s'il vous plaît pour vous abonner.