Tunisie/Protestations – "Les actes de Vandalisme à la Une des journaux

Tunis
AA- Tunis - Emna Meddeb
Les «Une» des journaux tunisiens, parus vendredi, ont été réservées aux protestations contre la hausse des prix que traverse la Tunisie depuis lundi dernier, ainsi qu'aux événements qui ont eu lieu dans l'ensemble du pays.
Les journaux ont étayé les détails des événements sur plusieurs pages et ont soulevé des questions quant à l'avenir des mouvements ainsi que les réactions attendues du gouvernement sans donner de réponse satisfaisante et ce à la lumière de la situation confuse qui règne dans le pays.
Le quotidien tunisien d’expression française, «La Presse» (public) a souligné la nécessité de traiter sérieusement les événements survenus dans différentes régions de la Tunisie.
Intitulé, " Gouverner, c'est prévoir", l’éditorial de «La Presse» s'est interrogé de ce que le Chef du gouvernement, Youssef Chahed compte faire, au moment où les Tunisiens ont été informés de l'identité des casseurs et de ceux qui les manipulent.
Le journal s'est également interrogé si le Chef de l'Etat, Béji Caïd Essebsi, prenait tout le monde de court. « Montrait-il à ces nouveaux politiciens de gauche et de droite que dans les moments exceptionnels, il faut prendre des décisions exceptionnelles et fournir au peuple les réponses qu'il espère? » , a questionné la Presse.
Le plus ancien journal de Tunisie a par ailleurs rapporté, citant le Secrétaire-général de la centrale syndicale (UGTT), Noureddine Tabboubi, que ce dernier a déclaré, jeudi, qu’il soutient les protestations à condition qu’elles soient encadrées, soulignant son refus des actes de vandalisme incitant au chaos.
Tabboubi a également mis l’accent sur l’impératif qu’il y a d’être vigilant à l'égard des "pillages, du vandalisme, des atteintes aux biens privés et publics et aux cambriolages criminels". Il a par ailleurs insisté sur l’importance de prendre des mesures urgentes en faveur des catégories marginalisées, précise la même source.
La Presse n'a pas manqué de rapporter le refus des dirigeants du Front populaire (coalition d'opposition de gauche, 15 députés), des accusations qui leur ont été reprochées du chef du gouvernement .
Le Premier ministre, Youssef Chahed avait accusé, mercredi, ce qu'il a qualifié de réseaux de corruption ainsi que le Front populaire d'inciter à la violence et au vandalisme.
Le porte-parole du ministère de l'Intérieur, le colonel-major Khalifa Chibani, cité par le même quotidien a fait état d'une baisse remarquable des actes de saccage et de pillage dans toutes les régions.
Dans le même contexte, le journal tunisien "Le Quotidien" (indépendant) a consacré six pages, dont la Une, pour mettre l'accent sur les protestations populaires et les nuits de violence, qui selon la même source, sont la résultante d’incitations par des « partis politiques, des lobbystes, des trafikistes ».
Le Quotidien a indiqué que les violences ont repris durant le nuit de mercredi à jeudi, dans plusieurs régions du pays, alors que les tensions ont nettement baissé dans d'autres zones après l'arrivée de renforts sécuritaires et miliaires.
Par ailleurs, Hamma Hammami, porte-parole du Front populaire, a déclaré "qu'il est clair que le chef du gouvernement est surpris de la colère populaire. Il a cru que la loi de finances 2018 destructrice allait passer sans réactions. Et face à la colère du peuple et face à son incapacité à trouver des solutions, il accuse le front pour se défaire de ses responsabilités", précise le même média.
Hammami a par ailleurs "tiré à boulets rouges sur le parti d’obédience islamique Ennahdha et La Kasbah" (Premier ministère).
Quant au Hizb ut–Tahrir (Parti d’obédience islamique), il a accusé le gouvernement de corruption politique, indique la même source.
Le Quotidien a également consacré toute une page à la balance commerciale et à l'aggravation du déficit. Il a à cet égard, indiqué citant l'Institut national de la Statistique (INS), que le déficit de la balance commerciale s'est aggravé à 15592 millions de dinars à fin 2017, niveau jamais atteint auparavant par le pays et des conséquences de ce déficit sur la loi de finances.
Pour sa part le quotidien tunisien "Le Temps" (indépendant), a mis en garde contre les manipulations sur les réseaux sociaux, citant un communiqué du ministère de l'Intérieur. Le ministère, a appelé l'ensemble des citoyens à vérifier le bien fondé des informations publiées et à chercher l'information auprès des sources officielles.
D'autre part les journaux tunisiens d’expression arabe n'ont pas manqué de rapporter les évènements et les faits nouveaux que traverse la Tunisie.
Le quotidien "Essahafa" (gouvernemental), a focalisé sur l'analyse des dimensions des manifestations, rapportant en première page que "l'Etat est "l'otage" entre la ruine et l'extorsion".
Essahafa a également indiqué que les forces ayant incité à la tenue des manifestations, avaient laissé les protestataires sans encadrement. Par conséquent, le chaos s'est manifesté (titre d'un article).
Le quotidien gouvernemental s'est également demandé si les mouvements des jeunes représentaient, aujourd'hui, une alternative face à l'incapacité politique à résoudre les problèmes dont souffre le peuple ?
Pour sa part, "El Maghreb", un quotidien indépendant s'est interrogé en première page : "après les émeutes et le vandalisme continus, quand pourrions-nous échapper au cycle de la marginalisation et de la violence?"
Le quotidien "Al-Sabah" (indépendant), et face aux actes de vandalisme et de pillage perpétrés en Tunisie, s'est interrogé : "Décréter le couvre-feu est-il un choix amer?" Le couvre-feu, bien qu'il serve à mettre un terme aux actes de vandalisme nocturnes, il pourrait dégrader davantage l’économie et le tourisme, précise le média qui fête cette année ses 68 ans.
Par ailleurs, Alchourouk, le quotidien tunisien, a dédié sa « Une » aux protestations, et aux actes de pillages et n'a également pas manqué de mettre l’accent sur le rôle crucial qu'ont joué les réseaux sociaux en vue de manipuler les protestataires.
Pour faire face à la situation économique jugée «très difficile» que traverse le pays, le gouvernement a adopté dans la loi de finances entrée en vigueur le 1er janvier 2018, des réformes «douloureuses mais nécessaires» afin de réduire le déficit du budget de l’Etat (6% du PIB en 2017).
Les nouvelles mesures portant sur l’augmentation des prix des carburants et autres produits (forfaits internet, parfums, carte de recharge, produits cosmétiques) considérés comme «non essentiels» et introduisant de nouvelles taxes, ont provoqué une flambée des prix et porté un coup dur au pouvoir d’achat des classes sociales pauvres et moyennes.