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Tunisie: accusations contre l'Instance Vérité et Dignité, «une tempête dans un verre d'eau»

- Lors d'une conférence de presse tenue à Tunis, la présidente Sihem Ben Sedrine ainsi que Adel Maïzi et Khaled Krichi ont fermement dénoncé les accusations portées contre l'IVD

Mounir Bennour  | 11.01.2021 - Mıse À Jour : 11.01.2021
Tunisie: accusations contre l'Instance Vérité et Dignité, «une tempête dans un verre d'eau»

Tunis

AA/Tunis/Mounir Bennour

Dans une conférence de presse tenue ce lundi à Tunis, les intervenants de l'Instance Vérité et Dignité (IVD) ont tenu à défendre l'Instance contre des accusations qui lui ont été portées, visant à discréditer sa mission et son engagement dans la voie de la justice transitionnelle.

Revenant sur les travaux de l'Instance, Adel Maïzi, le membre chargé de la gestion des documents et archives dans l'IVD a évoqué la marginalisation du dossier des martyrs et des blessés de la révolution tunisienne, affirmant que : « la liste complète des martyrs et des blessés n'a toujours pas été publiée, ce que nous considérons comme un retard humiliant, non justifié, douloureux, et indigne des martyrs et des blessés, de leurs familles, de la révolution et de la Tunisie ».

Maïzi a d'ailleurs fait savoir que « les recommandations de l'IVD ayant trait au dédommagement des régions marginalisées et dépourvues d'opportunités de croissance, n'ont pas été prises en compte, ce qui aurait pu permettre au gouvernement de répondre aux demandes légitimes des régions suite à la révolution ».

De son côté, Khaled Krichi, ancien vice-président de l’Instance Vérité et Dignité, a estimé que malgré les menaces, les pressions tant intérieures qu'extérieures et les manquements humains, l'IVD « a rempli son rôle comme le prévoyait la loi sur la justice transitionnelle en remplissant son rôle et ses obligations légales, en révélant les violations qui ont eu lieu par le passé ».

S'excusant auprès des Tunisiens du caractère humain qui empêche toute perfection dans ce genre d'entreprises, Krichi a déclaré que « Tous ne peuvent pas être satisfaits surtout avec les 63.000 dossiers déposés auprès de l'Instance ».

Pour lui l'expérience tunisienne est somme toute réussie, estimant que « l'expérience tunisienne est l'une des rares expériences parmi les 46 expériences de justice transitionnelle menées dans le monde qui a accompli ses fonctions conformément à la loi ».

Dans son intervention, la présidente de l'Instance Vérité et Dignité a fermement dénoncé les accusations portées contre l'IVD comme une tentative qu'elle a qualifiée de « tempête dans un verre d'eau ».

Elle a invité les personnes, détenant des preuves accablantes contre l'Instance de son implication dans des affaires de corruption, à se manifester et à saisir la justice. Ben Sedrine a d'ailleurs fait savoir que « L'Instance Vérité et Dignité est juridiquement immunisée et qu'elle est protégée par la Constitution tunisienne », dans la mesure où aucun de ses membres ne peut être poursuivi sur la base de ses activités au sein de l'Instance.

La présidente de l'Instance Vérité et Dignité est revenue sur les accusations contre sa commission, estimant qu'elles « visaient le passage d'une nouvelle loi sur la réconciliation sous la conduite de Mohamed Ghariani, conseiller auprès du président de l'Assemblée des représentants du peuple ».

Pour Ben Sedrine ces accusations visent l'anéantissement des instances judiciaires spécialisées afin de mettre un terme au processus de la justice transitionnelle.

Elle a aussi évoqué la désignation de Mohamed Ghariani qu'elle estime « humiliante » pour la révolution et les institutions tunisiennes, par Rached Ghannouchi, le président du parlement tunisien. Ghariani a été désigné pour diriger le dossier de la réconciliation nationale.

Pour Sihem Ben Sedrine, Ghariani était le premier responsable du parti du Rassemblement Constitutionnel Démocratique dissous, et à ce titre, il « n'a pas le droit de parler au nom de la Révolution, parce qu'il est accusé d'avoir commis des crimes et des violations en relation avec la justice transitionnelle ».

Elle a pointé d'ailleurs le fait que le président du parlement, Rached Ghannouchi, n'est pas en mesure de désigner Mohamed Ghariani à la tête d'institutions de l’État, et ce, conformément aux dispositions de l'article 21 de la loi sur la justice transitionnelle.

Ben Sedrine a appelé le chef du parlement Ghannouchi à démissionner de son poste.

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