Tchad/Procès de Hissein Habré : Les victimes et leurs proches soulagés
- L'ex-président tchadien Hissène Habré a été condamné, lundi à Dakar, à la réclusion à perpétuité, pour "crimes contre l'humanité" et "crimes de guerre"

Tunis
AA/ N'Djamena/ Mahamat Ramadane
Après le verdict des Chambres africaines qui a condamné, lundi, l'ex-président tchadien, Hissein Habré, à la réclusion à perpétuité, les victimes et leurs proches ont poussé des soupirs de soulagement.
«Nous pouvons enfin faire notre deuil, car c'est depuis vingt six ans que nous attendons ce moment. Certains d'entre nous n'ont pas eu la chance de vivre ce verdict, puissent leurs âmes reposer, enfin !», a déclaré à Anadolu, Dénémadji Adéline, emprisonné trois ans, par la police politique de l'ex-président tchadien.
«Ce n'est pas encore fini, Hissein Habré n'a été jugé que par la justice des hommes, celle de Dieu l'attend encore. Nous sommes soulagés et satisfaits de ce verdict des chambres africaines , que cela serve de leçon à tous ceux qui croient avoir le droit de torturer les gens et d'ôter la vie à leurs semblables », a affirmé Ateib Mahamat Moustapha, pointant son doigt sur sa chaise roulante.
Fatimé Nasser Sanoussi, une sexagénaire, n’a pas été moins surprise par ce procès. «Je n'arrive pas à croire que le "lion" du Tchad est condamné à perpétuité. Hissein Habré en prison, c'est la preuve que la justice de Dieu existe. Il a torturé et tué nos proches sans procès ni justice. Par contre, nous lui avons offert la chance de se défendre devant les chambres africaines et il est reconnu coupable. Cette journée est mémorable, j'irai enfin prier pour mes amis qui n'ont pas eu la chance de vivre ce moment », a-t-elle égrené.
Même émotion pour Ali Mahamat Touka, ancien enseignant tchadien, accusé par la police politique de l'ex-dirigeant tchadien d'avoir critiqué ouvertement le régime en pleine salle de classe. « J'étais un jeune enseignant en 1986, lorsque les agents de la DDS (Direction de la Documentation et la Sécurité) sont venus me prendre dans la cour de l'établissement, devant les élèves. Ils m'ont bastonné, humilié en public avant de m'incarcérer dans une prison secrète 4ans sans jugement », témoigne-t-il.
Pour l'analyste politique tchadien Ahmat Yaya, joint par Anadolu, le procès de l' « ex-dictateur » tchadien Hissein Habré est une victoire d'honneur et pour les Tchadiens et pour les Africains.
«Le Tchad est le premier pays africain à juger son ex-président en Afrique et par les Africains, c'est une histoire africaine à écrire en lettre d'or. Les victimes sont soulagées et le Tchad est désormais sûr de pouvoir faire son deuil national, en mémoire des victimes de Hissein Habré. Nous ne pouvons que nous réjouir qu'un dictateur africain comme Hissein Habré soit reconnu coupable pour ses actes et condamné à perpétuité », a-t-il conclu.
L'ex-président tchadien Hissène Habré a été condamné, lundi à Dakar, à la réclusion à perpétuité, notamment, pour "crimes contre l'humanité" et "crimes de guerre", ont annoncé les Chambres africaines extraordinaires (CAE), une juridiction africaine chargée de le juger.
Habré dispose néanmoins "d’un délai de quinze jours pour faire appel de la décision" de la Cour.
Exilé à Dakar où il vit avec sa famille après avoir dirigé le Tchad de 1982 à 1990, Habré a été arrêté le 30 juin 2013. Il est jugé par les Chambres africaines extraordinaires, une juridiction créée en vertu d'un accord entre le Sénégal et l'Union africaine (UA). Une commission d'enquête tchadienne avait estimé, peu après sa chute, le bilan de la répression sous Hissène Habré à près de 40.000 morts.