Afrique

Tam-tam, la Guinée pouvait-elle rêver meilleur ambassadeur ?

- Des mélomanes viennent de l'Amérique latine, des Etats-Unis et du Japon pour apprendre la percussion et la danse en Guinée.

Safwene Grira  | 27.10.2016 - Mıse À Jour : 28.10.2016
Tam-tam, la Guinée pouvait-elle rêver meilleur ambassadeur ?

Guinea

AA/ Conakry/ Boussouriou Bah

Enveloppée dans une tunique bariolée, de celles qu'on voit souvent dans les rues de Conakry, Sonia Drissi se déchaîne, un tam-tam à la main, en effectuant des pas de danse. Il y a deux ans, cette Française de 33 ans a laissé derrière elle le confort de sa vie parisienne pour venir s'installer en Guinée et apprendre la percussion.

"Je suis attirée par la danse et le rythme du tam-tam. J'ai découvert cela il y a quelques années, en Italie, à l'occasion d'un festival des danses africaines", avoue-t-elle à Anadolu.

Dans ce centre, situé en plein coeur de la capitale guinéenne, Sonia n'est, toutefois, pas la seule étrangère.

"On dirait que mon club se trouve quelque part en Europe ou en Amérique, tant on y voit des étrangers", dira fièrement Boubacar Touré, directeur du centre "ballet Fareta" et administrateur du ballet national Djoliba.

"Il y a des gens qui viennent de l'Amérique latine, des Etats-Unis, ou du Japon, comme moi, pour apprendre la percussion et la danse en Guinée", témoigne Ryu Sato, dans une déclaration à Anadolu.

L'engouement étranger pour cet instrument très utilisé dans la musique traditionnelle guinéenne date déjà de quelques années, selon Boubacar Touré. Témoigne de cette "convoitise sans précédent", quelques centaines d'Européens, d'Américains ou d'Asiatiques qui ont débarqué en Guinée pour apprendre la percussion rien que pendant ces trois dernières années, selon des estimations qu'il dit détenir du réseau des clubs de tam-tam, se comptant par dizaines dans ce pays.

La fascination qu'exerce le tam-tam sur les étrangers obéit, du reste, à des logiques variables. C'est ainsi qu'au-delà de sa dimension artistique, l'histoire du tam-tam intéresse particulièrement les apprentis d'origine étrangère.

Historiquement, l'usage du tam-tam répondait en effet à un besoin pratique. "C'était, dans certaines communautés, un moyen de communication à l’image de la Tabala [autre tambour guinéen]. Quand il y avait un événement (mariage, décès etc.), on battait le tam-tam pour alerter la communauté, ou l'informer, etc. Avec l’évolution de la société, le tam-tam s’est invité dans la musique où il s’est imposé", d'après Touré.

Chez l'ethnie Sousou, présente en Basse Guinée [Ouest], on joue encore le rythme yankadi dans le cadre des "rites de séduction".

"En pleine lune, de jeunes filles et garçons se rencontrent dans un endroit bien déterminé et se font face. On bat le tam-tam et ils se mettent à danser en agitant des mouchoirs qu'ils s'échangent fréquemment pendant cette célébration traditionnelle", décrit Aboubacar Touré.

L'autre spécificité de la percussion guinéenne, qui attire les mélomanes occidentaux, est sa richesse en rythmes. "Le Sénégal n’a pratiquement qu'un seul rythme qui est le Nbalakh. Tout ce que l'on joue, tourne autour de ce rythme, même si les pas peuvent varier. Au Mali, il y a un peu plus de rythmes, mais pas aussi nombreux et riches que ceux de la Guinée", compare-t-il.

"En Basse-Guinée par exemple, nous avons notamment le yankadi, le makourou. Quand nous évoluons vers la Moyenne Guinée [Nord], nous trouvons le Toupoussessé, le Hirdé [joué lors des veillées nocturnes]. En Haute Guinée [Est], on peut trouver le doudoumba, le kawa. Et plus au sud du pays, en Guinée Forestière, c'est le koukou ou encore le zaouli qui sont les rythmes dominants", illustre ce fin connaisseur du tam-tam guinéen.

C'est justement "cette diversité culturelle guinéenne qui attire les étrangers, les incite à suivre des formations qui peuvent s'étendre sur quelques années. Ils sont unanimes pour proclamer la Guinée: pays des percussions", ajoute-t-il.

Certains percussionnistes professionnels sont également animés par un "retour aux sources", fait observer Touré.

"La plupart des musiques américaines ont une origine africaine. On a parfois l’impression que les occidentaux n'ont plus de nouveaux rythmes à exploiter. En Afrique, en revanche, la richesse rythmique est intarissable. A présent, les Occidentaux sont obligés de venir chercher l'inspiration ici. Cela nous permet, de notre côté, de valoriser notre culture", conclut le professeur de tam-tam.

Un élan que semble vouloir encourager les autorités guinéennes. S'exprimant récemment sur une radio locale, le secrétaire général du ministère de la Culture et du Patrimoine historique, Isto Keira, a évoqué une "volonté politique manifeste de la part des autorités" en faveur de la culture. "On va organiser des sessions de formation, des ateliers et des rencontres professionnelles entre les acteurs de la culture guinéenne", a-t-il déclaré.


Seulement une partie des dépêches, que l'Agence Anadolu diffuse à ses abonnés via le Système de Diffusion interne (HAS), est diffusée sur le site de l'AA, de manière résumée. Contactez-nous s'il vous plaît pour vous abonner.
A Lire Aussi
Bu haberi paylaşın