Afrique

Soudan : "Le conflit a entraîné l'effondrement du système de santé", déplore le ministre de la Santé du pays

- "Selon les premières estimations dans le domaine de la santé, les pertes s'élèvent à 11 milliards de dollars", a indiqué Heysem Mohammed Ibrahim

Gökhan Kavak, Ahmed Satti  | 23.12.2024 - Mıse À Jour : 24.12.2024
Soudan : "Le conflit a entraîné l'effondrement du système de santé", déplore le ministre de la Santé du pays

Sudan

AA / Port Soudan / Gokhan Kavak - Ahmed Satti

Heysem Mohammed Ibrahim, le ministre soudanais de la Santé, a expliqué que le conflit entre l'armée et les Forces de soutien rapide (FSR), qui dure depuis environ 20 mois dans le pays, a provoqué l'effondrement du système de santé.

Au Soudan, pays d'Afrique de l'Est, la guerre entre l'armée et les FSR se poursuit dans de nombreux États, laissant la population face à diverses difficultés.

Ce conflit a causé d'importantes destructions dans des domaines tels que les infrastructures, l'économie, l'éducation et la santé, et a provoqué la plus grande crise de déplacement au monde.

Depuis le 15 avril 2023, toutes les tentatives visant à mettre fin au conflit entre l'armée soudanaise et les FSR, autrefois alliées, en raison de désaccords sur des questions telles que la réforme militaire et l'intégration, ont échoué.

Selon l'Organisation des Nations unies (ONU), plus de 20 000 personnes ont perdu la vie à cause du conflit, le nombre de personnes ayant quitté le pays a dépassé les 3 millions et près de 9 millions d'autres ont été déplacées à l'intérieur du pays. Plus de 25 millions de personnes ont besoin d'une aide humanitaire.

Le ministre soudanais de la Santé, Heysem Mohammed Ibrahim, a abordé l'impact de la guerre sur le système de santé du pays.


- "La crise que connaît actuellement le Soudan est sans précédent dans aucun autre pays"

Heysem Mohammed Ibrahim a souligné que la crise actuelle au Soudan était sans égal sur les plans humanitaire et sanitaire, notant que les "milices" (des FSR) avaient violé les normes internationales, les lois et la morale, ciblant les citoyens, les maisons, les centres de services, les réseaux d'eau, d'électricité et d'énergie, les récoltes, les hôpitaux et les fournitures de médicaments.

Rappelant que la guerre a commencé dans la capitale Khartoum, le ministre soudanais a souligné qu'une énorme crise de déplacement s'est produite et que certaines personnes ont dû migrer plusieurs fois d'affilée.


- Les hôpitaux ont servi de casernes militaires

Heysem Mohammed Ibrahim a souligné que le système de santé avait été directement ou indirectement affecté par la guerre, indiquant qu'il avait personnellement assisté aux attaques contre les hôpitaux et à leur utilisation comme casernes militaires, et ce dès les premières heures de la guerre.

"J'étais à l'hôpital de Khartoum le quatrième jour de la guerre, alors que cet hôpital et les hôpitaux environnants étaient occupés par les FSR. Après cela, de nombreux autres hôpitaux ont été mis hors service. Ces hôpitaux hors service ne sont pas des hôpitaux ordinaires. Ce sont des hôpitaux de référence spécialisés qui fournissent des services de cardiologie, de transplantation d'organes, de neurologie, de chirurgie spécialisée et d'oncologie", a-t-il dit.

Il a également déclaré qu'environ 600 millions de dollars de médicaments et de fournitures médicales avaient été pillés, détruits ou perdus dans les entrepôts, provoquant une énorme pénurie de médicaments.

Le ministre soudanais de la Santé a également indiqué que plus de 200 ambulances et véhicules médicaux ont été pillés.

"Selon les premières estimations dans le domaine de la santé, les pertes s'élèvent à 11 milliards de dollars. Nous avons perdu plus de 60 membres du personnel soignant alors qu'ils prodiguaient des soins directs. Tout cela n'a pas stoppé nos efforts. Nous avons poursuivi nos activités. Dès le premier jour de la guerre, nous avons élaboré des stratégies claires comprenant cinq priorités : sauver des vies et traiter les cas critiques, assurer l'approvisionnement en médicaments et en fournitures médicales, faire fonctionner les hôpitaux, les soins intensifs et les salles d'urgence, lutter contre les urgences et les épidémies, ainsi que la santé des enfants et des femmes, et coordonner le travail et les partenariats avec les organisations internationales", a-t-il ajouté.


- "Nous sommes revenus du bord de l'effondrement et la situation s'est relativement stabilisée"

Heysem Mohammed Ibrahim a souligné que les affrontements ont entraîné l'effondrement du système de santé, ajoutant que le pays est "heureusement parvenu à éviter l'effondrement total et, après près de deux ans, la situation s'est relativement stabilisée."

"Nous avons rouvert un très grand nombre d'hôpitaux. Actuellement, certains hôpitaux proposent des services de chirurgie à cœur ouvert, d'oncologie et de gastro-entérologie. Il reste toutefois un domaine dans lequel nous ne pouvons pas revenir, celui de la transplantation d'organes", s'est-il félicité.

Il a ajouté que le gouvernement soudanais, avec le soutien d'organisations internationales et régionales, a fourni des vaccins pour contrôler la situation et a réussi à acheter plus de 12 millions de doses de vaccin contre le choléra.

"Nous devons relever deux défis : le premier est d'assurer l'accès des citoyens soudanais des différentes régions du pays. Cela est dû à la question de la sécurité. Dans les zones contrôlées par les forces armées, nous pouvons exercer notre mission sans difficulté, mais dans les zones contrôlées par les FSR, nous rencontrons de grandes difficultés. Nous espérons pouvoir bientôt atteindre l'ensemble des régions du Soudan. Le deuxième défi est que les fonds alloués pour soutenir la crise au Soudan sont insuffisants par rapport aux besoins. L'aide fournie ne dépasse pas 20 % des besoins réels. Selon les estimations précédentes, il faudrait au moins 4,7 milliards de dollars pour répondre aux besoins sanitaires et humanitaires. Nous renouvelons donc notre appel à tous les donateurs, qu'ils soient régionaux ou internationaux", a-t-il affirmé.


- Les établissements de santé ont enregistré 250 cas de viols

Concernant les agressions sexuelles et les viols de femmes, Heysem Mohammed Ibrahim a qualifié le viol comme "l'un des événements les plus regrettables que le Soudan ait connus depuis son indépendance."

"Le viol est l'un des événements les plus regrettables que le Soudan ait connus depuis l'indépendance, un phénomène qui ne s'est pas produit pendant les guerres. Ce sont des comportements qui n'appartiennent pas à la société soudanaise. Les pratiques des mercenaires dans les territoires occupés vont à l'encontre de la culture soudanaise. Plus de 250 cas de viols ont été signalés dans les établissements de santé, mais ce chiffre est probablement bien plus élevé", a-t-il précisé.

Se référant à la visite de Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), au Soudan, le ministre soudanais de la Santé, a noté : "Au début, on pensait que ce qui se passait au Soudan était un problème civil ou politique interne, ou que deux groupes s'affrontaient. Cependant, lorsque nous leur avons parlé de la situation sanitaire et humanitaire, et de son impact non seulement sur le Soudan, mais aussi sur l'Afrique et la région, et lorsqu'ils sont venus voir la situation de leurs propres yeux, leur attitude à notre égard a changé."


- "Les relations entre le Soudan et la Türkiye sont anciennes et stratégiques"

Heysem Mohammed Ibrahim a insisté sur le caractère ancien et stratégique des relations entre le Soudan et la Türkiye, en particulier dans le domaine de la santé.

"Nous avons une coopération très étroite dans ce domaine. L''hôpital de formation et de recherche turc soudanais de Nyala et l'hôpital turc de Khartoum sont les manifestations les plus importantes de cette coopération. La Türkiye apporte également son soutien à la formation du personnel soignant. En outre, elle prend en charge le traitement des Soudanais dans les cas qui ne peuvent être traités dans ce pays. Nous avons également reçu des médicaments et un soutien médical de la Türkiye pendant la guerre", a-t-il poursuivi.

Selon Heysem Mohammed Ibrahim, il est impossible de déterminer le nombre de personnes ayant perdu la vie à cause de la guerre, précisant que les établissements de santé avaient recensé plus de 40 000 cas de blessures et environ 6 000 cas de décès.

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