Sénégal-Présidentielle: Parrainage, le projet de loi de «tous les dangers»
- Réservé exclusivement aux candidats indépendants, le parrainage va s’élargir à tout candidat à la présidentielle. De 10 mille signatures requises, il passe, avec le nouveau projet de loi, à un pour cent du corps électoral.

Senegal
AA/Dakar/Alioune Ndiaye
La séance plénière du jeudi 19 avril convoquée par le parlement sénégalais pour le vote du projet de loi portant modification du code électoral tient le pays en haleine.
Opposition et mouvements citoyens, dont «Y’en a marre» ont promis d’assiéger l’Assemblée nationale pour barrer la route au dit projet.
Au nombre des modifications, la généralisation du parrainage est récusée jusque du côté de certains alliés de la mouvance présidentielle, tels le député Demba Diop Sy ou encore l’ancien ministre Thierno Lô.
Réservé exclusivement aux candidats indépendants, le parrainage va s’élargir à tout candidat à la présidentielle. De 10 mille signatures requises, il passe, avec le nouveau projet de loi, à un pour cent d’électeurs du fichier général.
Les quotidiens dakarois parus mercredi font, d’ailleurs, un large écho de ce rendez-vous crucial qui fait craindre au plus haut.
‘’Jeudi de tous les dangers’’, s’inquiète le quotidien privé Sud Quotidien. ‘’Projet de loi sur le parrainage - Veillées d’armes’’, annonce de son côté la parution privée L’As.
«Walfadjri» fait état, à sa Une, de ‘’Branle-bas de combat’’. «Au niveau des partis politiques de l’opposition, on s’organise pour mobiliser le maximum de militants, afin d’empêcher le vote de la loi sur le parrainage», a développé, le quotidien privé.
Députés de l’opposition et non-inscrits, impuissants face au diktat de la majorité présidentielle, déterminée à faire passer le projet de loi, ont appelé mardi le peuple «à barrer la route» au projet de loi qu’ils considèrent comme une «manipulation constitutionnelle et électorale».
«Nous appelons le peuple à venir massivement investir l’assemblée nationale pour contraindre la mouvance présidentielle à ne pas voter le projet de loi», a lancé Madické Niang du parti de l’ancien président Abdoulaye Wade, président du groupe parlementaire de l’opposition.
«Ce qui est en jeu, c’est l’avenir du Sénégal, nous n’accepterons pas que la Constitution soit modifiée pour les intérêts du candidat Macky Sall. Nous appelons le peuple à descendre dans la rue pour dire non», a décrété Malick Gackou chef du Grand Parti (opposition).
Le mouvement citoyen «Y’en a marre» a promis de répondre présent à la mobilisation.
« [Y’en a marre] se joint à toutes les forces vives de la nation et appelle le peuple à se mobiliser (…) Le peuple doit barrer la route à tous ceux qui, hier comme aujourd’hui, ne voient notre constitution que comme un outil au service de leurs intérêts politiques», a annoncé le mouvement dans un communiqué publié lundi.
Ce mouvement jeune prédit même «un 23 juin bis».
Le 23 juin 2011, les forces vives regroupées autour du M23 (mouvement du 23 juin) avaient assailli l’Assemblée nationale pour contraindre le pouvoir d’Abdoulaye Wade à retirer le projet de modification de la loi électorale qui avait pour but d’approuver l’instauration du quart bloquant.
En dépit de la désapprobation de l’opposition, le pouvoir a affirmé sa détermination à faire passer le projet de loi.
«Du côté de l’Etat, l’exécutif a fait son devoir en adoptant le projet (…) S’il n’y a pas de consensus, nous allons appliquer la démocratie, la loi de la majorité», a assumé Macky Sall lundi dans une déclaration radiodiffusée.
«Il nous faut un filtre pour élire un président de la République. C’est une bonne chose pour que notre pays reste une démocratie majeure», a fait part Aymérou Gningue, président du groupe parlementaire de la mouvance présidentielle, d’avis que tout est en place pour voter le projet de loi.
Des menaces de l’opposition, Aminata Touré, conseillère spéciale du président de la république, dit se conférer juste aux réglementations en vigueur dans le pays.
«C’est le ministère de l’Intérieur, en fonction de la situation qui décidera. Celui qui manifeste doit le faire en respectant la loi, dans l’ordre et la discipline», a-t-elle soutenu.
Les bons offices de la société civile ayant entamé une médiation entre les différentes parties n’ont jusque-là rien donné.
Le chef de l’église Benjamin Ndiaye dans une déclaration, mercredi, a appelé le chef de l’Etat à reporter le vote du projet de loi, emboîtant, ainsi, le pas au khalife de la confrérie des Tidianes, Ababacar Sy Mansour, qui en avait fait de même.
A moins de 24 heures de la session parlementaire c'est la grande incertitude autour de ce projet destiné à "rationaliser les partis politiques" selon la mouvance et à " tripatouiller la Constitution pour des intérêts politiques" selon l'opposition.
Les suspens reste donc total jusqu'à ce jeudi historique.