Afrique

RDC: Le parc des Virunga, un patrimoine en déperdition

-Pris d'assaut par une population en manque de ressources, le parc des Virunga est également exploité par nombre de groupes armés sévissant dans l'Est de la RDC

Nadia Chahed  | 28.02.2017 - Mıse À Jour : 28.02.2017
RDC: Le parc des Virunga, un patrimoine en déperdition

Congo, The Democratic Republic of the

AA/Nord-Kivu( RDC)/ Joseph Tsongo

Le parc des Virunga le plus ancien et le plus riche en espèces animales de la République démocratique du Congo (RDC) traverse des moments difficiles. Il est pris d'assaut par une population qui se dit oubliée par les autorités, décidant de se servir elle-même des richesses du parc.

Des centaines de familles s'y sont, en effet, installées, pour planter et cultiver une terre connue pour sa fertilité et gagner ainsi leur vie, affectant ainsi lourdement la faune et la flore du parc, fondé en 1925 et classé au patrimoine mondial de l'Unesco.

La présence, depuis plus d'une vingtaine d'années, de groupes armés aussi bien locaux qu'étrangers dans l'Est du pays, notamment dans les environs du parc, ne fait qu'aggraver davantage la situation. Ces derniers offrent en effet leur protection aux populations face aux autorités et aux gardes du parc, notamment pour faire sortir les récoltes de riz, d'haricots, de maniocs ou de maïs. .

Des leaders locaux parlent d'un vrai contentieux entre l’Institut congolais de conservation de la nature (ICCN) et les populations de la région.

Au cœur des altercations, les limites du parc national des Virunga, jugées excessives par les habitants des localités avoisinantes qui estiment que la superficie du parc est beaucoup plus importante que celle des terres destinées à la culture. "Les animaux n’ont pas plus de droits que les hommes, nous devons revoir les limites de ce parc", s'insurge un habitant de Kamandi, localité limitrophe au parc.

Un point de vue partagé par beaucoup de riverains dont la majorité ignorent la valeur du parc en tant que patrimoine mondial protégé, déclare à Anadolu Mbusa, un chef notable de Kyavinyonge, se désolant que cette ignorance soit appuyée par les groupes armés qui s'érigent en défenseurs la population. "Les activités illicites dans cette aire protégée se font avec la bénédiction des groupes armés", explique-t-il.

Kakule Egide un agriculteur qui s'est installé avec sa famille dans le parc, il y a environ trois ans, explique qu'afin de se prémunir contre les gardes, lui et ses semblables recourent aux Mai-Mai avec qui ils partagent leurs gains ou leurs cueillettes.

"Parfois quand l’ICCN lance des campagnes pour nous faire chasser, ce groupe armé bien que moins fort que l’armée, nous défend parce que ces champs nous appartiennent. C’est la terre de nos ancêtres et pas question d’en faire un parc", ajoute encore Kakule Egide.

Outre ces milices locales d’auto-défense qui naissent et s'épanouissent dans ce plus vieux parc d’Afrique, les rebelles rwandais des FDLR, sévissant dans la région depuis les années 1993, se sont installés dans la partie centrale du parc national des Virunga.

"Ils y coupent le bois et font du braconnage ", note Emmanuel, membre d'une ONG locale active dans le domaine environnemental.

Ces rebelles ( FDLR) facilitent également l'accès de certaines zones du parc aux paysans qui leur cèdent une partie de ce qu'ils récoltent en contrepartie de ces services, ajoute Emmanuel.

Bien que bénéficiant de la protection des groupes armés, les agriculteurs du parc vivent dans la crainte de se voir un jour définitivement chassés. Les gardes du parc mènent en effet des campagnes d'envergure détruisant les habitations.

Kasereka Guillaume, père de cinq enfants s'est récemment retrouvé expulsé du parc sans aucune ressource. Depuis, il s’est installé avec les siens à Kibirizi, une commune rurale située à la lisière du parc national de Virunga toujours dans la province du Nord-Kivu.

« Ils ont été induits en erreur par des candidats aux Parlement, qui avaient promis de plaider leur cause à Kinshasa» commente Emmanuel. En effet, poursuit-il, lors des dernières élections, la question du parc a été l’un des thèmes les plus exploités. Les futurs élus disaient aux paysans de la région qu’on ne pouvait pas pénaliser les populations pour le seul intérêt du parc, les encourageant à y cultiver la terre.

D’autres riverains du parc, dénoncent la brutalité dont fait preuve l’ICCN pour libérer le site, "les gardes du parc des Virunga mènent des opérations sans ménagement, maisons brûlées, vivres et récoltes incendiés,…ils sont parfois impitoyables et n'hésitent pas à tuer ceux qui résistent", témoigne un jeune.

De son côté l'ICCN nie ces allégations, soutenant que des efforts sont déployés pour assurer le développement économique des riverains du parc des Virunga : «Pour l’instant, plusieurs villages dans l’Est de la République Démocratique du Congo sont raccordés au courant électrique produit par les centrales hydroélectriques de Matebe et de Mutwanga, récemment construites dans le cadre du programme de l’Alliance pour les Virunga, coalition dont l’objet est de permettre la survie du parc national des Virunga», affirme Joël Wengamulayi, le chargé de communication de l'ICCN.

En outre, Wengamulayi estime que l’avènement de ce grand réseau électrique, est l’une des premières rétributions du parc des Virunga, assurant que d’autres projets de développement suivront.

Selon l’UNESCO, le parc national des Virunga s’étend sur 790 000 hectares. Il compte d'importantes richesses aussi bien en termes de faune que de flore. Quelques 20 000 hippopotames peuplent ses rivières, les gorilles de montages y trouvent aussi refuge et des oiseaux en provenance de Sibérie viennent y passer l’hiver.

Seulement une partie des dépêches, que l'Agence Anadolu diffuse à ses abonnés via le Système de Diffusion interne (HAS), est diffusée sur le site de l'AA, de manière résumée. Contactez-nous s'il vous plaît pour vous abonner.
A Lire Aussi
Bu haberi paylaşın